Notre système éducatif souffre de plusieurs tares, parmi lesquelles des manuels scolaires dépassés. Cet instrument pédagogique sent bon les années 80, avec des couleurs fades, des textes illisibles et du papier bas de gamme. En termes de numérisation, nous avons complètement raté le coche. Contrairement à d'autres pays, aucun livre scolaire marocain n'est accompagné de supports numériques complémentaires. Dès lors, comment capter l'attention d'un élève qui a grandi avec Internet et les réseaux sociaux ? Pour les nouvelles générations, un manuel scolaire est au mieux une relique d'un autre âge, au pire un fardeau. Comme l'explique le Conseil de la Concurrence dans un récent avis, le problème vient d'une situation de rente créée par l'Etat. Selon les chiffres de l'institution, quatre maisons d'édition disposent d'une part de marché cumulée de plus de 53%. Une telle configuration empêche toute innovation et toute amélioration du contenu et du contenant. En libéralisant le marché en amont et en fixant les prix en aval, l'Etat pousse les rares éditeurs nationaux à gratter sur la qualité pour augmenter leurs marges. Ces producteurs choisissent ainsi de dégrader volontairement les couleurs, le nombre de pages et le grammage du papier pour maîtriser leurs coûts. Les auteurs de ces manuels, composés essentiellement d'inspecteurs et de professeurs du ministère de l'Education, se trouvent également mal payés et ne sont, par conséquent, pas motivés à fournir un travail d'excellence. Il faut d'urgence revoir ce marché si vital à la réussite du chantier de la réforme du système éducatif. Le ministère de l'Education doit ainsi imaginer une nouvelle approche, ne se limitant pas simplement à la fixation des prix, mais plus imaginative, en accordant par exemple des subventions sur la base de la qualité, de la créativité et de l'innovation. Le marché des outils pédagogiques gagnerait aussi à s'ouvrir à des startups marocaines, plus agiles, plus originales et surtout moins ringardes dans leur approche de confection des produits proposés.