Les députés français devaient se prononcer lundi sur une nouvelle motion de censure, la 17ème déposée par les oppositions contre le gouvernement d'Elisabeth Borne en un an. Le RN de Le Pen votera le texte de la gauche. La socialiste Valérie Rabault doit donner le coup d'envoi des débats dans l'hémicycle à 16H00. Elle défendra cette motion de l'alliance de gauche Nupes, riposte après l'échec jeudi dernier d'une tentative d'abrogation de la retraite à 64 ans. La mesure n'a pu faire l'objet d'un vote à l'Assemblée nationale, ce qui signe un "coup de force anti-démocratique", selon les tenants de la motion. Pour le président de la commission des Finances de l'Assemblée Eric Coquerel (LFI), il faut malgré tout "marquer le coup", des "lignes rouges" ayant été franchies, même si "a priori on aura un résultat un peu moins bon que la dernière fois" en mars. Dans son texte, la gauche pointe que "le gouvernement et sa majorité ont à nouveau bafoué les droits du Parlement pour l'empêcher de se prononcer sur l'abrogation" des 64 ans. Pointant par ailleurs « un affaiblissement considérable du droit constitutionnel dont disposent les groupes d'opposition », la NUPES considère que la majorité présidentielle se livre à un « mépris constant depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites ». Les députés LFI, PS, EELV et PCF y dénoncent également "le mépris constant, depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites, affiché à l'égard de nos concitoyens et concitoyennes et des organisations syndicales".
Le RN pour la motion
La proposition d'abrogation avait entretenu la flamme de la contestation de la réforme, malgré sa promulgation mi-avril. Mais les oppositions n'ont pas réussi à obtenir un scrutin jeudi sur la mesure phare du texte porté par le groupe Liot, celle-ci ayant été retoquée au nom de son "irrecevabilité". Les députés RN emmenés par Marine Le Pen voteront en revanche d'un bloc la motion Nupes, comme cela s'est déjà produit ces derniers mois. "Nous voulons que Mme Borne s'en aille avec sa réforme sous le bras, et surtout, nous voulons qu'il y ait un vote car il n'y a pas eu de vote à l'Assemblée nationale" sur les retraites, explique Sébastien Chenu. Le Rassemblement national (RN) va voter la motion de censure déposée contre le gouvernement par la Nouvelle union populaire écologique et solidaire (NUPES), a annoncé dimanche le député Sébastien Chénu dans une interview à LCI. « Les 88 députés du Rassemblement national seront là pour voter la motion de censure parce que nous voulons la fin de ce texte », de réforme des retraites, a plaidé le vice-président du parti à l'Assemblée nationale. Il indique, par ailleurs, que le RN souhaite « que Mme Borne s'en aille, avec sa réforme sous le bras, et surtout (...) qu'il y ait un vote car il n'y a pas eu de vote à l'Assemblée nationale » concernant la réforme des retraites. Sébastien Chénu précise, néanmoins, que le vote de cette motion de censure déposée par l'union de la gauche ne relève par « d'une alliance » mais montre que les députés RN sont « capables de voter une motion de censure déposée par d'autres ».
Détournement de l'article 41
« Le gouvernement a utilisé des artifices pour obliger les Français à accepter cette réforme des retraites, pour la leur imposer », a-t-il déploré au cours de son interview. « Sous la pression de l'Exécutif, la Présidente de l'Assemblée nationale a déclaré irrecevables, au titre de l'article 40 de la Constitution, les amendements proposant de conserver un âge légal de départ à la retraite fixé à 62 ans », rappellent les députés de la NUPES dans leur texte, qualifiant cette démarche « d'attaque inédite contre la démocratie parlementaire ». Ils estiment que « lors de l'examen en Commission des affaires sociales de cette proposition d'abrogation du recul de l'âge de départ à la retraite, la défense des sous-amendements a été empêchée par un détournement de l'article 41 du règlement de l'Assemblée nationale, au mépris du droit d'amendement ». Les députés Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) n'ont pas déposé de nouvelle motion, "les conditions de succès" d'une telle initiative n'étant "pas réunies actuellement, notamment du fait de l'attitude d'une partie du groupe Les Républicains". De plus, "nous ne souhaitons pas qu'un rejet d'une motion de censure puisse être instrumentalisé par le gouvernement et sa majorité relative comme un vote de rejet" de la proposition d'abrogation, précise le groupe de Bertrand Pancher qui laisse la liberté de vote à ses membres. La majorité épingle une "forme de tragique de répétition" "Régulièrement, une partie des oppositions nous amène à redémontrer qu'il n'y a pas de majorité alternative", balaie la Première ministre qui avait échappé de peu en mars à un renversement de son gouvernement, à neuf voix près. Dix-neuf députés LR sur 61 avaient alors voté pour une motion du groupe indépendant Liot, après le recours à l'arme constitutionnelle du 49.3 par la cheffe du gouvernement pour faire passer la réforme des retraites. La donne a changé, juge l'un d'eux, Aurélien Pradié, qui "ne pense pas" voter la motion lundi: "Elle est déconnectée du sujet, de la réforme des retraites". En retour, Aurore Bergé, cheffe de file du groupe Renaissance (majorité présidentielle), brocarde "une alliance des contraires" qui veut faire tomber le gouvernement et "figer le pays" en bloquant les réformes. Après la 14e journée de mobilisation sociale mardi dernier, qui a enregistré la plus faible participation en cinq mois de manifestations, l'Exécutif espère pouvoir tourner la page des retraites. De son côté, Mme Borne martèle qu'elle est "au travail" avec son gouvernement pour répondre aux "préoccupations des Français", notamment pour trouver une majorité afin de faire passer un texte sur l'immigration. La locataire de Matignon est soumise à une autre échéance, celle du 14 juillet, au bout des 100 jours fixés par Emmanuel Macron pour relancer le quinquennat.