L'incertitude et le flou planent sur l'issue du dossier SAMIR, qui « se caractérise par sa complication, eu égard à l'accumulation des dettes durant plus de 20 ans », a rappelé la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, lundi 22 mai devant l'Hémicycle. Intervenant lors de la séance plénière consacrée aux questions orales à la Chambre des Représentants, la responsable a tenu les mêmes propos, une fois le débat amorcé par les députés sur ledit dossier. Cette affaire, qui n'a toujours pas abouti à un compromis, « a eu des conséquences financières, économiques et sociales lamentables », a déploré une députée.
Le dernier rebondissement qu'a connu le litige a suscité des commentaires de la ministre. Ainsi, « le groupe « Coral », actionnaire de la Société anonyme marocaine de l'industrie de raffinage (SAMIR), a déposé une demande auprès du Centre International pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), réclamant une indemnisation de 27 milliards de dirhams », a-t-elle déclaré, soulignant que les dettes accumulées s'élèvent à plus de 30 milliards de dirhams, dont 40 % de l'Etat marocain.
Cet actionnaire majoritaire (67%) qui n'a pas respecté ses engagements pour sauver la société des retombées d'une mauvaise gestion, n'a pas hésité à présenter une demande d'arbitrage depuis mars 2018, et même à revendiquer l'indemnisation, accusant le Maroc d'en être responsable, du fait qu'il aurait soi-disant violé les accords d'investissement, a rappelé une députée du groupe du Progrès et du Socialisme.
Quid des bonbonnes de gaz ?
De par l'ancien rôle assuré par la société SAMIR, dans le marché des hydrocarbures marocain, les députés ont soulevé, par la même occasion, les soupçons de fraude aux bonbonnes de gaz, qui seraient manipulées dernièrement par quelques entreprises pour contrebalancer la hausse des prix du gaz butane sur les marchés internationaux. Ainsi, plusieurs entreprises auraient procédé à la diminution du nombre de litres de gaz, en gardant le même prix de vente. En réponse, Laila Benali a affirmé que les centres de remplissage font l'objet de contrôle, rappelant que les visites sur le terrain ont concerné près de 12.240 bouteilles de différentes tailles, dont le contenu moyen révélait des contenus répondant à la valeur légale.
Il était une fois ... la SAMIR
La société de raffinage des produits pétroliers SAMIR, mise à l'arrêt depuis août 2015, a été créée en 1959. Elle a été privatisée en 1997 et appartenait au milliardaire saoudien Cheikh Mohammed Al Amoudi, via son entreprise Coral Morocco Holding avec 67% des actions. En 2016, la société, qui employait près de 867 personnes à l'époque, a été déclarée en liquidation, avec un cumul de dettes de 45 milliards de dirhams.
La SAMIR était un raffineur national florissant et répondait largement aux besoins du Maroc en hydrocarbures. « SAMIR approvisionnait le marché national à hauteur de 64 % des besoins en produits raffinés (...), le raffineur national jouait donc un rôle fondamental dans l'approvisionnement, mais aussi dans le stockage, puisqu'il détenait plus de 50 % des capacités de stockage du pays, ce qui assurait la sécurité de notre pays contre toute pénurie éventuelle », avait déploré Driss Guerraoui, ancien président du Conseil de la Concurrence, lors de la présentation d'un rapport sur le plafonnement des marges des pétroliers au Maroc en 2020.
Le milliardaire saoudien s'était engagé, selon un cahier des charges, à réaliser une série d'investissements, le but étant de moderniser la raffinerie et de booster sa capacité de production, mais seulement une partie de ces investissements a vu le jour, notamment en ayant recours aux prêts bancaires conclus auprès de plusieurs institutions bancaires marocaines. Surendetté, l'homme d'affaires saoudien n'était plus apte à assurer ses engagements envers l'Etat, la situation financière de la société et sa mauvaise gestion ont conduit à son fiasco.
Pour rappel, le gouvernement marocain avait exprimé, le mois dernier, son soutien par le biais de son porte-parole pour « la relance de cette importante installation nationale ». Ainsi, Baitas avait déclaré que « l'Exécutif fera son possible au niveau organisationnel et institutionnel pour atteindre ce but et permettre à cette société de contribuer à nouveau à la production nationale ».