Une fois de plus, Mouammar Kadhafi aura échoué. A Syrte, sa ville natale, le leader libyen na pas réussi, le week-end passé, lors du sommet de la ligue arabe, à convaincre ses pairs de rejoindre le «front du refus» sur le dossier israélo-palestinien. Pire, lalliance des «refuzniks» sest retrouvée bien diminuée : seules la Libye et la Syrie ont exhorté les Palestiniens à se lancer dans une aventure militaire contre Israël et ont refusé de signer le communiqué commun trop modéré à leurs goûts. Il est vrai que limprévisible colonel est ouvertement boudé par nombre de ses pairs. Quatorze chefs dEtat sur vingt-deux ont jugé bon de se rendre à Syrte. Kadhafi est fâché avec le roi Abdallah dArabie Saoudite. Leur inimitié est si forte et les propos échangés lors du précédent sommet de la Ligue arabe à Doha si peu diplomatiques, que lémir du Qatar avait fait couper les micros Le roi Mohammed VI a décidé de lignorer, le président Hosni Moubarak se remet fort à propos dune intervention chirurgicale, le Liban du président Michel Sleimane la inculpé en 2008 pour la disparition de limam Moussa Sadr trente ans plus tôt et Nouri al-Maliki, Premier ministre irakien est furieux que le leader libyen ait accepté de recevoir peu avant des opposants baasistes Bref, rien qui puisse prédisposer les responsables arabes à se lancer dans une aventure incertaine au Proche-Orient pour plaire au colonel. Quoique le dossier israélo-palestinien ait été, ce nest pas une surprise, le principal sujet du sommet. Concrètement, les dirigeants arabes ont redit quils ne fermaient pas la porte à des négociations indirectes entre Palestiniens et Israéliens mais ont rappelé quils restaient opposés à la colonisation en Cisjordanie et voyaient de façon non négociable, en Jérusalem-est, la capitale de lEtat palestinien. Tous soutiennent linitiative arabe de paix proposée par lArabie Saoudite en 2002 à Beyrouth (la paix contre les territoires) et ne voient guère de raison de labandonner. Cette modération doublée de fermeté facilite la tâche de Mahmoud Abbas. Pas question pour lui dacquiescer aux propos du colonel Kadhafi et du président syrien Bachar el-Assad qui lui ont conseillé «dabandonner la stratégie du processus de paix et de reprendre la lutte armée». Le président palestinien ne lentend pas de cette oreille. Il est ouvert à des négociations même indirectes avec Israël (une concession faite à Barack Obama) mais il ne discutera pas tant que la colonisation na pas cessé à Jérusalem-est. Ce nest pas au moment où les Palestiniens engrangent les bénéfices diplomatiques du froid polaire survenu entre Américains et Israéliens quils vont prendre le risque de heurter Washington en renouant avec la violence. Ce serait faire un cadeau royal à la droite israélienne. Second thème du sommet : la proposition du Yémen de transformer la Ligue arabe en Union arabe. Un sommet extraordinaire doit se tenir dici à la fin de lannée pour en discuter. Les Unions sont à la mode. LUnion européenne en a ouvert la voie il y a plus de cinquante ans. Mais le leader libyen a peut-être torpillé ce projet ambitieux. Lors dune réunion à huis clos, il a proposé dinviter la Turquie et lIran à rejoindre la nouvelle Union arabe. Il nest pas certain que Téhéran soit la bienvenue au club des 22.