Des affrontements à Dakhla ont émaillé le Festival Mer et désert. Notre envoyé spécial y a assisté. Témoignage. Dakhla, vendredi 25 février à 1h du matin. Le Festival mer et désert, qui en est à sa cinquième édition, se déroule dans le calme, malgré la présence de plus de 50 000 personnes venues de la ville mais également des villes et villages avoisinants. L'ambiance est bon enfant. On danse, on chante. Bref, on fait la fête comme ce fut le cas lors des précédentes éditions. Le spectacle terminé, on rentre chez soi dans la bonne humeur.Il est 3h30 soudainement on entend un fracas, un tumulte inouï dont on ne connaît pas l'origine. Plus tard, on apprendra qu'il s'agit d'affrontements entre deux clans rivaux. Se rendant le lendemain sur les lieux, les journalistes et autres invités n'en reviennent pas. La question qui revenait sur toutes les lèvres et surtout des habitués, de séjour à Dakhla parmi eux nombreux journalistes étrangers, était de savoir comment cette ville si paisible devenait soudainement le théâtre d'une rare violence. L'origine du mal A l'origine de ces affrontements, des habitants de «Wakala», un quartier populaire de la ville où logent des milliers de citoyens issus de différentes régions du royaume, du Nord, de Beni Mellal, d'Agadir, de Marrakech, etc. Loin du centre ville, les affrontements perdurent. Durant le matin du samedi, il y aurait eu un mort. Un témoin sur place nous commente la scène: «Un habitant du quartier Wakala est entré dans le domicile d'un Sahraoui au quartier Oum Tounssi. Il a frappé les femmes et quand le mari est arrivé, il l'a égorgé». Depuis, la violence a été le maître-mot pendant toute la journée de ce samedi noir. Les débordements gagnent alors du terrain. Sur leur route, les casseurs n'épargnent rien. Agences bancaires, commerces, et voitures sont pillés, saccagés, brûlés. Même la wilaya est dans le collimateur des émeutiers qui cassent porte principale et vitres. Bonbonnes de gaz, marteaux, sabres et pierres étaient leurs armes de destruction massive. Vers minuit, le wali de la région Oued Eddahab Lagouira, Hamid Chabar, tient une conférence. Visiblement furieux, il n'y va pas par quatre chemins : «Ces affrontements, insiste-t-il, ont été instrumentalisés par des séparatistes. Dans un souci de sécurité, nous avons décidé d'annuler le Festival mer et désert et avons fait appel aux forces armées royales».A la question de savoir si la question n'aurait pas pu être maîtrisée dans la nuit du vendredi, M. Chabar nous répond: «Nous étions surpris par la tournure des événements». Le plus effrayant, c'était l'étendue géographique des conflits. Alors que, samedi, seulement trois quartiers étaient sous les feux de la rampe, on en recensait une dizaine le lendemain. Kssikissat, Salam, Hassani, Al Masjid, Oum tounssi, Al Wahda 1 et 2, Al ghofrane…, ont rejoint le flot des quartiers affectés par la violence et le vandalisme. L'armée à la rescousse Dimanche soir, alors que Alpha Blondy chauffait le bivouac le temps d'un concert, des milliers de soldats ont mis le siège dans la caserne de Dakhla. Ils ont formé une ceinture humaine pour éviter d'éventuels affrontements. Ils se sont interposés entre les différents clans et ont réussi à maîtriser les heurts en utilisant notamment des bombes lacrymogènes. «Nous sommes habitués à ce genre de heurts. L'appareil sécuritaire est défaillant. La ville connaît une évolution sans précédent. Face à pareille ascension démographique (120 naissances par mois au niveau du centre médical Hassan II pour les Dakhils), les choses deviennent de plus en plus difficiles!», commente un responsable de la région qui a requis l'anonymat. Face aux efforts de la wilaya à maîtriser ces tensions qui ne datent pas d'aujourd'hui, une démission collective des élus et conseillers de la région a été brandie, notamment le vice-président du Conseil régional qui menace de démissionner. Décidément, ça n'en finit pas ! DNES à Dakhla, Mohamed Amine Hafidi