D'ici la fin du siècle, l'ensemble de la région méditerranéenne sera exposé aux tensions du déficit en eau et subira de lourdes conséquences du changement climatique. Certains travaux de recherche indiquent que la Méditerranée deviendra l'une des zones critiques (« hot spot ») du changement climatique au cours du siècle. Ces donnèes préoccupantes ont été présentées à l'ouverture de la session ministérielle de la Conférences des Parties contractantes à la Convention de Barcelone (PAM/PNUE), tenue à Marrakech du 3 au 5 novembre. Les principaux impacts du changement climatique sur les mers se caractérisent par une hausse des températures, une acidification (modifications de l'équilibre chimique des eaux en raison de l'absorption du CO2), le changement des courants, des incidences sur la flore et la faune marines, et une élévation du niveau de la mer. En Méditerranée, les effets se traduiront plus particulièrement par des contraintes de plus en plus sévères concernant l'eau, par une érosion de la biodiversité, des atteintes causées aux écosystèmes et aux activités économiques qui en dépendent comme l'agriculture, la pêche et le tourisme. Les effets de l'élévation du niveau de la mer sur les ports et autres infrastructures du littoral, ainsi que l'érosion des côtes et des plages, suscitent de vives préoccupations. De menaces gravissimes pèsent sur le delta du Nil, sur des villes comme Venise et sur certaines îles, même dans l'hypothèse d'une élévation minime du niveau de la mer. « II y a urgence à agir. Jusqu'à présent, la plupart des discussions sur le changement climatique ont avant tout porté sur la réduction des émissions - une question primordiale. Mais nous sommes conscients que même si tous les objectifs assignés aux émissions sont atteints, il y aura des impacts. Pour y pallier, nous devons nous adapter et prendre des mesures », a déclaré Mme Maria Luisa Silva, administratrice chargée du Plan d'action pour la Méditerranée. Au bout du compte, nous savons que nous nous adapterons, mais à quel coût ? Plus nous tarderons à intervenir, plus élevé sera le coût». « La question des impacts régionaux du changement climatique est complexe puisque, par nature, ils sont transfrontières, notamment ceux qui s'exercent sur la biodiversité, les températures et la qualité des eaux, les niveaux de la mer et les écosystèmes ». « Les pays riverains de la Méditerranée auront donc un intérêt majeur à concerter et à coordonner leurs politiques et leurs programmes dans un cadre stratégique de manière à rassembler les meilleures connaissances disponibles et à appliquer des mesures d'adaptation ». Selon les recherches les plus récentes, des espèces invasives comme les méduses et les algues d'herbiers marins des zones tropicales sont désormais bien documentées dans la région, notamment la propagation en mer du Levant de l' « algue ravageuse» Caulerpa taxifolia - l'une des cent espèces mondiales les plus envahissantes -, laquelle était restée jusque là confinée à des zones circonscrites de la Méditerranée occidentale. En outre, les chercheurs sont de plus en plus préoccupés par l'acidification des mers et des océans liée à l'absorption par l'eau de mer du dioxyde de carbone et aux incidences qu'elle entraîne sur les mollusques/crustacés et les écosystèmes marins. En Méditerranée, il existe quelques 5 millions d'hectares d'herbiers marins à Posidonia oceanica, une plante phanérogame qui agit comme puits d'absorption du CO2 et sert de frayère et de nurserie à de multiples espèces. Au cours des dernières décennies, une régression de ces prairies sous-marines a été constatée au large des grandes agglomérations urbaines du littoral méditerranéen, comme Athènes, Naples, Gênes, Nice, Toulon, Marseille et Barcelone. Dans le passé, il a été fait un usage restreint des divers instruments financiers qui sont à la disposition des pays méditerranéens pour renforcer l'adaptation au changement climatique. « L'un des grands obstacles a été la connaissance insuffisante des fonds disponibles pour financer les mesures d'adaptation, ainsi que, parfois, la capacité limitée à prendre les dispositions nombreuses et souvent complexes - comme l'élaboration de propositions - nécessaires pour obtenir ces fonds », a souligné M. Ibrahim Thiaw, Directeur de la Division des Politiques Environnementales du PNUE. « Comme la nouvelle architecture financière facilitant les mesures d'adaptation sera élaborée à Copenhague le mois prochain et au-delà, il devient de plus en plus crucial que les pays méditerranéens tirent le meilleur parti possible de ces nouvelles possibilités de financement ». « Les mesures adoptées en réponse au changement climatique doivent être de nature à promouvoir le développement durable et à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement ainsi que ceux de la Stratégie méditerranéenne de développement durable », a déclaré, en sa qualité de Président des Parties contractantes, M. Abdelkabir Zahoud, Secrétaire d'Etat auprès du ministre marocain de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement. «Les pays doivent réorienter leurs économies vers les filières à faibles émissions et construire des sociétés résilientes au climat. Les mesures concernant le changement climatique peuvent être compatibles avec les priorités des pays en développement concernant l'éradication de la pauvreté et le développement durable, ainsi qu'il est souligné dans la Déclaration de Marrakech qui sera publiée à la clôture de la présente conférence».