L'un des principaux chantiers du nouveau gouvernement est la mise en application de la constitution, adoptée le 1er Juillet dernier dans un enthousiasme populaire réel. Le nouveau chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, n'est pas rassurant sur ce thème. Dans son désir populiste, il raconte ses rencontres avec le Roi, comme s'il s'agissait d'un événement "people", alors qu'il s'agit de rencontres institutionnelles, donc sous le sceau d'une certaine retenue et dont le contenu ne peut être livré qu'avec une certaine hauteur. De la même manière, le nouveau chef du gouvernement n'est pas dans son rôle quand il reçoit des Salafistes, le groupe de Maghraoui, spécialisés dans les fatwas scandaleuses. Cette rencontre jette la suspicion sur les assurances que A. Benkirane veut donner sur les libertés individuelles. En tant que chef de gouvernement, il ne peut s'adresser qu'aux partis légalement constitués. Ni Maghraoui, ni Al Adl Wal Ihssan n'en font partie. Heureusement, l'institution monarchique respecte à la lettre la constitution, avec la sérénité d'une institution vieille de quatorze siècles. Le Roi a nommé le chef du gouvernement deux jours après la proclamation des résultats, l'a reçu ensuite pour s'enquérir de l'avancement de la formation de la coalition. Selon A. Benkirane, lui-même, le Palais ne s'est immiscé ni dans les choix d'alliances, ni dans celui des ministrables. L'autonomie des acteurs politiques est réellement totale, ils doivent assumer leurs responsabilités sans paratonnerre. Le monarque, lui, continue à lancer des projets structurants, sociaux, au bénéfice de la population, dans toutes les régions. A chaque fois, l'accueil est spontané, sincère et chaleureux. Les prérogatives de l'institution monarchique sont importantes. Mais au-delà des textes, c'est ce lien entre celui qui l'incarne et le peuple qui fonde la stabilité du pays et sa spécificité. Il est du devoir de tous les démocrates de veiller à l'application stricte des dispositions de la nouvelle constitution, sans tomber dans les clichés populistes. Il est de notre devoir de réclamer au chef de gouvernement de se mettre au diapason de l'institution constitutionnelle qu'il représente, au lieu de courir la popularité médiatique. Crédibiliser les institutions c'est d'abord respecter leur aura, leur hauteur. Grâce à la volonté du Roi et du peuple, le Maroc est entré dans l'ère de la normalité démocratique, le suffrage universel étant le seul juge, l'expression de la souveraineté populaire. Il nous faut cependant rester vigilant, car nous savons tous que la classe partisane, PJD compris, a d'énormes lacunes qu'elle ne comblera pas dans quelques mois.