La réforme du régime fiscal, actuellement en examen au parlement, prévoit l'instauration d'une taxe carbone au Maroc. Un premier pas pour se conformer aux exigences européennes. Présenté le 27 juin devant SM le Roi Mohammed VI, le projet de loi-cadre n°69-19 relatif à la réforme fiscale a entamé le circuit législatif. Celui-ci qui vise à déterminer les composantes, les principes, les objectifs et les mécanismes d'application de la réforme du système fiscal national, ainsi que d'identifier les mesures nécessaires pour accompagner sa mise en oeuvre d'une façon progressive, prévoit également l'instauration d'une taxe carbone visant à mobiliser les moyens nécessaires pour le financement des politiques publiques en matière de protection de l'environnement. Outre l'aspect écologique, cette mesure s'impose vu que l'Union Européenne, premier partenaire commercial du Royaume, s'apprête à adopter une taxe carbone post-Covid pour relancer l'économie du vieux continent. Avec plus de 70% d'exportations destinées aux 27de l'UE, le manque à gagner pour le Maroc est énorme. «L'Industrie marocaine devant se conformer aux nouvelles normes européennes, il est donc urgent de doter nos entreprises d'énergies propres », nous indique Hassan Sentissi El Idrissi, président de l'Association marocaine des exportateurs (ASMEX), précisant que la coopération entre le Maroc et l'UE dispose de tous les atouts permettant la transmission des expériences de sorte à accélérer la transition énergétique pour une économie plus durable et aussi plus compétitive. Une transition énergétique rapide s'impose Tout en précisant que le Maroc est cité en référence en matière de développement des énergies renouvelables avec « une production nationale à partir de sources renouvelables à hauteur de 42% en 2020 et à 52% à l'horizon 2030 », Hassan Sentissi estime que le processus de transition énergétique devrait être accéléré conformément aux hautes orientations Royales. Une position partagée par le Policy Center For the New South qui, dans un rapport publié lundi dernier, a souligné que « les réalisations à ce jour de la transition énergétique dans le Royaume, bien qu'importantes, doivent devenir plus ambitieuses pour soutenir le développement économique du pays et libérer le plein potentiel socio-économique d'un système énergétique efficace et durable». Le même rapport note que la transition énergétique soulève des défis supplémentaires en termes de compétitivité industrielle et d'effets distributifs. Les pays qui s'engagent dans l'industrie propre, dont le Maroc, devront se positionner sur une nouvelle chaîne de valeur technologique de production à partir d'énergies renouvelables, tout en assurant des niveaux d'investissement adéquats. A cela s'ajoute l'ombre de l'inadéquation des compétences avec ces industries et les difficultés d'intégration sur le marché du travail «si les aspects liés à l'éducation et à la formation ne sont pas traités à un stade précoce ». Par ailleurs, le président de l'ASMEX relève également les obstacles de financement auxquels pourraient être confrontées les PME. «Dans ce sens, nous avons scellé des partenariats visant à apporter des solutions technologiques et des financements pour cette catégorie d'opérateurs», indique-t-il, notant que l'ASMEX est en contact avec des organismes financiers internationaux dans le but d'accompagner les entreprises marocaines dans l'utilisation des énergies propres. Cela dit, il convient de noter que, pour l'instant, les détails techniques de l'application de cette taxe ne sont pas encore dévoilés, toutefois, le Maroc pourrait soit prélever les entreprises en aval ou à posteriori. Dans le premier scénario, la taxe carbone devrait être calculée selon l'émission de CO2 induite de la production et de la distribution du produit ou service. Un processus qui reste peu probable puisqu'il implique une comptabilité carbone assez complexe selon les experts. Il reste donc le prélèvement en amont, c'est-à-dire sur les consommations finales d'énergies fossiles. Un mode de prélèvement privilégié, dans bon nombre de pays, notamment la France, puisque les émissions de CO2 des différentes énergies fossiles sont connues. Une question qui va être tranchée dans les jours à venir.
Saâd JAFRI Choc de compétitivité Qu'en dit le nouveau modèle de développement ?
Le Nouveau Modèle de Développement préconise quatre actions pour que le Maroc devienne le pays le plus compétitif de la région en investissant dans la qualité des facteurs de production et en réalisant les réformes structurelles nécessaires pour optimiser leurs coûts. Il souligne dans ce sens l'impératif de réduire les coûts de l'énergie par la réforme du secteur et le recours aux énergies renouvelables et à bas carbone : i)La mise en place d'une nouvelle architecture institutionnelle autour d'un régulateur fort, indépendant et transparent pour l'ensemble du secteur, couvrant également le gaz naturel ; ii) La séparation du rôle des acteurs (producteurs, transporteurs, distributeurs) et la libéralisation responsable du secteur, notamment à travers l'ouverture effective de la production d'énergie verte à la concurrence ; iii) La restructuration des entreprises publiques du secteur, et notamment l'ONEE pour lui permettre d'assurer sa fonction stratégique de modernisation du réseau de transport d'électricité et d'accompagnement de la réforme du secteur ; iv) L'encouragement de la production décentralisée pour donner un accès à une électricité compétitive dans les territoires et ; v) La mise en place d'un cadre propice pour le développement de la mobilité électrique. Cette réforme structurante doit s'accompagner d'un effort à court terme pour améliorer la compétitivité de l'industrie nationale, en impactant la baisse des coûts de production déjà engagée sur les industries énergivores et en leur donnant accès à des solutions pour les approvisionner en gaz naturel afin de produire de l'énergie calorifique à bas coût. La mise en oeuvre de ces actions permettra de construire un positionnement international distinctif pour le Maroc en tant que partenaire écoresponsable compétitif et neutre en carbone.