Le projet de loi de Finances 2022 (PLF), adopté en conseil de gouvernement lundi dernier et déposé au parlement divise les économistes. « Le PLF 2022 est une reprise du plan de relance décidé par le comité de veille économique et l'ancienne équipe gouvernementale. Toutefois, on relève certaines insuffisances notamment concernant cette réforme fiscale tant attendue et promise, et l'amélioration du pouvoir des ménages essentiellement issus de la classe moyenne », analyse le fiscaliste Mohamed Rahj. De son côté l'économiste Mehdi El Fakir juge que c'est un budget résilient qui table sur une loi de finances plutôt pragmatique prenant en considération le contexte actuel et l'urgence d'agir. «Le gouvernement n'a pas souhaité perdre du temps. il voulait absolument déposer le projet dans les délais prévus alors que la pratique durant les dernières années a démontré que lors de la nomination de l'exécutif, on sacrifie ce projet et on le reporte au détriment de l'équilibre politique », ajoute t-il. Le PLF, qui table sur des recettes de 460,51 milliards de DH (MMDH)contre des dépenses de 519,20 MMDH compte de nouvelles mesures en faveur des entreprises à travers un accompagnement et des facilités de crédit décidées dans le cadre du plan Mohammed VI d'un montant de 120MMDH. il sera décidé aussi d'accorder une priorité aux entreprises nationales dans les marchés publics en fonction de leur taille avec un budget d'investissement de 245 MMDH, un montant qui dépasse largement ce qui a été prévu lors des cinq dernières années qui va permettre, selon Rahj, à plusieurs secteurs de relancer leurs activités après la crise pandémique et va avoir un impact considérable en matière de création d'emplois puisque le gouvernement prévoit la création de plus de 26.000 postes budgétaires pour 2022 contre 20.000 auparavant. De nouvelles taxes Sur le plan fiscal, de nouvelles mesures sont également prévues, il s'agit notamment d'une nouvelle contribution sociale de solidarité sur les bénéfices pour les entreprises réalisant un bénéfice net supérieur ou égal à un million de DH qui « servira à soutenir les ressources financières et contribuer à la solidarité nationale notamment dans ce contexte de crise, indique la note de présentation du PLF. Le projet prévoit de réduire le taux d'imposition minimum applicable aux sociétés et à l'impôt sur le revenu de 0,50 à 0,45%, pour les établissements qui déclarent un résultat net positif, hors amortissement. «A travers cette mesure, le gouvernement veut encourager les entreprises en améliorant leur compétitivité au Maroc et à l'international », explique Mohamed Rahj qui évoque également la réduction de l'impôt sur les sociétés (IS) pour les petites entreprises du secteur industriel dont le bénéfice net est inférieur à 100 millions de DH à 27%. On note aussi une révision à la hausse de la TIC sur le tabac et sur les e-liquides des cigarettes électroniques. Des mesures qui fâchent Parmi les mesures qui inquiètent les consommateurs, l'application d'une TIC dite écologique ou de recyclage sur un certain nombre de produits électroniques qui présentent au terme de leur cycle d'utilisation un risque de pollution en fin de vie. Cette taxe s'appliquera dans un premier temps aux téléviseurs, aux batteries pour véhicules, aux téléphones portables, aux ordinateurs et aux tablettes. La liste des articles et appareils soumis à cette taxe sera complétée au fur et à mesure des concertations menées avec les départements ministériels et les opérateurs économiques concernés. Le projet de Budget 2022 propose par ailleurs l'instauration d'une TIC sur les produits et équipements énergivores. «Au moment où le gouvernement annonce son intention de consolider la classe moyenne et l'accompagner, ces mesures indiquent plutôt le contraire. Ce genre de mesures augmente la charge sur cette catégorie. En contrepartie, il n'y a aucune proposition d'amélioration de son pouvoir d'achat qui a été impacté durement lors de cette pandémie", déplore Rahj. Mehdi El Fakir reconnait de son côté que ces mesures portent atteinte au pouvoir d'achat de la classe moyenne, mais il insiste sur le caractère de contextualisation et de manque de temps. «Ce projet table sur le long terme et essaie plus d'apporter une réponse aux équilibres macro-économiques ce qui rend la marge de manœuvre quasi nulle pour adopter des mesures audacieuses, surtout avec déficit inquiétant de plus de 5% », conclut t-il