L'Agence britannique « UK Export Finance » a lancé un programme d'investissement dans des projets communs au Maroc. Une façon de booster le commerce et ouvrir la porte du marché marocain aux exportateurs britanniques. Détails. « La soirée ne fait que commencer, je vous laisse échanger aves les responsables du programme, soyez exigeants avec eux », c'est ainsi que l'ambassadeur du Royaume Uni, Simon Martin, a terminé avec humour son mot d'accueil lors de la cérémonie de lancement du nouveau programme de financement des projets de « l'UK Export Finance ». Le représentant de Londres a réuni un ensemble d'hommes affaires, financiers marocains et britanniques, chefs d'entreprises, pour discuter des perspectives des projets communs. Des projets qui bénéficieront désormais de l'appui financier de l'agence emblématique britannique ayant plus de 100 ans d'existence, qui a annoncé, mardi, un grand programme de financement destiné au Maroc. «C'est une excellente nouvelle que UKEF ait maintenant une ressource dédiée ici au Maroc. Le défi consiste maintenant pour les entreprises marocaines à faire avancer leurs projets. Avec le soutien de UKEF, nous pourrons assister à une nouvelle vague d'investissements dans les infrastructures marocaines, les énergies renouvelables et d'autres secteurs. Je suis impatient de voir comment cela va se développer et je me réjouis de voir notre partenariat avec le Maroc continuer à se développer», a poursuivi l'ambassadeur. « Les entreprises britanniques ont la possibilité de faire plus d'affaires avec le Maroc - un pays qui cherche à offrir un avenir plus durable - et nous sommes impatients de soutenir les projets dans la région », a indiqué, de son côté, le directeur général par intérim de l'UKEF, Samir Parkash. 4 milliards de livres sterling L'agence de crédit a mis sur la table quatre milliards de livres sterling, soit 51 MMDH pour financer des projets communs au Maroc. « Il s'agit de crédits garantis par l'Etat britannique, un rôle qui incombe à l'agence », nous explique Meriem Bennani, la représentante de l'UK Export Finance au Royaume, ajoutant que ce programme vise aussi bien les crédits directs. Notre interlocutrice est revenue sur les mécanismes de financement (voir les trois questions). En somme, ce programme ressemble aux plans de soutien à l'entrepreneuriat comme Intelaka. Ce qui est différent, dans ce cas, c'est l'origine des pourvoyeurs des crédits et la partie qui apporte la garantie (le gouvernement britannique). En effet, comme le programme intervient via les banques, l'Agence de crédit à l'exportation parie sur les banques internationales. « Nous sommes dans une logique de co-financement, d'où l'importance de partenariat avec les banques », poursuit Mme Bennani, rappelant que l'UK Export Finance collabore avec plusieurs groupes bancaires, dont Crédit Suisse, Banco Santander, Standard Chartered, ainsi que d'autres banques internationales. Quid des banques marocaines ? Si le financement provient des banques internationales, cela ne veut pas dire que les banques marocaines sont exclues du programme. Le champ leur est également ouvert, insiste Mme Bennani, qui rappelle que les discussions sont en cours avec plusieurs groupes nanciers marocains afin d'examiner les perspectives d'une coopération future. « La balle est chez eux et on espère travailler ensemble le plus tôt possible », a-t-elle conclu avec optimisme. Par ailleurs, il ne faut pas confondre ce programme avec les projets d'aide au développement. Il s'agit purement de business. L'agence anglaise aspire à travers cette initiative à encourager ses exportateurs à pénétrer davantage le marché marocain en investissant dans des projets communs avec les entreprises marocaines. Force est de rappeler que le financement veut donner aux entreprises marocaines accès au soutien pour réaliser des projets, à condition qu'au moins 20% de la valeur totale du contrat proviennent de fournisseurs britanniques. Ceci dit, l'Agence escompte un effet positif ou plutôt un retour sur investissement au profit des entreprises britanniques. Un nouveau coup de pouce au commerce bilatéral La Grande Bretagne, rappelons-le, n'a eu de cesse de lorgner le marché marocain depuis la n du Brexit. Raison pour laquelle Londres a signé l'accord d'association en 2019 avec Rabat dans la volonté de chercher des débouchés commerciaux alternatifs en Afrique. En plus du commerce des produits agricoles, le secteur des énergies renouvelables est parmi les secteurs les plus prisés par les Britanniques qui préfèrent plutôt parler de « Green Finance ». Lors de sa récente visite au Maroc, Lord Tarik Ahmad, ministre d'Etat chargé des relations avec l'Asie du Sud, l'Afrique du Nord, les Nations Unies et le Commonwealth, est venu porteur d'une feuille de route pour accélérer la coopération entre les deux pays dans ce domaine en y augmentant les investissements. Le programme de crédit dont on parle s'inscrit dans ce cadre puisque l'offre de crédit concerne également les énergies renouvelables. C'est ce que nous indique Tim Reid, membre du Comité exécutif de l'Agence « UK Export Finance (Voir trois questions). Les deux pays ont d'ores et déjà commencé à coopérer puisque chacun veut tirer profit du potentiel de l'autre dans un sens de complémentarité. En témoigne l'avancement du projet Xlinks en vertu duquel le Maroc devrait fournir de l'électricité au Royaume-Uni via le plus long câble électrique au monde. La société britannique, rappelons-le, a lancé, le 21 novembre, un appel à contribution pour le projet. Bien que le projet ne soit que dans une phase embryonnaire, les chances pour qu'il aboutisse sont plus ou moins fortes pour autant que le Maroc a préparé un grand terrain de 150.000 hectares dans la région de Guelmim-Oued Noun pour la société britannique afin d'y installer des centrales solaires. Le grand défi réside dans le financement puisque l'enveloppe nécessaire à ce projet gigantesque est énorme. L'UK Export Finance y participera-t-elle ? L'avenir nous le dira. Maintenant, le projet ne fait que commencer. Anass MACHLOUKH L'info...Graphie UK Export Finance L'Agence s'implante au Maroc
Désormais, l'agence veut mettre les mains et les pieds au Maroc où elle a nommé un nouveau responsable de financement des exportations internationales à Casablanca. « Cette nomination est le dernier développement en date de la volonté de UKEF d'étendre son réseau mondial et de générer de nouvelles affaires pour UKEF et les entreprises britanniques », explique le communiqué publié à l'issue de la cérémonie de lancement. En effet, l'agence compte actuellement 18 cadres en place dans les Amériques, en Asie du Sud, en Asie-Pacifique et en Afrique. Il est prévu de porter ce nombre à environ 30 au cours de l'année prochaine, précise la même source. Ces derniers travaillent en étroite collaboration avec les entreprises étrangères, les prêteurs financiers, les délégués commerciaux de Sa Majesté et les ambassadeurs britanniques afin de nouer le dialogue avec les gouvernements étrangers et les multinationales qui cherchent à acheter au Royaume-Uni, créant ainsi des opportunités commerciales vitales pour les entreprises britanniques. Rappelons que l'agence de crédit à l'exportation du Royaume-Uni est un département gouvernemental qui travaille aux côtés du ministère du Commerce international comme partie intégrante de sa stratégie et de ses opérations. Créée en 1919, elle a pour mission de veiller à ce qu'aucune exportation britannique viable n'échoue en raison d'un manque de financement par le marché privé. Elle fournit des financements et des assurances pour aider les exportateurs à remporter, exécuter et être payés pour des contrats d'exportation.
Trois questions à Tim Reid « L'objectif est de parvenir à des projets communs »
Tim Reid, membre du Comité exécutif de l'Agence « UK Export Finance », a répondu à nos questions sur le nouveau programme qui vient d'être lancé au Maroc. - Comment le Maroc pourrait-il tirer profit des programmes de financements ? - D'abord, permettez-moi de préciser qu'à travers ce programme, nous envisageons d'installer une présence permanente de notre agence, sachant que nous avons désormais un représentant au Maroc. L'idée derrière cette initiative est simple, il s'agit d'élaborer des mécanismes de financement dédiés à des projets qu'ils soient publics, privés ou mixtes. Nos ambitions sont grandes et nous ciblons aussi bien les petits que les projets de grande envergure. Raison pour laquelle nous avons mobilisé quatre milliards de livres. L'objectif est de parvenir à des projets communs entre les opérateurs marocains et britanniques sur le sol marocain. - Quels sont les secteurs prioritairement visés ? - Je rappelle que notre programme est ouvert à tous les secteurs, mais il y en a ceux sur lesquels nous mettons plus de lumière, vu que nous y avons plus d'expérience et plus d'expertise. J'en cite les infrastructures, le transport ferroviaire, l'infrastructure aéroportuaire et surtout les énergies renouvelables qui constituent, à nos yeux, l'un des secteurs florissants où le Maroc dispose d'un grand potentiel. A cet égard, les entreprises britanniques peuvent apporter leurs expertises pour développer ce secteur au Maroc dans le cadre des projets communs. - Vous avez mentionné avant notre interview que vous cibliez également les investissements dans le secteur de l'eau, peut-on avoir plus de détails ? - Nous y avons songé parce que nous constatons que le Maroc se dirige vers un nouveau modèle de gestion des ressources hydriques en cherchant des sources alternatives, à savoir le dessalement et le développement du traitement des eaux usées. De notre point de vue, nous estimons qu'il y a des opportunités à saisir pour les investissements à court et moyen termes. Recueillis par A. M.
Trois questions à Meriem Bennani « Les crédits prévoient des maturités de 8 à 18 ans »
Meriem Bennani, représentante d'UK Export Finance au Maroc a répondu à nos questions sur les mécanismes de financement. - Pouvez-vous nous détailler les mécanismes de financement prévus par le programme ? - Pour faire simple, nous avons deux principaux produits principaux. Le premier est le « Buyer Credit », autrement dit crédit acheteur. Il s'agit d'un crédit garanti octroyé à une banque engagée dans le financement d'un projet approuvé par le programme. Par cette garantie, la banque concernée se voit libérée du risque de non recouvrement puisqu'il incombe à l'Etat britannique de le supporter. En résumé, c'est le gouvernement britannique qui garantit les crédits octroyés dans le cadre du programme. - Quid du deuxième mécanisme? -On l'appelle le « Direct Lending », c'est-à-dire des financements directs à destination des projets de développement. Ce mécanisme consiste à financer ou co-financer directement les projets bénéficiaires, et ce, en collaboration avec les banques partenaires. Les crédits envisagés dans ce cadre prévoient des maturités à moyen ou à long terme. Elles varient entre 8 et 10 ans et peuvent aller jusqu'à 18 ans lorsqu'il s'agit de projets de développement durable. - Dans quelle mesure ce programme va-t-il pouvoir stimuler les échanges commerciaux ? - Je pense que l'accord d'association entre les deux pays a certes mis en place une base propice au développement des échanges grâce aux nouveaux tarifs préférentiels. Il s'agit donc, à nos yeux, d'un terrain fertile pour le progrès du commerce. Il faut garder en tête que la performance du commerce bilatéral reste solide malgré les effets de la pandémie. Nous avons une reprise des échanges à un niveau supérieur que celui constaté avant la Covid-19. Recueillis par A. M.