L'évolution du judaïsme marocain à travers l'histoire a été au centre d'une rencontre organisée, dimanche à l'Institut du Monde arabe (IMA) de Paris, avec la participation d'éminents historiens. Lors de cette rencontre, tenue sous le thème « le judaïsme du Maroc : les lectures plurielles d'une histoire », les participants ont souligné que le judaïsme marocain représente, à travers plus d'un millénaire d'existence, une confluence féconde et une synthèse réussie des multiples courants culturels du monde juif : le judaïsme des exilés d'Espagne et du Portugal, les communautés juives autochtones de langues arabe et berbère, les réfugiés arrivant sur les rives du Maroc à travers les siècles cherchant une terre d'asile, notant que la communauté juive au Maroc était la plus importante dans le monde arabe. Ils ont également relevé que cette communauté a pu évoluer au Maroc à la faveur des valeurs de coexistence intercommunautaire et de symbiose avec les musulmans qui ont toujours caractérisé la société marocaine. Après avoir rappelé l'attachement de la communauté juive aux sultans du Maroc, les intervenants ont mis en exergue son dynamisme et sa contribution au développement économique du Royaume, faisant savoir que les membres de cette communauté ont été associés à plusieurs secteurs d'activité. Ils ont, à cet égard, cité leur contribution au développement des secteurs de l'agriculture, du commerce maritime et de l'artisanat et d'autres activités, mettant l'accent sur le rôle des juifs marocains en tant que l'un des acteurs de modernité notamment durant le 19ème siècle et le début du 20ème. Les participants ont, d'autre part, évoqué la convergence culturelle et artistique entre la communauté juive et l'ensemble de la population marocaine ce qui s'est reflété dans plusieurs genres et styles musicaux dont la musique andalouse. Ils ont en outre passé en revue les mutations qu'a connues le judaïsme au Maroc à travers l'histoire, mettant l'accent en particulier sur l'influence du protectorat et de la Seconde Guerre mondiale qui ont été parmi les facteurs expliquant la vague d'immigration des juifs marocains vers plusieurs pays dont la France et le Canada. Ouvrant cette rencontre, le président de l'IMA, Jack Lang avait rappelé que la Constitution de 2011 est unique au monde puisqu'elle revendique la diversité du Maroc et la richesse de ses affluents, notamment hébraïque, soulignant que le Royaume est aujourd'hui un modèle de tolérance. « C'est une extraordinaire richesse pour un pays d'être nourri par ses affluents », a-t-il dit, ajoutant que le Royaume connaît un « miracle intellectuel et culturel ». La participation de plusieurs artistes de différentes générations à l'exposition-événement « Le Maroc contemporain » témoigne de ce métissage culturel que connaît le Royaume, a insisté M. Lang. Cette rencontre s'inscrit dans le cadre d'une journée d'études autour du judaïsme marocain, initiée par l'IMA en partenariat avec le Centre communautaire de Paris. Au programme de cette journée figuraient également un débat sur « les affluents et confluences artistiques et culturels du judaïsme marocain » et un concert de musique judéo-marocain animé par Ahmed Piro, Bahaa Ronda et Michel Abitan. La journée a été ponctuée par la projection du film « Adieu mères », réalisé par Mohamed Ismaïl et qui retrace, à travers l'histoire de deux familles, l'une juive et l'autre musulmane, la période de l'immigration des juifs marocains au début des années 1960.