Il fallait le retour dun Hariri à Damas pour mettre la dernière main aux retrouvailles libano syriennes. Cest fait depuis le week-end passé et le voyage du jeune Premier ministre libanais, Saad Hariri, 39 ans, à Damas. Faut-il sen offusquer alors que Saad Hariri ne cache pas quil estime que le voisin syrien est impliqué dans lattentat contre son père, Rafik Hariri, le 14 février 2005 à Beyrouth ? Evidemment pas. La raison dEtat la emporté. Mais pas seulement La Syrie de 2009 nest plus celle de 2005. Sous la pression internationale, Damas a été obligé, au printemps 2005, de retirer ses troupes du Liban. Ce fut un premier pas contraint et forcé. Depuis, Bachar el-Assad semble déterminé à donner un nouveau cours à la politique syrienne. Il a ouvert une ambassade à Beyrouth et y a envoyé un ambassadeur. Puis, en novembre, Damas a donné un feu vert à ses amis du Hezbollah pour entrer dans un gouvernement dunion nationale mettant ainsi fin à une longue crise gouvernementale de cinq mois. LArabie Saoudite a joué un rôle essentiel pour rétablir des relations apaisées entre la Syrie et le pays du Cèdre. Son souci sappelle lIran. Et Riyad voudrait, comme les Européens et les Américains, distendre les liens entre Damas de Téhéran. Les deux capitales ont conclu une alliance stratégique. Le roi Abdallah sest donc rendu en visite en Syrie en octobre pour se réconcilier avec Bachar el-Assad. Puis il a incité Saad Hariri à limiter. Le Premier ministre libanais, chef de la communauté sunnite du Liban, peut difficilement lui opposer un refus. Le roi Abdallah est non seulement son parrain politique mais aussi son financier et son meilleur soutien régional. De son côté, Bachar el-Assad a joué le jeu pour faciliter le voyage de son hôte qui a suscité de forts grincements de dents à Beyrouth. Il est allé chercher lui-même Saad Hariri, au volant de sa voiture, et mettant les petits plats dans les grands la reçu à trois reprises en deux jours. Le message était clair : les fils veulent avoir des relations plus apaisées que leurs pères. Est-ce à dire que les nuages se sont évanouis du ciel syro-libanais ? Cest trop tôt pour le dire. Le général Jamid el-Sayed, un des anciens patrons des renseignements libanais qui fut arrêté, avec trois autres responsables libanais, dans le cadre de lassassinat contre Rafik Hariri, puis relâché, faute de preuve, a lancé des poursuites contre le camp Hariri et le groupe du «14 Mars» au pouvoir à Beyrouth, auprès de la justice syrienne. La suite donnée à cette plainte sera probablement un bon baromètre des relations entre les deux pays. Bachar el-Assad peut-il prendre le risque de changer dalliés et dabandonner lIran ? Difficile. Les Syriens entendent garder deux fers au feu. Au sein de larmée, certains estiment de leur intérêt de garder de bonnes relations avec Téhéran. Bachar el-Assad doit jongler entre les différents clans. Saoudiens et Occidentaux en sont convaincus et se gardent bien dafficher publiquement leur souhait. Leur souci, disent-ils aujourdhui, est de réintégrer progressivement la Syrie dans son environnement arabe. Le voyage de Saad Hariri à Damas en est une pièce maîtresse.