Les participants à une rencontre mercredi à Marrakech ont loué la coexistence pacifique qui a toujours prévalu entre les communautés musulmane et juive du Maroc ainsi que leur vécu en symbiose. S'exprimant lors d'un colloque international sous le thème "Continuité et/ou discontinuité du Judaïsme marocain ?", initié par l'Association "Permanences du Judaïsme marocain" (APJM), les conférenciers ont à cet égard souligné l'équilibre culturel et politique qui a toujours existé entre Musulmans et Juifs au Maroc, rappelant que cette symbiose se doublait d'une différenciation d'ordre politique, en l'occurrence la notion religieuse islamique la "Dhimma" visant la protection des Juifs. Cette rencontre, à laquelle ont pris part notamment des historiens, des chercheurs et des universitaires musulmans et juifs marocains, a été l'occasion pour l'ensemble des intervenants de relever que le judaïsme marocain a vécu une civilisation originale en symbiose linguistique, culturelle et économique avec toutes les autres composantes de la société marocaine. Après avoir signalé que ce judaïsme a réussi son défi et sa gageure par une très forte résistance et persistance devenues un engouement pour les nouvelles générations, ils ont fait observer que les Juifs marocains, là où ils sont, expriment un attachement sentimental profond à leur terre natale et œuvrent à la conservation de la mémoire juive marocaine ainsi qu'au maintien de liens moraux et spirituels avec l'Etat marocain et ses Symboles, particulièrement avec le Trône Alaouite. Produit du terroir marocain, ce judaïsme est "un vrai trésor religieux et intellectuel" et fait partie intégrante de l'histoire du Royaume, ont-ils indiqué, mettant l'accent à cet égard sur la nécessité de préserver ce patrimoine bimillénaire. Des témoignages sur la coexistence entre Musulmans et Juifs au Maroc ont été apportés par des intervenants, dont l'artiste Françoise Atlan et Ali Ouidani, président de l'Association "Arraw N'Ghriss" de Goulmima. Ce colloque revêt une extrême importance dans la mesure où il confirme que les Juifs du Maroc à travers le monde restent très attachés à leur pays d'origine et que "nos traditions familiales et nos rites religieux sont marocains", a déclaré à la MAP l'écrivain Robert Assaraf. Et l'auteur de l'ouvrage "Juifs du Maroc à travers le Monde" d'ajouter que "notre identité marocaine est permanente et est renforcée d'année en année, de génération en génération". Les Juifs du Maroc n'oublieront jamais qu'ils étaient protégés pendant près de cinq siècles et que leurs ancêtres avaient été sauvés de l'inquisition, a précisé le président d'honneur de l'APJM.
Pour sa part, M. Ephraim Riveline, professeur à l'Université Paris-VIII, a relevé que cette rencontre se veut une réflexion non seulement sur la mémoire du passé mais aussi sur la possibilité de créer quelque chose de vivant pour l'avenir. L'attachement des Juifs marocains à leur terre natale s'explique en grande partie par le statut particulier dont ils y ont bénéficié, a-t-il dit, notant que la communauté juive n'a jamais été un groupe ethnique minoritaire mais une véritable composante de la société marocaine. Ce colloque, qui s'inscrit dans le cadre du 2-ème périple identitaire de l'APJM dans le Sud marocain (10-21 mars), est organisé en collaboration notamment avec le Département d'études hébraïques de l'Université Paris-VIII, la Casa de Safarad de Cordoue (Espagne), le Centre de recherches sur les Juifs du Maroc, le Groupe de recherches et d'études sur le judaïsme marocain et la communauté israélite de Marrakech. Le 2-ème périple identitaire de l'APJM conduira les participants aux synagogues et cimetières juifs de Marrakech à Erfoud en passant Essaouira, Demnate, Ouarzazate, Tinghir et Goulmima. Association culturelle composée de Juifs marocains des cinq continents, l'APJM, présidée par Arrik Delouya, originaire de Marrakech, a pour vocation de faire connaître l'immense richesse du judaïsme marocain tel que "patrimoine vivant, résistant et persistant", de le rendre accessible et de contribuer à sa permanence à travers notamment des groupes de réflexion, des actions de sauvetage du patrimoine, des symposiums et des écrits. Elle se propose également de promouvoir les multiples aspects du judaïsme marocain, restaurer les sites qui ont été marqués par l'histoire, organiser des rencontres itinérantes, éditer tous les ouvrages de références épuisés et d'assurer leur traduction en différentes langues.