A l'issue de deux ans d'implémentation, le programme « Améliorer l'accès aux droits des réfugiés en Afrique du Nord – Maroc » fait le point sur les réalisations et les défis actuels lors de sa cérémonie de clôture. C'est lors de la cérémonie de clôture du programme intitulé « Améliorer l'accès aux droits des réfugiés en Afrique du Nord – Maroc », organisée mardi à Rabat, que la Délégation de l'Union Européenne (DUE) et l'Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) se sont félicitées de la réussite de leur programme visant à améliorer l'accès aux droits des migrants, des demandeurs d'asile et des réfugiés au Maroc. Le Maroc, pays d'accueil de réfugiés Le Maroc abrite plus de 17.000 demandeurs d'asile et de réfugiés. A cet effet, le représentant de l'UNHCR au Maroc, François Reybet-Degat, a affirmé que le Maroc est un pays référence en la matière, grâce au cadre législatif pertinent mis au point dans ce domaine et aux multiples initiatives visant la protection de cette catégorie et la facilitation de son accès aux services publics, notamment l'éducation. Pendant deux ans, les réfugiés et les migrants qui ont formulé le souhait d'être aidés, ou recensés via les associations partenaires, ont reçu de l'aide à plusieurs niveaux, dont ceux de l'éducation, des soins de santé, notamment mentale, ainsi que des aides financières, pour leur permettre de mieux s'intégrer dans la société marocaine et de ne pas se sentir marginalisés. Porté par le HCR et cofinancé par l'Union Européenne, ce projet a été soutenu par un partenariat avec plusieurs acteurs de la société civile, notamment la Fondation Orient- Occident (FOO) et l'Association Marocaine de la Planification Familiale (AMPF), deux associations dont le rôle a été important dans la réussite de ce programme. Pour sa part, le représentant de la Délégation de l'Union Européenne (DUE) au Maroc, Jean Christophe Filori, a assuré que le Royaume a conduit des actions louables pour accueillir les réfugiés et leurs enfants dans les meilleures conditions, leur assurer les droits fondamentaux et faciliter leur accès à l'enseignement et aux services de santé, à l'image de la campagne nationale de vaccination anti-Covid. M. Filori a affirmé que la coopération étroite entre le Maroc, l'UE et l'UNHCR se poursuivra pour la mise en oeuvre d'initiatives supplémentaires et l'instauration d'un système d'asile national. De son côté, Ahmed Skim, directeur des Affaires de la migration au ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l'étranger, a jeté la lumière sur la politique du Maroc en matière de migration et d'asile, notamment depuis 2013, ainsi que sur les principes directeurs de l'action du Royaume dans les domaines d'accueil, de régularisation et d'intégration des migrants. Soutien financier Au niveau sanitaire, le Maroc donne accès aux services de santé à tous les migrants, réfugiés et demandeurs d'asile. Dans le cadre de ce projet, 5000 consultations au niveau primaire et 7500 consultations spécialisées ont été conduites pour près de 5200 réfugiés. Ces personnes ont également fait partie de la campagne nationale de vaccination qui a commencé le 28 janvier 2021. Au-delà de l'impact sanitaire, la crise du Covid-19 a particulièrement touché les réfugiés et demandeurs d'asile sur le volet socio-économique. Ainsi, le volet de l'aide financière, qui ne faisait pas partie du projet initial 2020-2021, a été rajouté au moment où la crise sanitaire mondiale due à la Covid-19 a touché le Maroc. Il a concerné 5500 réfugiés assistés à deux reprises et 500 demandeurs d'asile assistés également à deux reprises. Les réfugiés et les migrants irréguliers ont souffert autant que les Marocains travaillant dans le circuit informel lors du confinement décrété fin mars. A cause des mesures sanitaires imposées par les autorités visant à casser le rythme des infections au Coronavirus, ces catégories de personnes s'étaient retrouvées dans des situations de précarité car privées de leur activité. Le confinement et la situation sanitaire mondiale ont également fait surgir beaucoup d'inquiétudes, de la peur et de la solitude chez les réfugiés, demandeurs d'asile et migrants, coupés du monde extérieur, de contact social, dans un nouveau pays. Le taux de réussite des élèves réfugiés frôle les 90% Puissant facteur de changement et de soutien pour permettre aux réfugiés de mener une vie productive, épanouie et indépendante, l'enseignement était l'un des axes principaux de ce programme. Ainsi, ce dernier a mis en place des cours de soutien pour 350 enfants, et a permis de faciliter l'accès à l'éducation primaire pour 740 enfants et 7400 bourses d'études ont été attribuées dans ce cadre. De leur côté, 160 enfants du secondaire ont également bénéficié de la facilitation d'accès à l'école. Par ailleurs, 200 bourses d'études ont été octroyées et 20 enfants ont été aidés dans le cadre de leur intégration dans le circuit de l'éducation non formelle, telle que les écoles de la deuxième chance. Sur deux ans, le volet de l'éducation a réussi son pari avec 90% de taux de réussite. La rencontre a été marquée par des témoignages de migrants ayant bénéficié de services publics au Maroc, à côté d'exposés sur les résultats réalisés au bénéfice des réfugiés, notamment dans l'enseignement, la santé et le soutien psychologique. Certes, ce projet de deux ans a permis de renforcer l'accès aux droits des réfugiés au Maroc, toutefois, des efforts sont encore à fournir avec pour objectif à terme l'établissement d'un système national d'asile. Hiba CHAKER
3 questions à François Reybet-Degat, représentant du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) au Maroc « 65% des demandeurs d'asile arrivent par l'Algérie »
- Le Maroc accueille plus de 17.000 demandeurs d'asile, quelles sont les routes migratoires qu'ils prennent pour venir au Maroc ? - Les réfugiés viennent principalement de Syrie (56%), du Yémen et de la République Centrafricaine, ainsi que du Sud Soudan. 65% des demandeurs d'asile arrivent du côté de l'Algérie. Ce sont des flux qui continuent, impliquant ces personnes de différentes nationalités qui suivent un parcours long, difficile, fait d'énormément de souffrances et qui pour beaucoup passe par la Libye. - Ce programme touche à sa fin aujourd'hui. Est-ce que vous estimez que les réfugiés au Maroc sont actuellement protégés et autonomisés ? - Nous nous tournons vers le futur et regardons l'année 2023, parce qu'elle consacrera le 10ème anniversaire de la Stratégie Nationale d'Immigration et d'Asile (SNIA) prônée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, ainsi que la tenue du 2ème Forum mondial pour les réfugiés, et à cet égard il y a trois aspects qui nous semblent énormément importants, à savoir : l'établissement de la loi Asile, l'amélioration de la situation de documentation pour les demandeurs d'asile et les réfugiés, qui reste un grand défi comme l'a démontré l'analyse du HCP de l'année 2020, et puis la continuité de ces efforts d'accès aux services de santé et d'éducation pour les réfugiés, d'autant plus qu'il y a la décision prise par le Maroc d'un programme de sécurité sociale universel. - Quels sont les efforts à mener pour avoir un équilibre en termes d'accueil et de gestion des réfugiés ? - Aujourd'hui, il est nécessaire d'augmenter les aides financières de la part des pays riches, mais aussi de multiplier les voies légales, comme le regroupement familial, les études... Ces voies ne doivent pas être ad vitam aeternam afin de permettre une mobilité sûre, prévisible et organisée dans la logique d'un développement durable des pays d'accueil et d'origine. Recueillis par H. CH.