La récente visite du pape François en Irak est sans aucun doute l'un des événements les plus importants de ces derniers mois sur le plan mondial et régional. Cette visite s'est déroulée au milieu d'un océan de craintes concernant la propagation du coronavirus et les répercussions de cette épidémie, qui a fait des millions de victimes dans le monde. Mais il y a de quoi espérer et être optimiste : les symboles universels, qui ont foi dans les valeurs humaines et civilisationnelles et qui tiennent à les inculquer et à les diffuser partout dans le monde, sont fidèles à leurs principes. De Bagdad à Mossoul, en passant par Najaf, Bakhdida et Erbil, le pape François a voulu remettre l'Irak au centre des bonnes nouvelles, au lieu de ce à quoi les gens étaient habitués depuis de nombreuses années: une scène de bombardements, de violence, d'effusion de sang et d'autres choses qui brisent le cœur. La visite est une raison pour le monde de voir une image réelle de l'Irak et des Irakiens. La joie a régné dans toute la Mésopotamie. La visite du Pontifex maximus fut une affirmation que l'Irak serait une patrie pour tous ses citoyens, à condition que les volontés soient unies et que les mains des conspirateurs iraniens soient retirées de ce grand pays. Le Pape a su transmettre son message et faire entendre sa voix au monde entier. Des millions de personnes ont déjà vu ce que la violence et la terreur ont fait à Mossoul, tout comme elles ont admiré les jeunes Irakiens qui rêvent d'un avenir meilleur dans un pays riche de son histoire parmi les civilisations. Sa rencontre avec la grande autorité chiite Ali Al Sistani reflète sa conviction de la nécessité d'un dialogue entre les religions et les sectes et constitue une véritable incarnation du concept de fraternité humaine. Sa rencontre avec des représentants de toutes les communautés irakiennes à Ur, lieu de naissance du père Abraham (Paix soit sur lui), un site historique à forte connotation humaine, fut une étape importante à plusieurs égards. Elle s'inscrit dans le cadre des efforts visant à restaurer la cohésion du peuple irakien, à donner aux dirigeants irakiens un élan significatif pour mener à bien les efforts de restauration de l'unité nationale, à jeter des ponts de solidarité humaine et à se donner la main pour rebâtir leur pays, à mettre fin aux souffrances des personnes déplacées et des migrants, et à instaurer la sécurité dans tout l'Irak. Le message du pape pour l'Irak est que la fraternité est plus durable que le combat, l'espoir « plus puissant que la haine et la paix plus puissante que la guerre. » Le message de paix auquel il croit s'est concrétisé par la signature du Document sur la Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune avec le Grand Imam Sheikh d'Al Azhar, Dr. Ahmed Al Tayeb à Abu Dhabi en février 2019, en présence de son Altesse Sheikh Mohammed bin Rashid Al Maktoum, vice-premier ministre, souverain de Dubaï, et son frère, son Altesse Sheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan, prince héritier d'Abu Dhabi, commandant en chef adjoint des forces armées. Bien que le Pape François soit également une personnalité religieuse et politique, je ne souhaite pas que cette visite historique en Irak soit chargée de dimensions politiques qui pourraient en compromettre les nobles aspects humains et civilisés. Le parcours et les positions du Pape le mettent à l'écart de toute théorie que certaines personnes pourraient invoquer dans leur analyse de la visite. Ceci est d'autant plus vrai que nous vivons dans une région imprégnée de complotisme. La visite du Pape François en Irak, début mars, est un véritable événement historique. Ce n'est pas seulement parce qu'elle est première du genre. C'est aussi parce qu'elle traduit le rare courage d'un homme qui croit en une réelle fraternité humaine et qui tient à défendre ce principe. C'est au point qu'il se rend dans des lieux et des régions où les visites dans les conditions de sécurité actuelles semblent être une aventure peu sûre aux yeux de la majorité des dirigeants, aussi bien politique que religieux. La visite a eu lieu en pleine épidémie de coronavirus. Elle a été précédée d'un attentat suicide et d'une attaque à la roquette contre une base à Erbil, l'une des étapes de la visite. Elle a également été précédée par l'infection de l'ambassadeur du Pape en Irak, Mitja Leskovar, par le coronavirus. La visite reflète également la profondeur de la foi du pape dans son rôle et sa mission, qui place les principes et les valeurs, ainsi que les problèmes de pauvreté, de marginalisation et de dégradation au premier plan de ses préoccupations. Son message a permis d'opérer un changement qualitatif dans le rôle du Vatican et dans ses relations avec les adeptes d'autres religions. Ceci est d'une grande utilité pour les nations arabes et islamiques, qui luttent contre les intrigues et les conflits qui ciblent leur tissu social et cherchent à porter atteinte à leur unité nationale en utilisant des interprétations sectaires et religieuses étroites et antipatriotiques. La visite du Pape en Irak s'est déroulée sous le slogan « Fratelli tutti. » Il s'agit d'une devise en harmonie avec le message du Pape François et d'une extension du document de fraternité humaine. Dans l'ensemble, je suis certain que cette visite, compte tenu du moment et des circonstances, illustre le courage du pape François et la profondeur de sa foi dans les principes humains universels. L'Irak a peut-être un besoin urgent de réunir ses communautés et ses citoyens sous la bannière de la patrie, afin qu'il puisse redevenir une terre de science, de culture et de progrès et reprendre son rôle dans l'enrichissement et le développement de la civilisation humaine. L'Irak, berceau des religions et des civilisations, et terre du père des prophètes, a besoin de paix et de coexistence entre tous. Ce besoin doit être dans le cœur de chaque Irakien et Arabe comme il l'est dans le cœur du Pape François.
Salem AlKetbi Politologue émirati et ancien candidat au Conseil national fédéral