Un manque à gagner autrement important pénalise certainement l'économie des pays du Maghreb. Conscient de la gravité de cette situation qui perdure depuis plusieurs années, le Maroc vient d'appeler l'Algérie, jeudi 20 mars, à rouvrir sa frontière terrestre avec le Royaume, fermée depuis 1994, et à une normalisation des relations entre les deux pays. Un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération a indiqué que «Le Royaume du Maroc appelle dans l'amitié fraternelle et la sincérité totale à une normalisation des rapports avec l'Algérie et à une ouverture de la frontière entre les deux pays». Le communiqué ajoute que «Le Royaume du Maroc réitère sa volonté d'ouvrir une page nouvelle dans les relations entre les deux pays voisins tenant compte de leur passé commun et de leur destin partagé». Il précise que la fermeture de la frontière a été décidée par l'Algérie de manière unilatérale en 1994 dans un contexte international, régional et bilatéral aujourd'hui largement dépassé. «Ainsi pourrait-on répondre aux aspirations manifestes des deux peuples si proches à divers titres, satisfaire les souhaits des populations frontalières et en particulier les familles concernées et enfin canaliser les flux des marchandises qui font aujourd'hui l'objet de mouvements illicites et de trafics notoires», conclut le communiqué. Selon un rapport du FMI sur les «perspectives économiques en Asie centrale et au Moyen-Orient», la réouverture de la frontière entre les deux pays voisins contribuerait fortement à stimuler les échanges commerciaux dans la région. Aussi, face à l'émergence des grands blocs régionaux, la concrétisation du projet de l'établissement d'une zone de libre-échange entre les pays de l'Union du Maghreb Arabe (UMA), s'avère-t-elle plus que jamais incontournable. En attendant, l'UMA peine à prendre son envol et l'envergure d'un réel groupement économique intégré et capable de répondre aux aspirations des peuples au développement dans la complémen-tarité. En effet, le niveau du commerce inter-maghrébin ne dépasse guère 5 à 6% du volume total du commerce extérieur des cinq pays membres. Fort d'une économie de plus de 224 milliards de dollars de PNB, ce groupement, qui recèle d'importantes ressources naturelles et énergétiques, est en droit de se targuer de sa proximité géographique de l'UE, un marché de 450 millions de consommateurs. Les pays de la région se doivent aussi d'être conscients du coût du blocage du processus de leur intégration régionale qui s'apparente beaucoup plus à un pari d'avenir qu'à une lecture émotionnelle du passé. Dans cet esprit, le monde entier avait salué l'initiative de S.M. le Roi Mohammed VI de supprimer le visa, imposé en 1994, pour les citoyens algériens. La décision Royale, qui intervient dix années après son instauration, participe d'une volonté sincère et déterminée du Maroc d'inscrire ses rapports avec l'Algérie voisine dans une dynamique nouvelle, au service du rapprochement entre les deux peuples maghrébins frères. Dans ce cadre, il faut noter que malgré les vicissitudes du temps, l'idéal maghrébin existe réellement. Tous les arguments militent en faveur d'une telle option: l'histoire, la culture, la proximité géographique, les nécessités du commerce et de l'économie. Les mutations que subit la scène internationale font que l'Etat national est incapable seul de faire face aux défis de la mondialisation. Les regroupements régionaux sont devenus incontournables. Conscient de cet enjeu, le Maroc, pays fondateur de l'UMA, n'a cessé d'intensifier les efforts en vue de redynamiser les structures de l'Union et de traduire dans les faits les appels incessants à sa relance pour sortir son action de la morosité. Pour le Royaume, cette édification du Maghreb arabe qui constitue toujours un choix stratégique répondant aux aspirations des peuples frères de la région, est réalisable. A condition que les termes du Traité de Marrakech, et à leur tête, le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale des pays membres, soient respectés par tous. Malheureusement, malgré tous les gestes marocains de bonne volonté, notre pays est constamment heurté à une fin de non-recevoir de la part d'une vision qui fait de la question du Sahara un préalable au développement des relations bilatérales. Au lieu de dépenser l'argent de son pétrole dans des projets de développement humain, elle cautionne une cause déjà perdue puisque le Maroc est souverain dans son Sahara. Le fait d'inciter le polisario à déplacer les réfugiés de Tindouf, dans l'ouest algérien, ainsi que son infrastructure politique à Tifariti dans le but d'ajouter des pressions politiques et diplomatiques sur Rabat est également une cause perdue, sachant que Tifariti est une zone tampon placée sous la responsabilité de la Minurso, mission chargée de la surveillance du cessez-le-feu. Se trouvant à une trentaine de kilomètres de la ville de Smara, le Maroc l'avait laissée délibérément inoccupée pour éviter une tension supplémentaire entre le Maroc et l'Algérie. Ce pays voisin n'est pas sans savoir que l'objectif diplomatique des uns et des autres n'est pas de recueillir le maximum de voix; mais d'aboutir à un règlement politique, mutuellement acceptable, de cette question. Pour y parvenir, le Maroc a toujours réaffirmé sa disponibilité sincère et entière à négocier un statut d'autonomie viable, crédible et définitif au bénéfice de tous les habitants du Sahara marocain. Cette autonomie est de nature à relancer l'UMA sur de nouvelles bases et de mettre en place un ensemble maghrébin fort au service des peuples de la région. Autrement dit, l'Algérie se retrouve aujourd'hui dans la situation d'un pays qui doit répondre plus franchement par l'ouverture des frontières.