Contrairement aux coutumes séculaires et conformément aux habitudes acquises lors des deux derniers Ramadans marqués par un confinement nocturne, la première soirée après-ftour de cette année s'est annoncée décevante. Détails de la Marina Bouregreg. Rues presque vides, mosquées moins fréquentées que d'habitude et les cafés, notamment des quartiers populaires, n'ont sauvé la mise qu'à travers la succession de deux matchs de football abondamment suivis à Salé, à savoir le FC Barcelone contre le FC Séville avec le chouchou de tous les Marocains Yassine Bounou, et juste après le match du Raja contre l'ES Sétif qui a connu la victoire des Aigles verts sur leurs adversaires algériens. Certes, l'ambiance générale dans la rue ne fut pas identique à celle qui régnait pendant les deux Ramadans précédents, mais elle ne ressemble point à ce qu'on vivait dans l'ère pré- Covid. A la Marina Bouregreg de Salé, la situation n'était pas très différente. Les foules qui ont pris l'habitude de s'y retrouver ont cette année manqué leur rendez- vous. Les quelques couples à gauche et à droite et petits groupes d'amis ont remplacé les affluences de personnes qui trouvaient du mal à trouver une table vide, les simples boissons chaudes ont remplacé les menus burgers ou crêpes et la contemplation du Bouregreg s'est montrée privilégiée par grand nombre de personnes qui se sont quand même rendues à la Marina sans pour autant y dépenser de l'argent. En fait, la Marina de Salé ne fait pas l'exception et le constat peut être généralisé sur l'ensemble du territoire national. Est-ce une habitude que les Marocains ont prise après deux années de hauts et de bas en matière de confinement et pratiquement deux mois de Ramadan sans plans après-ftour ? Certainement, la première édition ''confinée'' du mois sacré fut délicate, voire insupportable. La deuxième édition de l'année 2021 a connu une adaptation d'un grand nombre de Marocains qui ont fini pas accepter la situation et céder à la réalité des choses. Que ce soit un comportement ancré dans la conscience collective des Marocains, une mauvaise ou bonne habitude imposée par l'état d'urgence, ou un phénomène dont les raisons sont pour l'instant inconnues, le premier jour du mois de Ramadan a montré une autre facette d'un après-ftour, semblable à la version sous la contrainte du couvre-feu. Revenons à la Marina Bouregreg, cette considérable baisse d'activité avec ce faible nombre de clients est susceptible d'être due aux tarifs qui y sont proposés, surtout si l'on tient compte de la crise actuelle relative principalement à la hausse des prix. Bien que le constat d'une activité plus faible que la coutume soit transversal sur tous les cafés et restaurants de Salé, il est à souligner qu'actuellement, le caractère 'popularité, lié souvent à 'prix moins cher', attire plus de clients. Les cafés de la Marina sont connus pour des prix plus ou moins supérieurs par rapport à la moyenne. A cet égard, Mounir Slimi, serveur à la Marina, nous a déclaré que « durant cette soirée du mois de Ramadan et bien même avant, nos clients sont de moins en moins nombreux, ce qu'ils commandent à boire a considérablement changé et la plupart d'entre eux ne prennent plus de repas à la Marina. Même en donnant des pourboires, il a été constaté, par moi-même et grand nombre de mes collègues, que les clients sont devenus beaucoup moins généreux que pendant la période pré-Corona ». S'agissant des éventuelles raisons derrière cette nouvelle situation, notre interlocuteur a souligné qu' « en ce qui concerne le nombre de visiteurs quotidiens qui a terriblement baissé, ceci est dû aux retombées de la crise sanitaire relative au Covid-19, laquelle continue toujours à affecter le quotidien des Marocains, même dans ses plus petits détails. Cette baisse que connaît le nombre de clients a considérablement pris un autre tournant ces dernières semaines qui ont été marquées par une énorme hausse du prix du carburant. Comme vous le savez, la Marina de Salé est un endroit visité régulièrement par des personnes qui n'habitent pas forcément Salé ou même Rabat. On y arrive de Kénitra, de Témara, de Mohammedia, de Casablanca et même de villes moins proches. Plusieurs personnes ont décidé après cette augmentation des tarifs du carburant de renoncer aux déplacements par voiture, surtout pour la plaisance ». La crise financière qui plane sur le pouvoir d'achat depuis le déclenchement de la pandémie et qui s'est accentuée récemment avec la flambée de prix, s'est tout d'abord clairement manifestée dans les achats des Marocains pour accueillir le mois de Ramadan, des courses où grand nombre de personnes se sont contentées de l'essentiel et renoncé ainsi aux ''plaisirs gastronomiques'' vu la hausse qu'ont connue les prix de toutes ces nourritures due à la flambée de prix de matières premières. Cette crise s'est transmise aux cafés et restaurants, bien que ces derniers, surtout ceux des ''moyenne'' et ''haute'' gammes aient tenu à ne pas changer leurs tarifs malgré la hausse des prix - vu qu'ils assuraient une marge de gain assez confortable -, n'ont pas pu empêcher leurs clients ''fidèles'' d'aller chercher ailleurs, optant pour le peu coûteux. A cet égard, le gérant d'un café-restaurant à la Marina Bouregreg, qui a préféré garder l'anonymat, nous a fait savoir qu'« à quelques dizaines de minutes de la fermeture de nos portes, la recette journalière du café pour ce premier jour du mois sacré ne dépasse pas les 30% de ce que nous gagnions avant la pandémie », ajoutant que « généralement, l'activité connaît un rythme croissant au fur et à mesure. Le premier jour de Ramadan est une partie transitoire entre un rythme quotidien ''normal'' et un système ramadanesque nocturne par excellence ». Notre interlocuteur s'est montré optimiste quant à l'amélioration de la situation et le retour des clients sur les bancs de ses tables. Il a ainsi espéré que « cette abstinence des Marocains, notamment des Slaouis et Rbatis, est due au fait que le premier jour du mois de Ramadan coïncide avec un dimanche. Les gens travaillent le lendemain et donc ils ont opté pour ne pas quitter la maison tard le soir. Les choses changeront au cours de la semaine et nous pourrons récupérer nos clients ». Achraf EL OUAD