Un constat peu réjouissant est fait par l'Association de lutte contre le sida (ALCS) en cette journée mondiale de la femme, fêtée chaque 8 mars. D'après l'association, la féminisation galopante de l'épidémie mine les efforts et les progrès réalisés dans cette lutte acharnée contre le Sida au Maroc et ailleurs. Une situation qui risque fort de compromettre l'objectif d'éradication définitive fixé d'ici 2030, comme le soutient l'ALCS. Féminisation du Sida « Une féminisation accentuée par les inégalités de genre encore persistantes, plus de 40 ans après le début de l'épidémie», ajoute la même source. Des propos qui sont d'ailleurs confirmés par les derniers chiffres du ministère de la Santé et de la protection sociale au Maroc. Ainsi 49% des personnes vivant avec le VIH au Maroc en 2021 sont des femmes, contre seulement 18% en 1990. Le même phénomène est observé en Afrique, notamment en région subsaharienne, où les femmes et les filles représentent 63% des toutes les nouvelles infections au VIH en 2021. Nullement limitée au continent africain, cette féminisation de l'épidémie est observée à l'échelle mondiale. Environ 4 900 jeunes femmes (15 - 24 ans) sont infectées par le VIH/sida chaque semaine. Une situation qui fait de ce virus la première cause de mortalité des femmes et des filles âgées de 15 à 49 ans. Fustigeant les inégalités hommes femmes persistantes au Maroc, l'ALCS estiment que ces dernières rendent les femmes marocaines « particulièrement vulnérables à l'infection au VIH ». « L'indice d'inégalité de genre, estimé à 0.425 en 2021, démontre la persistance des normes de genre inégales qui rendent les femmes et les filles marocaines plus vulnérables au risque d'infection par le VIH, en étouffant leurs voix et en entravant leur accès à l'éducation et aux ressources économiques», s'indigne-t-on auprès de l'ONG. Fragilité Poussant son argumentaire plus loin, l'association qui œuvre depuis 35 auprès des porteurs du virus, affirme que 70% des femmes infectées, l'ont été par leurs conjoints. Un chiffre qui confirme le lien de causalité entre la vulnérabilité socio-économique des femmes et leur vulnérabilité vis-à-vis du virus. « La vulnérabilité socioéconomique des femmes réduit leur autonomie économique et psychologique par rapport à leurs partenaires et constitue un frein important à l'adoption de comportements de prévention», explique-t-on auprès de l'ALCS. Une situation fragilisante qui augmente considérablement le risque de contracter le VIH lors d'un rapport hétérosexuel non protégé. Selon l'ALCS ce risque est 2 à 4 fois supérieur pour les femmes que pour les hommes. Double violence L'ONG revient à la charge en insistant également sur le lien entre les violences fondées sur le genre et l'infection au VIH. « Selon les données de l'ONUSIDA, les violences exercées par un partenaire intime augmentent jusqu'à 50 % le risque de contamination au VIH chez les femmes », cite l'ALCS. Au niveau national, l'association rappelle les chiffres de l'enquête sur la violence contre les femmes et les hommes, réalisée en 2019 par le Haut-commissariat au plan (HCP). « La prévalence de la violence à l'égard des femmes était de 57.1% tandis que les violences sexuelles ont augmenté de 5 points entre 2009 et 2019, passant de 9% à 14% », note l'ALCS. Pour conclure, cette dernière rappelle qu'en plus d'être une nécessité éthique, l'égalité entre les genres et la lutte contre la discrimination et la stigmatisation représentent un « défi crucial de santé publique » et un moyen « de lutte conte les épidémies ».