Lekjaa : La CAN 2025, une étape clé vers le Mondial 2030, avec un Maroc-Argentine en ligne de mire    Le Musée du Football Marocain ouvre ses portes : un voyage au cœur de la passion nationale    Le journaliste Ayoub Errimi n'est plus, le monde médiatique en deuil    Les défis des PME au centre de la 166e session ordinaire de l'assemblée générale du CESE    Chambre des conseillers : discussions houleuses autour des propositions d'amendements au projet de loi sur la grève    Maroc-Bavière : Mezzour et Gotthardt prospectent les opportunités de coopération stratégique    USA: Des droits de douane entrent en vigueur contre la Chine, le Canada et le Mexique    El Arjat 2: Un fonctionnaire de prison se suicide à l'aide de son arme de service    Fouzi Lekjaa : Pourquoi attendre 2030 ? Nous pouvons gagner la Coupe du Monde 2026    Omar Hilale élu à l'unanimité vice-président de la Commission de consolidation de la paix des Nations Unies pour l'année 2025 : Le Maroc continue de renforcer son rôle dans l'instauration de la paix mondiale    CAN Maroc 25 : Le calendrier dévoilé    Foot brésilien : Neymar de retour à Santos    Le Yémen salue la position du Maroc soutenant le gouvernement légitime    La Bourse de Casablanca, catalyseur clé pour l'investissement et la croissance des entreprises marocaines    SM le Roi adresse un message de condoléances à Donad Trump suite à l'accident aérien à Washington    Nador : Deux présumés trafiquants interpellés    Le Chef du gouvernement préside une réunion de la Commission nationale de suivi et d'accompagnement de la réforme du système d'éducation, de formation et de recherche scientifique    Le Maroc, leader en gestion humanisée des frontières    Bourita : Un nouvel élan s'annonce pour les relations Maroc-Yémen    LdC : PSG-Brest, Real Madrid-Manchester City, les chocs des barrages    Le Turc Baykar implantera «uniquement» une infrastructure de maintenance pour ses aéronefs vendus au Maroc    Trump et migration : un mur de controverses    Le trafic aérien de passagers atteint un record dans le monde en 2024    Transformation digitale. Orange Maroc lance un cloud local    Rougeole au Maroc : 122 cas dans les prisons, 105 guérisons    King Mohammed VI sends condolences to U.S. President After Washington D.C. air collision    Morocco, Yemen sign key agreements, MoUs in 6th joint commission meeting    Youssef Amrani : Une carrière au service de la Vision Royale    Ouverture des inscriptions pour la 2e édition du programme « Berklee at Gnaoua and World Music Festival »    Cinéma : Brady Corbet impose son talent avec "The Brutalist"    Exposition : "Reconversion" à la galerie Dar D'art de Tanger    La philatélie marocaine rend hommage aux instruments de la musique Arabe    Zellige marocain. Mounir Akasbi : « Le logo de la CAN 2025 est incontestablement authentique et sa référence est le Zellige fassi »    Le Musée du football marocain ouvert les week-ends au public    Trump persiste à vouloir expulser les habitants de Gaza malgré le rejet de l'Egypte et de la Jordanie    L'entraîneur marocain Issam Charai rejoint le staff technique des Rangers écossais    Une nouvelle ère de coopération entre le Maroc et Sao Tomé-et-Principe    Le ministre des Affaires étrangères Yéménite réitère la position constante de son pays en faveur de l'intégrité territoriale du Royaume    Le ministre du Transport et de la Logistique tient une réunion avec les opérateurs logistiques    Liaison sous-marine entre le Royaume-Uni et le Maroc : une décision finale d'investissement prévue cette année, le soutien de Londres attendu    Industries manufacturières : Légère baisse de l'indice des prix à la production en décembre, selon le HCP    Football : Achraf Bencherki s'engage avec Al-Ahly d'Egypte    La cellule de Had Soualem liée à Daech illustre le danger de l'enrôlement en ligne    Le Président de la Transition en Syrie : Nous travaillons pour l'unité du pays et la paix civile    Ford de retour aux 24 Heures du Mans en 2027    Marine Le Pen plaide pour des sanctions fermes contre l'Algérie face à la crise migratoire    FLAM 2025 : La littérature féminine, un vecteur de transformation sociale    Le temps qu'il fera ce vendredi 31 janvier 2025    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Interview avec Mohammed Benabdelkader : Des peines alternatives pour débarrasser les prisons des détenus non dangereux
Publié dans L'opinion le 11 - 01 - 2021

Le ministre de la Justice et des libertés Mohammed Benabdelkader nous a livré les détails du projet de loi de réforme du code et de la procédure pénale qui introduira les peines alternatives.
Pour la première fois au Maroc, le système judiciaire aura la possibilité d'appliquer des peines alternatives à l'emprisonnement avec de nouvelles mesures punitives tels que la surveillance par bracelet électronique et les travaux d'intérêts général. Une réforme attendue par plusieurs avocats et magistrats avec lesquels nous nous sommes entretenus dans un article précédent réservé à ce sujet. Afin de disséquer davantage les zones d'ombre de cette réforme profonde de la philosophie même de la justice dans notre pays, Mohammed Benabdelkader, ministre de le Justice et porteur de cette réforme, s'est confié à « L'Opinion » sur les détails de ce projet de loi, qui est soumis à l'examen législatif.
- Votre ministère veut introduire de nouvelles peines alternatives à la réclusion dans la réforme de la procédure du code pénal, mis à part l'enjeu du surpeuplement des prisons, existe-t-il d'autres motivations qui vous ont poussé à esquisser ce projet de loi ?
- Avant tout, il y a lieu de souligner que le sujet de réforme du code pénal a fait l'objet d'un projet qui a été présenté, au début, par le premier gouvernement présidé par M. Benkirane ; ce projet contient 80 articles qui ont été choisis parmi le projet intégral préparé auparavant par le ministère de la Justice en concertation avec ses différents partenaires. L'introduction de ces peines en droit pénal marocain a été recommandée à plusieurs reprises par une élite de femmes et d'hommes du monde juridique et des droits de l'Homme intéressés par le sujet, et ce, pour la réalisation d'une meilleure réinsertion sociale des détenus.
- Le projet de loi veut instaurer le placement sous surveillance électronique par bracelet, s'agit-il d'une nouvelle forme d'assignation à résidence ?
- On doit, tout d'abord, faire la distinction entre la résidence obligatoire prévue par le code pénal actuel et le placement sous surveillance électronique, puisqu'il s'agit de deux notions tout à fait différentes. La résidence obligatoire constitue une peine principale et ne se prononce par les tribunaux que pour des infractions bien déterminées, alors que le placement sous surveillance électronique prévu par le projet du code de procédure pénale est une mesure octroyée aux juges d'instruction en tant qu'alternatives à la détention provisoire. Ajoutons à cela que, contrairement à la peine de résidence obligatoire, la surveillance électronique permet au condamné de se déplacer dans un périmètre déterminé par le jugement.
- Les peines alternatives seront appliquées pour quel genre de crimes ou délits exactement ?
- Les peines alternatives seront réservées aux coupables de délits punis d'une peine privative de liberté dont la durée ne dépasse pas deux ans, ce choix est justifié par la philosophie même de ces peines qui sont appliquées, dans tous les systèmes juridiques, comme réponse pénale aux infractions les plus simples. Aussi, en se référant aux données statistiques, on trouve que les personnes condamnées d'emprisonnement et dont la durée ne dépasse pas 2 ans présentent 49% de la population carcérale. En outre, et en vertu de l'article 35.3, les peines alternatives ne peuvent être appliquées si le coupable est accusé de détournement de fonds, de corruption ou d'abus de pouvoir, trafic de drogues et de psychotropes, trafic d'organes et exploitation sexuelle de mineurs. Soulignons que le législateur marocain, et à travers le principe de l'individualisation des peines, octroie aux juges un pouvoir d'appréciation souverain pour l'application des peines alternatives selon la nature de l'infraction et la personne du condamné.
- Le texte de loi ne définit pas encore les formes des travaux d'intérêt général, vous en avez prévu des exemples précis ?
- Sur ce point, un texte réglementaire serait élaboré éventuellement pour préciser la liste desdits travaux et le processus de leur exécution. En général, l'article 35.7 du projet de code pénal précise que le travail d'utilité publique se fera au profit d'une personne morale ou d'une association à titre gracieux. Sa durée varie entre 40 et 600 heures, et est délimitée en fonction de la durée d'emprisonnement à laquelle le coupable a été initialement condamné. Chaque jour d'emprisonnement se verra substitué par deux heures de travaux d'intérêt général, sans dépasser 600 heures de travail au maximum.
- Avez-vous effectué des concertations avec les corporations d'avocats et de magistrats, sont-ils réceptifs à l'idée d'introduire de nouvelles peines non privatives de liberté compte tenu qu'ils sont les premiers concernés par cette réforme ?
- Le sujet des peines alternatives est un sujet à la fois ancien et nouveau au Maroc. Il a été traité par les magistrats et les avocats à diverses occasions, surtout dans la conférence d'Ifrane de 2000 qui a été organisée en collaboration avec l'organisation de réforme pénale internationale, la rencontre de Meknès sur la politique pénale au Maroc en 2004, et dans le dialogue national pour la réforme du secteur de la justice. Et durant toutes ces occasions, les professionnels de la justice étaient tous unanimes sur la nécessité d'adopter les peines alternatives aux peines privatives de liberté afin de soulager les prisons du fardeau du surpeuplement.
- Vous avez parlé d'une commission chargée d'approfondir le débat sur cette réforme, pouvez- vous nous en parler davantage et précisément sur son apport et sur ses conclusions ?
- Dans le cadre de l'approche participative adoptée par le ministère de la Justice, ce dernier a entamé des discussions approfondies avec tous les secteurs concernés, et par conséquent nous avons créé une commission chargée de mettre en oeuvre une vision globale pour l'application des peines alternatives, dont la composition comprend tous les intervenants concernés par l'élaboration et l'exécution de la politique pénale (magistrats, avocats, professeurs universitaires et d'autres intervenants). De même, le projet de procédure pénale prévoit la création d'une commission nationale qui serait chargée de l'exécution des peines alternatives.
- La société civile risque de réagir négativement à cet assouplissement de la procédure pénale comme tenu de la violence que connaît la société et les demandes de plus de rigueur dans les sanctions ? Êtes-vous d'accord avec ce constat ?
- Je ne suis pas d'accord avec ce constat pour deux raisons. La première est que ces peines alternatives que nous voulons introduire seront réservées uniquement aux coupables de délits punis d'une peine privative de liberté de courte durée, c'est-à- dire pour les infractions qui ne présentent pas de grand danger pour la société. Et leur application reste tributaire du pouvoir d'appréciation souverain du juge pénal. Deuxièmement, même la société civile reconnaît que la politique actuelle basée sur la détention a échoué de contrecarrer le phénomène criminel. Le nombre de détenus dans les prisons marocaines pose une question inquiétante quant à l'évolution future de la situation. Les établissements pénitentiaires ont dépassé leur capacité d'hébergement face aux vagues de détenus affluant chaque jour. Ce qui complique davantage la situation est que la grande majorité des nouveaux détenus est condamnée à de courtes peines, ne dépassant pas 2 ans dans la plupart des cas.
- Beaucoup d'observateurs estiment que le vote de cette loi n'aura lieu qu'après 2021, vous en convenez ?
- Après plusieurs stades de discussions approfondies autour de cette réforme, le projet de loi précité est entre les mains de la Chambre des Représentants. La discussion générale du texte au sein de la Commission de justice, de législation et des droits de l'Homme est achevée. Et c'est à l'institution parlementaire qu'incombe, actuellement, la tâche d'accélérer le processus d'adoption du texte vu les compétences qu'elle a en matière d'adoption des textes législatifs.
Recueillis par Anass MACHLOUKH
Encadré
Procédure pénale : Changer la philosophie de la Justice marocaine
Introduire des peines alternatives veut dire opérer un changement majeur dans la philosophie même de la Justice marocaine. Celle-ci est très imprégnée de la logique de l'incarcération comme seul moyen de dissuasion, elle a clairement échoué compte tenu de l'inefficacité de la dissuasion et la montée de la criminalité et de la violence dans la société. Certains parlent même d' « humanisation » ou d'assouplissement du Code pénal. Cette réforme pourrait satisfaire les attentes de beaucoup d'avocats qui ont dénoncé l'enracinement du réflexe de l'incarcération dans le système judiciaire marocain.
D'autres estiment que la détention est la règle pour de nombreux juges d'instruction même dans les cas de garde à vue ou de détention provisoire. Le placement sous surveillance électronique va encourager les juges à recourir davantage à la poursuite en état de liberté durant la phase d'enquête ou de procès pour certains délits ou crimes dont les auteurs ne représentent aucun danger. Des experts en droit pénal, tel que Mohammed Bouzlafa, doyen de la Faculté de droit à l'université Mohammed Benabdellah à Fès, estiment qu'il est préférable que la poursuite en état de liberté dure jusqu'au verdict de la Cour d'appel au lieu du jugement de première instance.
La mise en place des peines de travail d'intérêt général serait plus utile à la réinsertion que l'emprisonnement, selon plusieurs experts. Encore faut-il fournir des efforts exceptionnels en matière de formation des juges et d'assistants sociaux pour l'application des nouvelles peines non-privatives de liberté. Des organisations, telle que l'Union Européenne, sont disposées à assister le Royaume en la matière.
A. M.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.