Le commerce et l'intégration, au sein de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) et avec le reste du monde, seront déterminants pour réduire la pauvreté, renforcer les moyens d'action des personnes démunies et stimuler la croissance économique après la Covid. C'est ce qu'indique la Banque mondiale dans son nouveau rapport « Commercer ensemble : vers une relance de l'intégration de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord à l'ère post-Covid ». De 120 pages, le document insiste sur les effets à long terme du double choc économique provoqué par la propagation du coronavirus et l'effondrement des prix du pétrole. Il recommande des changements de politiques et des réformes en vue de bâtir un nouveau cadre d'intégration pour la région. Selon la Banque mondiale, les économies de la région Mena devraient se contracter de 5,2% en 2020, soit un taux inférieur de 4,1 points aux prévisions d'avril 2020 et de 7,8 points à celles d'octobre 2019. Pour le Maroc, l'institution mondiale table sur une contraction de la croissance de -9,8%, au lieu des - 8,6 points pour l'Algérie, des - 7,8% pour la Jordanie et des -6,8% pour la Cisjordanie et Gaza. «Les données les plus récentes laissent entrevoir une vision de plus en plus pessimiste de la situation de l'économie régionale, qui ne devrait se redresser qu'en partie en 2021», précise ce bulletin d'information économique sur la région de l'institution basée à Washington. «Poussés à la fois par la diminution des recettes d'exportation pétrolière, la chute d'autres recettes budgétaires et les dépenses requises pour faire face à la pandémie, le compte courant et les soldes budgétaires de la région devraient s'établir respectivement à -4,8 % et -10,1 % du PIB en 2020, ce qui est nettement inférieur à ce qui avait été prévu en octobre 2019. La dette publique devrait augmenter considérablement dans quelques années, passant d'environ 45 % du PIB en 2019 à 58 % en 2022», poursuit le rapport. «Repenser les politiques économiques et sociales et renforcer l'intégration commerciale»
«La région Mena accusait déjà un retard sur le plan économique avant le déclenchement de la pandémie de Covid-19. Six mois plus tard, nous voyons — avec une effroyable clarté — les conséquences tragiques sur la vie humaine, les moyens de subsistance et le bien-être à travers la région», souligne Ferid Belhaj.
Le vice-président de la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord veut continuer à «aider la région Mena à arrêter la propagation de la maladie et à protéger et soigner sa population. Nous ne cesserons d'insister sur la nécessité pour les pays de la région d'accorder la plus grande priorité à la transparence, la gouvernance, la primauté du droit et la contestabilité des marchés, d'inspirer la confiance, de promouvoir le secteur privé et de mettre en place un nouveau cadre d'intégration économique régionale soutenue qui fera du commerce un puissant outil de réduction de la pauvreté et d'élargissement de l'accès aux possibilités pour tous». Si, pour Ha Nguyen, économiste senior de la Banque mondiale et co-auteur du rapport, «la pandémie continue d'occasionner des pertes économiques et touche de manière disproportionnée les populations pauvres et vulnérables», le document laisse la porte ouverte à l'optimisme. Selon Blanca Moreno-Dodson, directrice du Centre pour l'intégration de la Méditerranée, et responsable du rapport, «la pandémie de Covid-19 offre aux pays de la région une excellente occasion de repenser leurs politiques économiques et sociales et de renforcer l'intégration commerciale, tout en réduisant leur dépendance à l'égard du pétrole». Le rapport propose un nouveau cadre d'intégration coordonnée dans la région Mena allant au-delà de la réduction des tarifs douaniers, alors qu'il faut en moyenne 442$ et 53 heures pour se conformer aux formalités à l'exportation du commerce transfrontalier dans cette zone. «Ce qui est trois fois plus cher et quatre fois plus long que les moyennes des économies à revenu élevé de l'OCDE», relève le texte. La Banque mondiale suggère donc de «privilégier le commerce régional en matière de sécurité alimentaire, de systèmes de santé, d'énergies renouvelables et d'économie du savoir». Ainsi que d'«établir un marché numérique commun pour la région afin que les pays Mena améliorent à la fois les échanges et la connectivité numérique avec des marchés plus larges en Afrique et dans les pays méditerranéens. Cela devrait contribuer à accroître la productivité, coordonner une riposte efficace en cas de catastrophe et créer des emplois résilients, durables et ouverts à tous dans la région».