La relance économique s'annonce longue et difficile, mais elle peut être accélérée, solide et plus inclusive si les pays africains accordent la priorité aux réformes et aux investissements qui permettront de relever le défi de créer davantage d'emplois inclusifs et de meilleure qualité. Durement touchée par les lourdes conséquences de la crise sanitaire, l'économie africaine sera indéniablement dans le rouge, si rien n'est fait pour inverser la tendance, notamment en ce qui concerne l'Afrique subsaharienne. Des perspectives moroses qui annoncent des lendemains difficiles. Dans son ensemble, et au commencement de la pandémie, les prévisions annonçaient la contraction du PIB réel en Afrique de 1,7% en 2020, soit une baisse de 5,6 points de pourcentage par rapport aux projections de janvier 2020 qui précédaient l'apparition de la COVID-19, en supposant que l'impact de la pandémie serait substantiel mais de courte durée. Si la pandémie se poursuivait au-delà du premier semestre de 2020, la contraction du PIB serait beaucoup plus marquée, de l'ordre de 3,4%, soit une baisse de 7,3 points en pourcentage par rapport à la croissance projetée avant la pandémie de la COVID-19. Autrement dit, les pertes cumulées du PIB pourraient se chiffrer entre 173,1 et 236,7 MM d'USD entre 2020 et 2021. Aujourd'hui, force est de constater que ces chiffres devraient être réévalués à la hausse. Le rapport trimestriel sur l'état de l'économie africaine et ses perspectives notamment pour l'Afrique subsaharienne d'Africa's Pulse n'augure rien de bon. Intitulé «Tracer les voies de la relance économique », ce document souligne un recul de la croissance à -3,3% pour 2020, soit la première récession économique de la région depuis 25 ans. Pire, la pandémie COVID-19 risque également de faire basculer jusqu'à 40 millions d'Africains dans l'extrême pauvreté, une menace pour les progrès en matière de développement, acquis au cours de la dernière décennie. Extrême pauvreté Dans le détail, la croissance a fortement chuté au second trimestre 2020 dans tous les pays, en particulier au Nigeria (6,1% en glissement annuel) et en Afrique du Sud (17,1%). Cette chute devrait être plus marquée en Afrique de l'Est et australe qu'en Afrique de l'Ouest et centrale, partiellement en raison de la contraction plus forte de la production en Afrique du Sud et en Angola. En outre, les perturbations dans l'industrie du tourisme et les confinements ont entraîné un ralentissement substantiel en Ethiopie, au Kenya et dans les pays insulaires. En Afrique de l'Ouest et Centrale, la chute de la croissance devrait être tirée principalement par les pays exportateurs de pétrole. Cependant, peut-on relever dans le rapport, les pays dont l'économie ne dépend pas essentiellement des ressources naturelles, ne devraient afficher qu'un recul modéré de leur croissance en 2020. Si l'on s'attend à un ralentissement sensible dans ces pays – comme la Côte d'Ivoire, l'Ethiopie ou le Kenya – la croissance devrait rester positive, du fait de la plus grande diversification de leurs économies. Toutefois, les économies dépendantes du tourisme, en particulier le Cap Vert, Maurice et les Seychelles, ont connu une forte contraction de leur économie, le secteur des services étant fortement affecté par la chute drastique du tourisme international Pour y faire face, l'analyse recommande que les pouvoirs publics saisissent les opportunités dans ce contexte de crise pour développer des politiques et investir en priorité en faveur d'une économie plus résiliente, plus productive et créatrice d'emplois. Stimuler la reprise Ce qui fait dire à Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour l'Afrique, que « pour stimuler une reprise stable après la pandémie de COVID-19, l'Afrique subsaharienne a besoin de développer des politiques susceptibles de favoriser une croissance durable et de renforcer la résilience. Cependant, la croissance seule ne suffit pas ». Car selon lui, les pays d'Afrique ont aujourd'hui besoin de développer des politiques et des investissements qui leur permettent de créer davantage d'emplois inclusifs et de qualité. Certes, la voie de la relance économique s'annonce longue et difficile, mais « elle peut être accélérée, solide et plus inclusive si les pays africains accordent la priorité aux réformes et aux investissements qui permettront de relever le défi de créer davantage d'emplois inclusifs et de meilleure qualité », note le rapport. Parallèlement, la voie de la relance économique, c'est aussi l'expansion de l'infrastructure numérique et une connectivité abordable, fiable et universelle dans toute l'Afrique et qui sont aussi la promesse d'emplois inclusifs. Cette voie souhaitée pour la relance doit déboucher sur des emplois et une transformation économique, principales clés d'une croissance soutenue, inclusive et résiliente tout en accélérant le programme de réformes structurelles. Enfin, l'Afrique subsaharienne a besoin de financements importants de la communauté internationale pour investir dans le capital humain, l'énergie et les infrastructures numériques et physiques avec un meilleur accès à l'aide publique concessionnelle sera nécessaire. Tout un chantier en perspective. Wolondouka SIDIBE