La soif menace actuellement de deux à trois milliards de personnes. Une situation inquiétante qui s'aggravera davantage au cours des décennies à venir, en particulier dans les villes, prévient l'ONU. Réalisé par l'UNESCO, un rapport alarmant sur la mise en valeur des ressources hydriques a été présenté mercredi à l'occasion de la Conférence sur l'eau 2023. Se déroulant à New York jusqu'au 24 mars, l'événement a été l'occasion de tirer, encore une fois, la sonnette d'alarme par rapport à la gravité du stress hydrique dans le monde. La soif guette Ainsi selon les données de ce rapport, 2 milliards de personnes, soit 26% de la population mondiale, sont privées d'accès à l'eau potable. Tandis que 3,6 milliards de personnes (soit 46%) n'ont pas accès à un système d'assainissement géré de manière sûre. Détaillant la situation, le rapport note qu'entre deux et trois milliards de personnes connaissent des pénuries d'eau pendant au moins un mois par an. «Ce qui fait peser de graves risques sur leurs moyens de subsistance, à travers la sécurité alimentaire et l'accès à l'électricité notamment », ajoutent les auteurs du rapport. Les villes, encore plus Particulièrement fragilisée face au phénomène, la population urbaine mondiale souffrant du manque d'eau devrait doubler en passant de 930 millions en 2016 à 1,7 – 2,4 milliards de personnes en 2050, prévoit le rapport onusien. Mais les êtres humains ne sont pas pour autant les seules « victimes » des sécheresses extrêmes et prolongées. Ces dernières ont également un impact croissant sur les écosystèmes. « Elles entraînent des conséquences désastreuses pour les espèces végétales et animales », alerte les auteurs du rapport. Une situation particulièrement inquiétante qui nécessite une intervention en urgence afin d'en limiter les retombées à court et à long termes comme l'affirment les experts. « Il est urgent d'établir de solides mécanismes internationaux pour éviter que la crise mondiale de l'eau ne devienne incontrôlable. L'eau est notre avenir commun et il est essentiel d'agir ensemble pour la partager équitablement et la gérer durablement », déclare Audrey Azoulay, Directrice générale de l'UNESCO. De son côté Gilbert F. Houngbo, Président d'ONU-Eau et Directeur général de l'Organisation internationale du Travail (OIT), insiste sur l'imminence du danger. « Il y a beaucoup à faire et le temps ne joue pas en notre faveur. Ce rapport démontre notre ambition et nous devons à présent nous rassembler et intensifier l'action. C'est le moment pour nous de faire la différence », souligne-t-il. Pistes Appelant à renforcer la coopération internationale en matière d'utilisation et de gestion de l'eau, l'ONU estime que c'est là le seul moyen d'éviter une crise mondiale de l'eau dans les décennies à venir. Usage de systèmes d'irrigation partagés par les agriculteurs, approvisionnement en eau potable à un coût abordable dans les villes et les zones rurales via une gestion commune des systèmes d'assainissement et d'approvisionnement en eau, coopération entre communautés urbaines et rurales, lutte contre la pollution et l'enrichissement de la biodiversité, partage de données, d'informations et de cofinancement... sont autant de pistes indiquées par les différents intervenants pour affronter la crise imminente et limiter son impact. En Afrique L'un des continents les plus exposés au stresse hydrique, l'Afrique est également l'un des plus touchés par les problèmes de gestion de l'eau. D'après les données de l'Unicef, près de 418 millions de personnes en Afrique n'ont toujours pas accès à un service d'eau potable de base. Quelques 779 millions ne disposent toujours pas de services d'assainissement, dont 208 millions qui pratiquent encore la défécation à l'air libre et 839 millions ne possèdent pas de services d'hygiène. Le rapport «Etat du climat en Afrique 2021» note que le stress hydrique marqué qui sévit sur le continent touche environ 250 millions de personnes. Quatre pays africains sur cinq ne disposent pas de ressources en eau gérées de manière durable d'ici à 2030, ajoute le rapport. Au Maroc Le Maroc n'y échappe pas et figure parmi les pays africains les plus touchés par le stress hydrique. Le Royaume a en effet souffert de déficits pluviométriques annuels répétitifs et dont les impacts se sont cumulés. Résultat ? Réduction du volume d'eau dans les barrages et assèchement des nappes phréatiques. Entre 1960 et 2020, la disponibilité des ressources en eau renouvelables a diminué de 2.560 m3 à environ 620 m3 par personne et par an. Le Maroc se retrouve ainsi dans une situation de « stress hydrique structurel », comme l'indique la Banque mondiale.