Benjamin Netanyahu a péché par orgueil. Il a eu une très mauvaise interprétation des accords d'Abraham. Il a voulu en tirer les dividendes politiques, ce qui est normal, mais il a crû que son slogan « la paix contre la paix, pas contre les territoires » était partagé par les pays arabes signataires. Ceux-ci ont une opinion publique, quoi que l'on en dise, et sont obligés d'en tenir compte. Les accords d'Abraham supposaient un effort économique et social en faveur des populations palestiniennes, en particulier la jeunesse, qui devrait préparer le terrain à une solution politique, que les accords ne fixent pas. Benjamin Netanyahu a monté une coalition qui lui a permis de remporter les élections. Sauf que c'est l'extrême droite qui mène la danse, qui multiplie les provocations, qui jette de l'huile sur le feu. Son projet de réforme judiciaire divise la société israélienne de manière brutale. Si la justice est mise sous-tutelle politique, alors la démocratie israélienne censée être une exception dans la région, n'est plus qu'un mirage. Enfin le Premier Ministre israélien a crû que Joe Biden allait céder face aux pressions droitières. Il n'en est rien! Dans l'Administration américaine, des responsables et pas des moindres comme Jake Sullivan, Antony Blinken, Robert Malley ou encore Bill Burns étaient déjà là lors des deux mandats OBAMA. Ils connaissent très bien les enjeux, les dossiers de la région. Ils ne peuvent pas cautionner les nouvelles implantations coloniales, les expéditions punitives, en sachant que cela éradique tout espoir d'une solution au conflit israélo-palestinien. C'est dans ce contexte que la reprise des relations diplomatiques entre l'Iran et l'Arabie Saoudite intervient. D'abord, il est faux de croire qu'à Washington on n'avait pas vu le coup venir. Dans cette région du golfe Persique, les intérêts américains et les intérêts chinois sont assez similaires. Ils veulent tous les deux que l'énergie s'écoule de cette région, une région paisible et stable qui permet aux deux pays, surtout la Chine d'écouler ses marchandises. Israël de Netanyahu a crû que l'ennemi commun, l'Iran, suffisait à lui seul de rallier des monarchies du Golfe. Or l'Arabie Saoudite estime qu'elle n'a pas été assez soutenue dans la guerre du Yémen, alors même que son territoire a été attaqué et les autres savent qu'en cas de conflit, ils paieront le prix fort. Tenter une désescalade est de la part de ces pays une attitude raisonnable. L'intervention de la Chine pose problème. L'empire du silence pose pour la première fois pied au Moyen-Orient. Ce n'est pas du tout anecdotique, parce que la Chine est déjà très présente économiquement dans la région. Il ne faut pas se fier aux déclarations d'intention. Mais en même temps, il faut comprendre que, qui dit monde multipolaire, dit recherche de diversification des partenariats et que les pays sunnites n'avaient aucun intérêt à se lier à l'agenda israélien, en tous cas tant défini par Bibi.