La colère croît dans le monde musulman suite aux attaques publiques du président français Emmanuel Macron contre l'Islam et son prophète Mohammed (PSL). Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté mardi au Bangladesh, appelant au boycott des produits français après la défense par Emmanuel Macron de la liberté de caricaturer lors de l'hommage à un enseignant tué pour avoir montré des caricatures du prophète Mohammed (PSL), brûlant l'effigie du président français et l'accusant «d'adorer Satan». A travers le monde musulman, des fidèles ont réagi avec colère aux propos de Macron : dans les zones rebelles en Syrie, dans la bande de Gaza ou en Libye, des portraits du président français ont été brûlés. Dans plusieurs pays du Golfe, des marchandises françaises ont été retirées des étals. Emmanuel Macron avait promis de ne pas «renoncer aux caricatures», lors d'un hommage national au professeur Samuel Paty, décapité par un islamiste le 16 octobre pour avoir montré des caricatures du prophète Mahomet à ses élèves lors d'un cours sur la liberté d'expression. L'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, qui avait publié ces caricatures en 2006 comme d'autres journaux européens pour défendre la liberté de la presse, après que leur publication par un quotidien danois avait provoqué la colère de nombreux musulmans dans le monde, avait été victime en 2015 d'un attentat jihadiste qui avait fait 12 morts dont des journalistes et caricaturistes du journal. A Dacca, plus de 40.000 personnes ont participé, selon les estimations de la police, à une marche organisée par l'Islami Andolan Bangladesh (IAB), l'un des principaux partis islamistes bangladais. Elle a été stoppée avant de parvenir près de l'ambassade de France dans la capitale du Bangladesh, pays majoritairement musulman. Des centaines de policiers ont fait barrage avec des fils de fer barbelé pour bloquer les manifestants à environ 5 km de l'ambassade. Les manifestants se sont dispersés sans violence mais un petit groupe a mis le feu à un portrait de Macron. «Macron va le payer cher», assuraient des protestataires, appelant au boycott de la France. La police a renforcé ses patrouilles autour de l'ambassade. L'IAB a appelé à d'autres manifestations dans tout le pays jeudi et vendredi. D'autres manifestations ont eu lieu mardi à Gaza, en Cisjordanie, à Tel-Aviv et dans le sud du Yémen. A Dacca, les manifestants scandaient des slogans appelant au «boycott des produits français» et à «punir» M. Macron. Le flot de critiques envers Macron et les appels au boycott des produits français ont notamment été alimentés par la Turquie, dont le président Recep Tayyip Erdogan a mis en doute «la santé mentale» de Macron. Erdogan se retrouve lui-même caricaturé en Une du numéro de Charlie Hebdo de mercredi. Ankara a vivement réagi en accusant l'hebdomadaire de «racisme culturel». Convocations en chaine de diplomates français Téhéran a convoqué le numéro deux de l'ambassade de France en Iran. Islamabad a fait de même avec l'ambassadeur de France au Pakistan. En Jordanie, le ministre des Affaires islamiques Mohammed al-Khalayleh a protesté. Le Maroc a «vigoureusement» condamné les caricatures. Le Haut Conseil islamique en Algérie a fustigé une «campagne virulente» contre l'islam. Le Conseil des sages musulmans, basé à Abou Dhabi et présidé par le grand imam d'Al-Azhar, a annoncé son intention de poursuivre Charlie Hebdo et «quiconque offense l'islam». Le dirigeant de la république russe de Tchétchénie, Ramzan Kadyrov, a même affirmé que le président français pousse les musulmans «vers le terrorisme». Face à ces protestations, le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin s'est demandé «de quel droit les puissances étrangères se mêlent de nos affaires intérieures», citant la Turquie et le Pakistan. Pour le ministre délégué au Commerce extérieur Franck Rieste, les appels au boycott de produits français sont pour l'instant limités et ne touchent que des produits alimentaires. Macron a reçu le soutien de dirigeants européens après les attaques de M. Erdogan, et un porte-parole de la Commission européenne a prévenu mardi que l'appel du président turc à boycotter les produits français «éloignera encore plus» son pays de l'UE. S'adressant directement à M. Erdogan, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte lui a adressé mardi «un message (..) très simple». «Aux Pays-Bas, nous considérons la liberté d'expression comme le plus grand bien et cela inclut des caricatures, dont des caricatures de politiciens», a-t-il déclaré dans une vidéo de la télévision publique néerlandaise NOS.