Trois attaques, attribuées à des « terroristes », ont tué au moins quinze soldats et trois civils mercredi, à Kalumba, Sokolo et Mopti. Le Mali continue de s'enfoncer dans la violence. Au moins dix-huit personnes, dont quinze soldats maliens et trois civils, ont été tuées, mercredi 27 juillet, dans trois attaques coordonnées et attribuées à des « terroristes », ce qui porte à onze leur nombre en moins d'une semaine dans le pays. À Kalumba, près de la frontière mauritanienne, « le bilan côté ami est de douze morts, dont trois civils, d'une entreprise de construction de route », selon un communiqué signé par le colonel Souleymane Dembélé, directeur de l'Information et des Relations publiques de l'Armée. À Sokolo, dans le centre, l'armée fait état de 6 militaires morts et 25 blessés, dont cinq graves. L'armée affirme avoir tué 48 assaillants et « neutralisé trois Pick-up terroristes à 15 kilomètres de Sokolo avec des occupants estimés à une quinzaine de combattants et leurs équipements », est-il écrit. Une troisième attaque s'est déroulée dans la nuit à Mopti (centre), sans faire de victime, selon la même source. L'armée affirme avoir « mis en déroute » les assaillants. Ces attaques interviennent cinq jours après celle de Kati, au cœur de l'appareil militaire malien, revendiquée par les jihadistes de la Katiba Macina, affiliée à Al-Qaïda. Cette attaque suicide commise avec deux camions piégés avait tué un soldat malien et fait six blessés, dont un civil. La veille, une série de raids quasi-simultanés attribués à des jihadistes avaient frappé six localités différentes du Mali, dans les régions de Koulikoro (proche de Bamako) ainsi que de Ségou et Mopti (centre). Accrochages avec les terroristes
Dimanche, une nouvelle attaque, « déjouée » selon l'Armée malienne, avait aussi frappé le camp de la Garde nationale de Sévaré. C'est la première fois depuis 2012 que des attaques aussi coordonnées se déroulent en si grand nombre, dont certaines proches de la capitale. Le Mali, pays enclavé au cœur du Sahel, a été le théâtre de deux coups d'Etat militaires en août 2020 et en mai 2021. La crise politique va de pair avec une grave crise sécuritaire en cours depuis le déclenchement, en 2012, d'insurrections indépendantistes et d'actions jihadistes sanglantes dans le Nord. Malgré une situation sécuritaire très dégradée, la junte s'est détournée de la France et de ses partenaires, préférant s'en remettre à la Russie pour tenter d'endiguer la propagation jihadiste. Dans le centre du Mali, les combats sont âpres entre les fantassins estampillés Groupe de soutien à l'Islam et aux musulmans (GSIM, JNIM en arabe), affilié à Al-Qaïda, et les forces du régime assistées des supplétifs du groupe de sécurité privé russe Wagner. Les civils, pris en tenaille, paient le prix fort.
L'armée, qui annonce chaque semaine des bilans humains aussi importants qu'invérifiables à ses opérations, a plusieurs fois annoncé que le groupe jihadiste était "aux abois". Le Mali en zone rouge
Dans le communiqué de mercredi, elle parle "d'actions désespérées des terroristes qui visent manifestement à faire des coups médiatiques pour masquer les pertes considérables qu'ils subissent depuis plusieurs mois". Mais la tension monte dans tout le pays. Mardi, le ministre des Affaires religieuses, des cultes et des coutumes a invité l'ensemble des confessions et associations religieuses à "des séances de prières et de bénédictions pour la paix et la stabilité au Mali". Mercredi, le gouverneur de la région de Douentza (centre) a interdit la circulation des véhicules de 18 heures à 7 heures du matin dans la ville de Douentza. En fin de semaine dernière, la direction de l'Aéroport du Mali avait annoncé un "renforcement des mesures de contrôle au niveau des check-point d'accès" à l'aéroport de Bamako, et "exhorté les usagers à réduire leur déplacement sur les lieux, sauf en cas de nécessité". Et la tension s'étend au-delà des frontières du Mali. Mercredi, le ministère des Affaires étrangères français a passé tout le territoire malien en "zone rouge", c'est-à-dire formellement déconseillée aux voyageurs, en raison du "risque d'attentats et d'enlèvement". Seule la capitale Bamako reste en zone orange, c'est-à-dire déconseillée sauf raison impérative.
La visite de Jean-Pierre Lacroix, chef des missions de maintien de la paix de l'ONU au Mali se poursuit. Il a eu un important entretien, mardi 26 juillet, avec le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop. Les deux personnalités ont abordé entre autres sujets le dernier renouvellement du mandat de la mission de l'ONU au Mali. Sur ce sujet comme sur d'autres, l'heure semble être à l'apaisement. L'ambiance de travail entre les deux délégations est jusque-là sans tension. Le chef des missions de maintien de la paix de l'ONU estime même que sur le dernier renouvellement du mandat de la Minusma, qui a fait grincer les dents à Bamako, il y a désormais des convergences de vue. « Les choses finalement convergent bien, car d'un côté, on a une dynamique positive et, de l'autre, nous avons ce travail que nous allons faire totalement en commun et nous en avons parlé longuement avec le ministre Abdoulaye Diop », a dit Jean-Pierre Lacroix, le chef des missions de maintien de la paix de l'ONU. Prenant à son tour la parole lors d'une conférence de presse commune, le ministre malien des Affaires étrangères a voulu rassurer son hôte. « Le Mali souhaite continuer à travailler avec les Nations Unies, a déclaré Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères. Ce que le Mali a souhaité, c'est que le travail puisse se faire dans le respect de la souveraineté du Mali ». Le dialogue avec l'ONU sera permanent, a ajouté le chef de la diplomatie malienne, qui joue également à l'apaisement sur un autre sujet, celui des 49 militaires ivoiriens arrêtés à Bamako, il y a environ deux semaines.