Poussée par les retombées économiques de la pandémie mondiale Covid-19, la croissance en Afrique subsaharienne devrait tomber à - 3,3% en 2020, poussant la région dans sa première récession en 25 ans. L'agro-industrie et le numérique pourraient constituer le fer de lance la relance économique en Afrique La crise sanitaire n'est pas encore derrière nous et il y a même une recrudescence dans plusieurs pays africains qui inquiète et provoque le retour à des mesures exceptionnelles comme les couvre-feux. Mais au-delà des pertes en vies humaines et de l'impact économique et social immédiat de la pandémie sur le continent qui est très sévère, il est temps de tirer des leçons de cette crise pour repenser les politiques économiques en Afrique. En effet, il s'agit des pertes brutales d'emplois, de revenus, des opportunités d'éducation perdues mais ce sont aussi des millions d'enfants, de femmes et d'hommes dans les pays africains qui ont vu leurs conditions de vie au quotidien se dégrader depuis plusieurs mois. Mais à court terme, personne n'a de recette pour faire des miracles sur le plan économique, pour relancer notamment les secteurs les plus sévèrement touchés et limiter les pertes d'emplois. Et partout dans le monde, les Etats se préparent à la phase post-Covid-19. Ainsi regroupements régionaux et organisations internationales esquissent des plans de relance. L'Afrique, « berceau de l'humanité », profondément marquée par la crise sanitaire mondiale, ne peut rester en marge de cette donne. Dans ce contexte, un webinaire a été organisé le 21 janvier sur la relance de l'économie post Covid-19 en Afrique. Initiée par l›Université Euromed de Fès (UEMF), une institution d›utilité publique et à but non lucratif labélisée par l›Union pour la Méditerranée, avec ses composantes l'Euromed Business School et le RIEMAS (Research Institute for Euro-mediterranean and African Studies), cette visioconférence a connu la participation d'analystes et d'experts de renom dont M. Lahcen Haddad, PhD. Soutenir la croissance Comme le souligne aisément le président ivoirien, Alassane Ouattara, il faut une approche globale pour faire face au choc de la Covid-19. Il doit être aussi l'occasion d'ouvrir le débat, y compris sur des questions qui paraissent utopiques comme l'impôt mondial sur le capital pour lutter contre les inégalités, le revenu universel de base pour lutter contre la pauvreté, la réduction du temps de travail pour lutter contre le chômage, ou même l'ouverture des frontières pour mieux soutenir la croissance de l'économie mondiale. Ces questions ne doivent être éludées si l'on veut réussir une vraie relance économique en Afrique. Analysant les conséquences de cette pandémie, M. Lahcen fera remarquer, dans son exposé, qu'il s'agit de la première récession en 25 ans. En effet, poussée par les retombées économiques de la pandémie mondiale Covid-19, la croissance en Afrique subsaharienne devrait tomber à - 3,3% en 2020, poussant la région dans sa première récession en 25 ans, selon la dernière analyse économique régionale (Africa›s Pulse : Tracer la voie de la reprise). La pandémie pourrait ainsi conduire jusqu›à 40 millions de personnes dans l›extrême pauvreté en Afrique en 2020, effaçant au moins cinq ans de progrès dans la lutte contre la pauvreté. Stimuler la productivité Pour le panéliste, c'est le moment de l'annulation de la dette des pays les plus pauvres. Il s'agit d'une urgence. En la matière et en dépit de l'initiative louable du G20 d'accorder un moratoire sur le service de la dette publique bilatérale au profit de plusieurs pays africains, 34 Chefs d'Etat ont relayé l'appel du président ivoirien à l'annulation pure et simple de la publique. Cela ferait partie des mesures courageuses prises pour soulager les économies africaines, sachant que les besoins financiers de l'Afrique sont évalués à 100 milliards de dollars par an sur une période de trois ans. Dans ce contexte, la relance du financement de l'économie en Afrique nécessitera des politiques ciblées, qui stimulent la productivité agricole et permettent de faire passer la main-d'œuvre des secteurs à faible productivité vers des secteurs à forte productivité ainsi qu'une aide à des secteurs compétitifs, comme le propose le conférencier. Il s'agira, sans aucun doute, de se baser sur l'agro-industrie, les technologies numériques ou les services liés aux technologies de l'information et de la communication, essentiels pendant la pandémie. Il faudra également parvenir à des économies africaines à croissance plus rapide et plus résilientes. Et cela par la formalisation du secteur de l'économie parallèle, la garantie d'une stabilité politique, de la bonne gouvernance et de la transparence sans oublier les mécanismes de protection renforcés des droits de propriété. Wolondouka SIDIBE