Le Conseiller istiqlalien Lahcen Haddad a estimé que les primes territoriales sont "insuffisantes" pour convaincre les investisseurs qui font toujours face à des blocages injustifiés. Détails. Actuellement, la Charte de l'Investissement est opérationnelle après la sortie des textes d'application. Le gouvernement espère à travers les primes territoriales et sectorielles propulser l'investissement privé et encourager le secteur privé à investir davantage. Le dispositif incitatif demeure important, mais insuffisant pour encourager les investisseurs dans les régions qui se trouvent au-delà de l'axe Tanger-Agadir, selon le Conseiller istiqlalien Lahcen Haddad. « La Charte de l'Investissement a été conçue selon l'idée que les primes amélioreront l'attractivité de l'investissement, mais cette hypothèse est partiellement correcte puisqu'il ne faut pas s'attendre à des résultats aussi probants qu'on pourrait croire au niveau territorial », a-t-il expliqué lors de la séance hebdomadaire dédiée aux questions orales à la Chambre des Conseillers, en réaction à l'exposé du ministre délégué chargé de l'Investissement, de la Convergence et de l'Evaluation des Politiques publiques, Mohcine Jazouli. Ce dernier est venu à la deuxième Chambre pour rendre compte de l'état d'avancement de la Charte, qui demeure l'un des chantiers prioritaires du quinquennat du gouvernement d'Aziz Akhannouch.
Primes : Et si ça ne suffit pas pour convaincre les investisseurs ?
Lahcen Haddad a relevé les limites des primes territoriales qui, de son point de vue, ne suffisent pas pour convaincre les investisseurs à aller s'installer dans des régions éloignées. « Il y a des investisseurs qui ne voudront pas aller s'installer dans des régions éloignées même si on leur propose des primes », a-t-il dit, jugeant que l'encouragement de l'investissement dans de telles régions est plus complexe qu'une affaire d'incitation financière. « Quelques investisseurs ne se plaignent pas du manque du soutien financier mais des blocages injustifiés des projets d'investissement », a-t-il argué, ajoutant que la bureaucratie, la corruption, les lobbies du foncier et les difficultés liées aux autorisations compliquent souvent les choses pour les investisseurs. D'où la nécessité de penser à des solutions au-delà des incitations financières. Lahcen Haddad a fait savoir que plusieurs projets sont suspendus dans nombre de régions pour des raisons mystérieusement inconnues. A cet égard, le Conseiller istiqlalien a appelé le ministère de tutelle à faire un audit et examiner l'ensemble des projets suspendus pour en déceler les raisons. Toutefois, Haddad a estimé que les primes n'en demeurent pas moins importantes pour attirer des investissements dans les secteurs de pointe comme les nouvelles technologies, les énergies renouvelables et l'industrie militaire.
Vers une plateforme centralisée de suivi Pour sa part, le ministre délégué, Mohcine Jazouli, a indiqué que son département travaille sur une plateforme de recensement des projets qui permettra d'avoir une meilleure visibilité sur l'évolution de l'ensemble des investissements au niveau régional. Concernant l'état d'avancement de l'opérationnalisation de la Charte, Jazouli a annoncé que son département a activé, jusqu'à présent, le dispositif de soutien principal aux projets à caractère stratégique. Pour garantir la célérité du traitement des dossiers, les autorités compétentes s'engagent à approuver le soutien financier aux projets à caractère stratégique dans un délai ne dépassant pas trois mois. Concernant les petites et moyennes entreprises, le ministre délégué a fait savoir que des instructions ont été données pour que le délai d'octroi des primes ne dépasse pas douze mois. En effet, le dispositif de soutien permet de débloquer des primes territoriales, dont le montant peut couvrir jusqu'à 15% du coût total du projet concerné à condition qu'il soit installé dans des régions prioritaires à fort besoin. L'objectif est de pousser le secteur privé à investir dans les provinces et les préfectures jugées défavorisées pour réduire les inégalités territoriales et créer des emplois là où il y a un grand besoin. Le choix des régions concernées est basé sur une segmentation minutieuse. Les régions sont désignées en tant que telles sur la base de plusieurs critères, à savoir le PIB par habitant, le taux de chômage et celui de pauvreté. En fait, le gouvernement a établi une liste de 75 provinces et préfectures éligibles, réparties sur trois catégories, comme stipulé dans l'arrêté du Chef du gouvernement. La première catégorie comprend 36 provinces dont les projets qui y seront réalisés obtiendront une prime de 10%, tandis que la deuxième catégorie, dite B, comprend 24 provinces où les investisseurs peuvent bénéficier d'une prime d'un montant supérieur (15%). En gros, dans le cadre du dispositif principal de soutien, la prime d'investissement peut être octroyée pourvu que le projet bénéficiaire réponde à tous les critères. D'abord, il faut qu'il puisse générer au minimum 150 emplois stables ou créer au moins 50 emplois avec un montant d'investissement supérieur à 50 millions de dirhams. Les investisseurs peuvent bénéficier à la fois des primes territoriales et sectorielles dans la limite de 30% du montant total de leurs projets. A travers la Charte de l'Investissement, le gouvernement fixe des objectifs ambitieux. L'Exécutif espère que le secteur privé sera assez volontariste pour occuper les deux tiers de l'investissement global en 2035. En attendant, le gouvernement s'est fixé le but d'arriver à un taux de 50% d'ici 2026. Aussi, l'Exécutif espère avoir des résultats probants en pariant sur la réforme du climat des affaires qui est conçu comme un complément de la Charte de l'Investissement.
Anass MACHLOUKH
Les douze CRI se préparent à relever le défi Le ministre délégué en charge de l'Investissement, de la Convergence et de l'Evaluation des politiques publiques, Mohcine Jazouli, a rassemblé, jeudi 11 mai à Rabat, les Directeurs Généraux des 12 Centres Régionaux d'Investissement (CRI) pour une première réunion d'information et de coordination. Cette réunion fait suite à l'adoption du décret 2.23.310 portant application de la loi 47.18 portant réforme des CRI et création des commissions régionales unifiées d'investissement, qui place les CRI sous la tutelle du Chef du gouvernement. Cette décision intervient dans le sillage des Hautes Instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui, dans Son discours au Parlement à l'occasion de l'ouverture de la 1ère session de la 2ème année législative de la 11ème législature, a appelé les CRI à "superviser l'intégralité du processus d'investissement et à en accroître l'efficience". Elle vient également consolider les efforts entrepris par le gouvernement pour unifier la gouvernance de l'investissement et s'inscrit dans la continuité de la réforme d'ores et déjà initiée par la loi 47.18 qui a permis de transformer les CRI, d'uniformiser le cadre de prise de décision lié à l'investissement au niveau régional, de simplifier les procédures et d'améliorer les délais de traitement des dossiers. Cette réunion marque ainsi le lancement du nouveau palier de la réforme des CRI. Lors de cette rencontre, l'accent a été mis sur l'atteinte des objectifs fixés par Sa Majesté le Roi et la nécessité de travailler de concert avec toutes les parties concernées, aussi bien au niveau central que territorial.