HydroJeel . 30 M€ du Fonds allemand PtX pour accélérer l'hydrogène vert au Maroc    GIES 2025 : Le Maroc bien positionné pour réussir sa transition énergétique    Tourisme : Alliance stratégique entre l'ONMT et Welcome Travel Group    CAN-2025 : Yalla, l'application qui facilitera le séjour des supporters    Visite d'une délégation militaire de l'Ecole de Commandement et d'Etat-Major du Rwanda à la Direction de l'Histoire Militaire des Forces Armées Royales : Renforcer la coopération militaire entre le Maroc et les pays africains    La Journée mondiale de la radio : un moment marquant pour la radiodiffusion nationale marocaine et son long parcours    Le Maroc, pilier de la stabilité sahélienne selon le Royal United Services Institute    Xi Jinping appelle à promouvoir le redressement global du Nord-Est de la Chine    Emploi : L'exécutif dévoile son plan à 14 milliards de dirhams pour relever le défi du chômage    La RSB, l'AS FAR et le Raja de Casablanca parmi les 20 meilleurs clubs d'Afrique    Visa et Bank Of Africa renforcent leur alliance pour accélérer la digitalisation des paiements au Maroc    Douanes commerciales à Sebta : "Plus de retour en arrière", espère Albares    Rugby à VII : Le Maroc participe à la 10è édition du championnat arabe à Alexandrie    LDC : Un Marocain désigné MVP du barrage ''Bruges-Atalanta'' !    CAN U20 Côte d'Ivoire 25: Les Lionceaux dans un groupe difficile    Morocco's DGST assists Spanish Civil Guard in seizing two tons of hashish    Al Aoula : Une programmation spéciale ramadan pour tous les goûts    Droits de douane américains : une compagnie sidérurgique argentine renvoie 1.000 travailleurs    Casablanca à l'heure du Morocco Franchise Exhibition 2025    Maroc : L'Espagne approuve un prêt de 7,8 MMDH pour l'achat de trains    Interview avec Fatima Zibouh : " Un véritable leader, c'est celui qui met sa personne au service des causes qui l'animent "    Jeddah : Bensaid souligne le rôle de SM le Roi dans le soutien constant à la cause palestinienne    Tenerife : saisie de plus de 2 tonnes de hachich grâce à des informations de la DGST    Allemagne : Au moins 20 blessés après qu'un véhicule a percuté un groupe de personnes à Munich    Tenerife-Espagne. Saisie de 2.000 kilos de haschisch grâce à la DGST marocaine    Moncef Belkhayat expands in real estate: H&S Invest Holding acquires 25% of GIDNA    Albares celebrates Ceuta customs opening in Spain-Morocco trade    Morocco eyes Australian sheep imports to replenish livestock amid drought    Détection en Méditerranée d'un neutrino d'ultra-haute énergie, une première mondiale    Constitution d'une commission franco-sénégalaise pour organiser la fermeture des bases françaises    Renforcement de la coopération culturelle entre Casablanca et Shanghai : Rencontre avec une délégation du Musée des Arts de Chine    La commune de Salé dévoile son programme culturel pour l'année 2025    ICESCO : 15 % des sites historiques dans le monde islamique exposés au danger    À Djeddah, Mohamed Mehdi Bensaïd réaffirme l'engagement marocain en faveur de la cause palestinienne et du patrimoine islamique    Bourse de Casablanca : ouverture en hausse    Addis-Abeba. Le Maroc prend part à la 46ème session ordinaire du Conseil exécutif de l'UA    L'Afrique évince l'Algérie... Une chute retentissante au sein de l'Union africaine : comment ce pays est-il devenu un paria diplomatique ?    Trump et Poutine s'accordent à entamer "immédiatement" des pourparlers de paix sur l'Ukraine    Les températures attendues ce jeudi 13 février 2025    Les prévisions du jeudi 13 février    CAN U17. Le tirage au sort de la phase finale, aujourd'hui au Caire    Fouzi Lekjaa exprime ses ambitions pour l'arbitrage marocain sur la scène internationale    Préparations. CAN U17 Maroc 25: Les Lionceaux vainqueurs des Ouzbeks    Palestine : Selon des médias israéliens, il n'y a aucune chance de succès pour le plan de Trump    Aviation civile: le Maroc choisi pour accueillir le GISS 2026    Ramadan 2025 : 2M dévoile sa grille de programmes    Essaouira: "Nos spiritualités en partage : entre éthique et esthétique", thème du 3e Festival International "L'Âme des Cultures"    Faso Music Awards 2025. L'industrie musicale africaine à l'honneur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



RDV de "L'Opinion" avec Hassan Aourid, auteur de « LMoutchou » : Immersion dans le marasme du monde arabe
Publié dans L'opinion le 22 - 02 - 2023

Hassan Aourid, auteur de « LMoutchou », décortique l'état de mort cérébrale du monde arabe, toujours incapable de se sortir de son marasme. Désillusion, vacuité intellectuelle, Israël, place du Maroc dans le monde arabe, le romancier ose les questions sensibles. Entretien.
-Pourquoi avoir choisi « LMoutchou » comme titre ?
- Je reconnais que j'ai beaucoup hésité avant de choisir le titre du roman. L'Moutchou est un nom souvent employé pour désigner les jeunes gens. Pour appréhender le roman, il est préférable que le lecteur connaisse, ne serait-ce que la culture marocaine et ses spécificités. Il ne faut pas confondre le héros du roman avec le journaliste Sliman Raissouni, comme l'ont cru certains.
- À lire le roman, on comprend que le monde arabe a manqué son rendez-vous avec l'Histoire. Pourquoi ?
- J'ai fait allusion à l'un des livres précieux de Jean Lacouture, intitulé « Un siècle pour rien ». En réalité, le monde arabe a été porteur d'espoir, après l'émancipation de la tutelle coloniale. Après la conférence de Bandung des non-alignés, le monde arabe a été perçu comme une surpuissance culturelle aux côtés de la Chine et l'Inde. Mais, il a raté son rendez-vous avec l'Histoire pour plusieurs raisons. De mon point de vue, le monde arabe n'a toujours pas réglé plusieurs problèmes culturels, dont la nature du système politique, la répartition de la richesse, son rapport à la modernité, etc... Mais il est difficile de comprendre les échecs du passé sans parler du rapport des Arabes avec autrui, c'est-à-dire l'Occident. Ce n'est pas un hasard que j'ai cité le livre de Samir Kassir qui attribue les tourments et les échecs du monde arabe à « la malédiction de la géographie » et la proximité de l'Occident. Personnellement, je tends à partager cette vision.
-On a l'impression de découvrir dans le roman une idée selon laquelle l'Occident entraverait le progrès du monde arabe. Est-ce vrai ?
-On entend souvent parler d'Occident sans comprendre sa signification sachant que ce vocale a évolué. Au début, l'Occident renvoyait à la philosophie des lumières avant d'être associé à la mission civilisatrice des Européens lors des conquêtes coloniales des peuples jugés inférieurs. Ensuite, l'Occident s'est érigé en opposition au fascisme et au communisme avant de s'affirmer dans un rapport antagoniste au radicalisme islamique.
A mon sens, il faut distinguer l'Occident de certaines politiques menées par les pays occidentaux à l'égard du monde arabe. En fait, le concept même du monde arabe est le produit des Occidentaux qui, ne l'oublions pas, ont façonné la géographie du monde arabe par le découpage colonial. La naissance de ce qu'on appelle « le monde arabe » s'est faite en deux étapes. La première coïncide avec « le British moment »(l'époque de la superpuissance britannique) qui a donné naissance au Moyen Orient avec le contrôle du pétrole, la promesse de Balfour qui a donné lieu à la création de l'Etat d'Israël et l'échec de l'unité du Royaume arabe uni. Puis le « british moment » a cédé la place à la « pax Americana », c'est-à-dire l'avènement de la domination américaine du monde. Il y a eu un changement de décor mais la recette est restée la même : soutien indéfectible à Israël, mainmise sur le pétrole et empêchement de tout projet d'unité arabe. Tout cela pour dire qu'il est impossible de penser notre propre situation sans s'intéresser à l'autre, et notamment l'Occident avec, évidemment, un esprit critique. C'est une partie de l'équation.
-Dans le roman, nous rencontrons le personnage de « Bennis », en état de mort cérébrale. Vous comparez son cas à l'état actuel du monde arabe. Pourquoi une telle analogie ?
- J'ai considéré que le monde arabe est entré dans une période de coma. J'ai illustré cet état dans la détresse de Bennis qui, en perdant la notion du temps, son esprit est perdu entre le passé et le présent. C'est l'un des malheurs des sociétés arabes qui vivent également cet enchevêtrement des époques. Au sein même de nos sociétés, on trouve des gens qui vivent pleinement la modernité et se sentent épanouis dans la mondialisation tandis que d'autres demeurent relégués aux moyens âges. Ce décalage temporel est, à mes yeux, une des causes de ce malaise. Nous ne saurions atteindre la modernité sans que toutes les classes sociales vivent dans la même époque. Il ne faut plus se contenter de cette « modernité abrégée » et limitée à une partie de la population.
- Compte tenu de cette désillusion, l'idée de la « Oumma » a-t-elle encore un avenir ou s'agit-il d'une chimère ?
- Il est difficile d'avoir une réponse. Le monde arabe n'est pas un bloc soudé comme on aurait tendance à le croire. Il y a des différences ethniques, culturelles et religieuses. Cependant, le monde arabe a des problématiques communes, dont la question du pouvoir, sachant que les Etats ne sont pas encore hissés à la hauteur d'un contrat social clair. Sur le plan culturel, personne ne peut nier qu'on traverse une période de vacuité intellectuelle puisque l'arabe n'est toujours pas une langue de pensée et de savoir.
- Revenons au Maroc, on le présente souvent, vu son Histoire, comme un cas exceptionnel, un pays plus indépendant culturellement de l'Orient arabe. Etes-vous d'accord ?
- Je le pense effectivement. Je me rappelle que le journaliste Omar Saghi avait dit, un jour, que le Maroc est pour le monde arabe ce que la Grande Bretagne est à l'Europe. Il ne fait aucun doute qu'il y a une spécificité marocaine liée à l'Histoire et à la géographie.
Certes, nous avons des racines africaines, et nous regardons vers l'Europe. Or, il est incontestable que le Maroc demeure sensible à ce qui vient de l'Orient. L'Histoire contemporaine le montre, le Maroc a été imprégné par le nationalisme arabe et puis par la vague islamiste. Ce qu'on appelle « Printemps arabe » a eu aussi des répercussions au Maroc. Cela dit, nous sommes un morceau du monde arabe tout en ayant notre propre spécificité.
-Est-ce vrai que nous sommes une île encerclée, comme l'a dit un historien ?
- Cette idée émane d'André Charles Julien et a été reprise au Maroc. Lorsqu'on y croit, on renonce systématiquement à toute appartenance au Maghreb. Historiquement parlant, cette région est unie par la langue, une religion et une texture sociale et tribale quasi-identique. Je reconnais que le contexte politique tendu et la fermeture des frontières compliquent les choses. La discorde politique ne doit, pourtant, pas nous aveugler de voir la réalité avec un regard objectif. Nous avons une Histoire commune où le Maroc a toujours occupé une place centrale et n'a jamais été une périphérie.
- La question de la communauté juive marocaine et le rapport avec Israël sont évoqués dans le roman. On parle souvent de normalisation. Etes-vous d'accord avec ce terme ?
- Personnellement, je suis réticent à utiliser ce terme comme je n'emploie pas les autres qualificatifs telles que trahison, résignation, etc... J'essaye d'observer objectivement de qui s'est passé. Dans mon roman, LMoutchou a été au début indécis mais il est parvenu à la fin de l'Histoire, à trancher. C'est un sujet qu'il convient de traiter avec lucidité et flegme sans céder à l'émotion.
- Le roman critique la vacuité intellectuelle. Quel est le rôle des penseurs pour faire revivre la pensée et l'esprit critique dans nos pays ?
- Soyons honnêtes envers nous-mêmes. Il vaut mieux reconnaître ce constat plutôt que de continuer de se bercer d'illusions. Il est évident que le monde arabe ne produit pas de pensée au vrai sens du terme. On aura toujours besoin d'intellectuels parce qu'ils façonnent l'opinion en donnant un sens à la réalité. Il faut d'abord comprendre la réalité avec des instruments scientifiques. Autrement, on ne sera que des bibelots d'inanité sonore, comme l'a dit Jean Paul Sartre.

Encadré
LMoutchou : le plus audacieux des romans de Hassan Aourid
Ecrivain prolifique, Hassan Aourid vient de publier son dernier roman, « LMoutchou », un livre dans lequel il parle du marasme arabe à travers des personnages divers, dont Amir El Couhen, journaliste et militant du mouvement 20 février qui vit dans l'ombre de ses désillusions, et dont il porte les tourments. Le roman parle du monde arabe, son marasme et ses désillusions à travers Bennis qui fut témoin de ses échecs historiques. C'est un roman d'actualité vu qu'il aborde objectivement l'épineuse question d'Israël qui partage les Marocains entre partisans et détracteurs. Un débat qui doit être mené avec discernement et objectivité, loin des préjugés et de « l'adolescence intellectuelle ».
Avec un style inédit, Hassan Aourid fait entrer la darija et signe l'un de ses romans les plus audacieux, marquant ainsi une rupture avec ses œuvres précédentes. En gros, le roman traite de la crise existentielle qui traverse les pays arabes, le Maroc n'y échappe pas. Une crise qui n'est pas forcément négative pourvu qu'il y ait une prise de conscience collective.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.