lobservateur.ma: Ramtan Lamara a fait des déclarations hostiles au Maroc lors de la conférence des Non-Alignés et a reçu une réponse inédite du représentant du Maroc Omar Hilal. Ferhat Mhenni: Le régime algérien cultive une hostilité irrationnelle à l'encontre du Maroc depuis 1962. C'est là, l'expression d'une totale ingratitude quand on connait toute l'aide apportée par le Maroc au FLN durant la guerre dite « d'indépendance » de 1954 à 1962. Je remarque que ce régime cultive la même haine envers la Kabylie qui, pourtant, a été le fer de lance de l'indépendance de l'Algérie pour laquelle le peuple kabyle avait payé le prix le plus fort par rapport au reste du pays. Le régime algérien est un pouvoir fantoche. Il n'a pas de légitimité historique. C'est un usurpateur de l'Armée de Libération Nationale des années 50. Il gouverne par la force des armes et non par la volonté des peuples sur lesquels il exerce sa dictature et au nom desquels il agit et s'exprime indument à l'intérieur comme à l'extérieur. Certains soutiens internationaux lui ont fait croire qu'il bénéficie d'une impunité internationale pouvant lui permettre d'asseoir son hégémonie de « moyenne puissance » sur la région de l'Afrique du Nord et du Sahel. C'est là que réside l'origine de son implication dans la création, l'organisation, l'encadrement et le soutien financier du Polisario. Il s'est mis dans un engrenage dans lequel il voudrait coute que coute sortir vainqueur, quitte à occasionner à l'ensemble nord-africain instabilité chronique et retard économique monstre sur le reste d'autres région du monde. A l'irresponsabilité de ses généraux correspond celle de ses porte-voix comme M. Lamamra. Si ce dernier a fait dans la provocation diplomatique contre le Maroc, c'est parce qu'il en a reçu l'ordre d'un Ministère de la Défense déboussolé et sans autre stratégie que celle d'empêcher le décollage économique régional. La réponse de Son Excellence Monsieur l'ambassadeur du Maroc a été cinglante. En évoquant contre l'Algérie l'argument du droit des peuples à l'autodétermination en faveur « du seul peuple d'Afrique du Nord qui le mérite, en l'occurrence le peuple kabyle », M Hilale a mis le régime algérien face à ses mensonges et ses contradictions. Le soutien ainsi apporté par le royaume chérifien au peuple kabyle pour son droit à disposer de lui-même ouvre une nouvelle page d'histoire de toute la région nord-africaine dans le sens de son intégration cohérente et solidaire. Au nom des miens, je renouvelle notre reconnaissance pour ce geste historique qui marque un tournant décisif pour le peuple kabyle. La Kabylie libre écrira en lettres d'or le nom de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et celui du grand peuple frère marocain pour avoir été les premiers à nous reconnaître notre droit légitime à un foyer national sur la terre de nos ancêtres. Que pensez-vous des échecs répétés de la diplomatie militaire algérienne face à la récupération du Sahara par le Maroc ? Un combat injuste est souvent voué à l'échec quels que soient les moyens mis en œuvre pour le gagner. Avec le recul que nous avons sur ces 45 ans d'un interminable conflit dont on pouvait faire l'économie et qui aurait pu trouver dès le départ une solution diplomatique, je pense surtout au sang et aux larmes que l'Algérie a fait couler des deux côtés de la frontière entre les deux pays. Je pense aussi à tous les milliards de dollars engloutis dans une guerre inutile et qui a ruiné l'Algérie au point que de nos jours on n'y trouve ni eau, ni lait, ni huile, ni moyens de lutter contre la flambée de la covid 19. L'argent que l'Algérie a investi dans cette guerre a été aussi prélevé sur les impôts extorqués à la Kabylie. Qu'est-ce que cet événement représente pour la cause kabyle ? Cette déclaration reconnaissant au peuple kabyle le droit à son autodétermination et faite devant une instance internationale comme le Mouvement des Non-Alignés est historique et d'une importance capitale pour l'avenir du sous-continent. Elle répare une injustice de plus de 164 ans. Elle est le fruit de vingt ans d'efforts pacifiques et diplomatiques ininterrompus, sans moyens autres que ceux de nos convictions et de notre constance dans notre démarche. Elle ouvre la voie à une salutaire reconfiguration géopolitique locale. C'est là, une étape importante de franchie par le peuple kabyle sur le chemin de sa volonté de vivre debout. Qu'attendez-vous du Maroc ? Le Maroc vient de faire acte de responsabilité et de sagesse. Nous ne le remercierons jamais assez pour ce qu'il vient de nous reconnaître. Je réitère aimablement et fraternellement notre demande d'ouverture officielle d'un Bureau d'information du Mouvement pour l'Autodétermination de la Kabylie et de l'Anavad. Nous n'avons pas le droit de laisser le royaume du Maroc comme seul pays reconnaissant la légitimité du peuple kabyle à une existence internationale. Nous avons besoin d'acquérir un statut de membre observateur au sein de l'Union Africaine, en attendant un siège en tant que membre à part entière pour la Kabylie. Comment voyez-vous la présence du Polisario dans l'union africaine ? Le Polisario dans l'Union Africaine est avant tout un instrument de la diplomatie militaire algérienne pour combattre le Maroc. Son "président" qui est entré en Espagne avec un faux passeport a créé une crise entre le Maroc et l'Espagne. Quelle est votre lecture de ce cas? Ce scandale a mis à nu le véritable rôle de l'Algérie au Sahara. L'affaire de Brahim Ghali a révélé au monde entier que la guerre qui s'y déroule n'est autre que celle des militaires algériens par Polisario interposé. Suite à cette crise les ministres des Affaires étrangères d'Espagne et d'Algérie ont été changés. Comment doit-on interpréter ces deux changements ? J'espère qu'en Espagne, le changement de ministre des affaires étrangères est synonyme de correction d'une ligne et d'une vision en faveur d'un apaisement de ses relations avec Rabat. En revanche, en Algérie, Lamamra n'est pas revenu pour réajuster une ligne diplomatique mais pour dire au Maroc qu'il n'a aucun assouplissement à attendre de la part d'Alger face à lui. La Kabylie n'a pas voté aux dernières élections, quelle signification donner à cet événement? Cela fait trois scrutins successifs cruciaux pour les institutions algériennes que le peuple kabyle boycotte à 100% en 18 mois. Il signifie à l'Algérie qu'il n'en fait pas partie. Il ne se reconnait ni dans le président, ni dans la constitution, ni dans le parlement algérien. La Kabylie est kabyle, C'est à la fois son message et sa manière de résister contre la domination coloniale dont il cherche à se libérer. Une dernière chose, comme nous sommes à la veille de l'Aïd El Kebir, permettez-moi, à cette occasion de souhaiter à Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Commandeur des Croyants, santé et grandeur, Je salue chaleureusement le grand peuple frère du Maroc dont le soutien nous est si précieux.