Même si l'élection américaine n'est pas jouée, les mauvaises nouvelles se multiplient pour John Mc Cain. A deux semaines du scrutin du 4 novembre, l'annonce du soutien de l'ancien secrétaire d'Etat républicain, le général Colin Powell à Barack Obama constitue un coup dur dont il se serait bien passé. Il y a plusieurs raisons à cela. A commencer par la symbolique qui voit un des piliers de l'administration Bush se rallier au candidat démocrate. Le soutien de ce général quatre étoiles au candidat Obama est ensuite fort habile. Dans un pays où le besoin de changement est immense après la catastrophique présidence Bush, Powell a loué le bouleversement politique et générationnel que représenterait une victoire d'Obama. «Je pense que ce serait un président réformateur. Pour cette raison, je vais voter pour Barack Obama (qui) remplit les critères pour diriger le pays en raison de sa capacité à inspirer confiance, du caractère fédérateur de sa campagne, et parce qu'il tend la main à toute l'Amérique», a déclaré Colin Powell en ajoutant : «McCain serait assez bon (...) mais je pense que nous avons besoin d'un changement de génération». L'autre habileté de l'ex-secrétaire d'Etat de George W.Bush -qui fut le premier noir à occuper la fonction de chef d'état-major des armées américaines, pendant la première guerre du Golfe, en 1991- aura été d'enlever tout aspect communautaire à son appui à Barack Obama. « En cas de victoire, tous les Américains devraient être fiers, pas seulement les Afro-Américains. Cela provoquerait l'enthousiasme du pays et du monde », a-t-il affirmé. Une profession de foi faite pour marquer une population qui a perdu confiance en la toute puissance de l'Amérique face à l'ampleur de la crise économique et financière et à l'enlisement de ses boys en Irak et en Afghanistan. Ultime gain, et pas des moindres, pour Barack Obama : le certificat de compétence que lui délivre un homme dont le nom reste, certes, attaché au lancement de la guerre contre l'Irak mais qui s'est toujours démarqué des « faucons » du Pentagone et passe pour un diplomate de talent et d'expérience. «On a vu d'autres personnes arriver au plus haut niveau sans avoir une large expérience. Il suffit de savoir s'entourer de gens expérimentés ( ) Le sénateur Obama a fait la démonstration de ses capacités à résoudre les problèmes de manière calme, patiente, intellectuelle, et c'est ce dont nous avons besoin», a affirmé Colin Powell qui, en dépit de son appui à la guerre en Irak, est toujours perçu favorablement par les trois quart des Américains. Et qui prend sans doute aussi une revanche sur son propre camp et ses faucons auxquels il doit la seule «tâche» de sa carrière : avoir soutenu devant l'ONU que Saddam Hussein avait un arsenal nucléaire alors qu'il n'en était pas lui-même vraiment convaincu. L'inconnue de l'Amérique profonde Après un tel soutien, il sera évidemment plus difficile à Mc Cain de soutenir que son rival démocrate n'est pas qualifié pour être le «commandant en chef» du pays. John Mc Cain en est conscient et a compris qu'il y aurait plus à perdre qu'à gagner à attaquer un Powell considéré en outre comme relativement progressiste sur le plan social. «J'ai toujours admiré et respecté le général Powell. Nous sommes amis de longue date. Ce n'est pas une surprise», a du coup réagi le candidat républicain. De là à penser que rien ne peut plus inverser le cours d'une campagne favorable à Barack Obama, il y a un pas difficile à franchir. Une évènement ou une crise internationale majeure peuvent mettre le candidat démocrate en difficulté en dépit du brevet de compétence délivré par Colin Powell. D'autant que deux inconnues demeurent : le vote des indépendants et la réaction des « petits blancs » d'une Amérique profonde et frileuse face au bouleversement supposé lié à un premier président noir.