«La réalité de la coexistence entre Musulmans et Juifs au Maghreb s'exprime en toute authenticité» La réalité de la coexistence entre Musulmans et Juifs dans la région du Maghreb s'exprime aujourd'hui en toute authenticité, a affirmé André Azoulay, Conseiller de SM le Roi et président de la Fondation euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures. Dans un entretien au site internet Deutsche Welle, diffusé mardi, M. Azoulay a appelé à la non-exploitation politique de la référence religieuse, aussi bien par les juifs que par les musulmans. Jetant un regard sur la présence et la contribution de la culture juive à la création artistique et culturelle au Maroc, M. Azoulay a souligné qu'elle aspire à plus de créativité, citant, à cet effet, le festival des Andalousies atlantiques, qui connaît la participation d'artistes, musiciens et poètes, musulmans et juifs, qui fêtent ensemble leur coexistence, en arabe et hébreu. Considérant que le Maroc a su préserver cette flamme lumineuse qui remonte aux fins fonds de la mémoire collective des Musulmans et Juifs au Maroc, il a souligné que ce rayonnement de la création artistique judéo-islamique se poursuit aujourd'hui. Des millions d'auditeurs et de spectateurs de différents pays, notamment ceux qui accueillent des communautés juives marocaines, sont réceptifs à cette création et œuvrent au prolongement de ces traditions ancestrales magnifiques, a-t-il poursuivi. Mettant l'accent sur l'existence de diverses expressions culturelles juives au Maroc, fruit de contributions remarquables d'artistes, peintres, écrivains et philosophes, M. Azoulay a cité Edmon Amran El Maleh, cet homme de lettres à la grande présence symbolique sur la scène littéraire, outre son rôle politique en tant que militant nationaliste engagé. Et d'ajouter que les œuvres littéraires dans l'espace contemporain portent les traces de la fusion des créations des juifs et des Musulmans, comme les travaux des regrettés Haïm Zafrani, éminent historien du judaïsme maghrébin et Aami Boughanem, qui a légué des œuvres littéraires remarquables sur la vie sociale des juifs au Maroc. M. Azoulay a considéré que les expressions de la culture juive prennent diverses formes en littérature, musique, art culinaire, cinéma et en théâtre satirique, aussi bien sur les plans national qu'international, citant à titre d'exemple les œuvres de l'humoriste Gad el Maleh et des cinématographes marocains musulmans, qui ont consacré ces dernières années pas moins de 10 films aux moments phares de l'histoire du judaïsme marocain, mais aussi à sa situation actuelle sur les plans politique, social ou culturel. La contribution des Marocains juifs à la vie culturelle et sociale peut être remarquée partout où ils vivent, au Maroc ou à l'étranger, a-t-il ajouté, notant que les musiciens, les poètes et les écrivains restent attachés à l'identité marocaine et sont fortement présents dans la vie quotidienne, à travers la langue, l'art culinaire, la musique ou les pratiques religieuses. Il a estimé que ces expressions doivent être remarquées à travers la large présence des Marocains juifs dans le monde entier et non seulement au Maroc, où 3.000 à 4.000 juifs vivent encore contre plus d'un million dans le monde, où ils se présentent comme porteurs d'une histoire et d'une identité marocaines, constituant l'une des rares communautés au monde qui n'ont pas coupé les liens avec leur mémoire. Concernant la préservation du patrimoine juif au Maroc, M. Azoulay a salué la contribution du gouvernement allemand à la restauration de la synagogue de Fès (synagogue des Fassis), exprimant le souhait d'établir un partenariat avec les responsables allemands pour la restauration des grandes synagogues d'Essaouira et la création d'un centre culturel juif et d'un musée sur l'histoire des juifs du Maroc. Pour lui, tout juif marocain se définit par rapport à une identité et à une histoire magnifique et profondément enracinée. "En tant que Marocain juif, je m'estime chanceux de me présenter comme un homme riche de son judaïsme et ses cultures amazighe et arabe et d'une histoire s'étalant sur des siècles de métissage entre cultures islamique et juive. C'est ce qui me permet d'avancer selon une logique et une réalité humaine, sociale et spirituelle", a-t-il dit. Faisant remarquer que l'entourage du Maroc, notamment l'Europe occidentale, traverse une étape marquée par les conflits et la peur entre les religions, les civilisations et les cultures, il a noté que le Royaume, fort de ses caractéristiques civilisationnelles spécifiques, est appelé à assumer la responsabilité de la préservation de la complémentarité et de la compréhension. Pour ce qui est de la participation des juifs marocains à la vie politique, il a indiqué que tout citoyen, quelles que soient ses convictions religieuses au Maroc, est libre de se porter candidat ou de participer aux élections, sans exploitation de la religion ou de l'histoire comme des slogans partisans, notant que le judaïsme au Maroc est porteur d'une histoire beaucoup plus grande pour qu'il soit exploité à des fins politiques.