Les syndicats représentant les transporteurs et les employés du secteur qualifient l'application du code de la route de coup de massue contre les professionnels. Ils agitent la menace de grève. D'après les statistiques, le nombre de morts sur nos routes a augmenté. La colère que suscite le code de la route auprès des transporteurs n'est toujours pas apaisée. Tout au contraire, elle s'est largement attisée à la suite des deux accidents meurtriers survenus, au début de ce mois, à Essaouira et à Nador et dans lesquelles une vingtaine de vies ont été fauchées. « Les chauffeurs sont toujours tenus pour responsables de ces hécatombes alors qu'ils en sont, parfois, eux-mêmes victimes (...) En exemple, l'accident de l'autocar à Essaouira est dû à une collision provoquée par une voiture qui a dévié de sa trajectoire. L'autocar s'est renversé et le chauffeur, lui aussi blessé, a été condamné à trois mois de prison ? Mais de quoi est-il coupable ? », s'interrogent les professionnels, invités par le groupe parlementaire de l'Istiqlal à une rencontre sur « Le code de la route : bilan et perspectives », organisée le mardi 17 juillet à la Chambre des représentants. Plus de morts Un an et demi après sa mise en application, le nouveau code de la route ne semble pas avoir abouti à son principal but : limiter l'hécatombe. D'après les statistiques, présentées à l'occasion, par le ministère de l'Equipement et du transport, le nombre de morts sur nos autoroutes a augmenté de 17,6 % en 2011 par rapport à 2010 à l'intérieur de la zone urbaine. Pourtant, en 2010, le lancement de l'application du code avait réussi à inverser cette tendance en raison, selon le ministère, de « l'état d'esprit » suscité par ce code dès les premières prémices de son entrée en vigueur. La polémique autour des sanctions avait suscité, d'après les participants, une crainte générale ayant « contraint » les usagers au respect du code. Du coup, c'est une baisse de 1,1 % qui a été enregistrée en ce qui concerne les décès. Au fil du temps, c'est le dicton « chassez le naturel, il revient au galop » qui a fini par arriver. Et pour cause, le dispositif nécessaire à la surveillance des autoroutes a accusé du retard. Retard de dispositif D'ailleurs, le ministère de tutelle le reconnaît en précisant que « la surveillance a été gelée » durant la période allant d'octobre 2010 à mars 2011. A présent, c'est une accélération de la mise en place des automatismes nécessaires que promet le ministère en annonçant, entre autres, le lancement prochain d'une offre pour trouver une société chargée de gérer les infractions enregistrées par les mécanismes de surveillance. Et à propos de ces derniers, ce sont 990 radars fixes, 120 appareils de surveillance des infractions du feu rouge dans les carrefours et 10 autres de mesure de la vitesse moyenne. Pour les professionnels, la mise en place du code de la route s'assimile finalement à l'image de la charrue devant les bœufs. « Cet aspect urgentiste qu'a pris l'application de ce code y est pour beaucoup dans ce bilan négatif que nous constatons aujourd'hui », estime le président de la Fédération nationale des syndicats des transports routiers de voyageurs (FNSTR), Abbas El Khalloufi. Et de préciser que ce sont toujours les transporteurs et les chauffeurs qui en paient le prix fort. « Les amendes dépassent de loin le salaire même des chauffeurs qui se retrouvent facilement en prison dès qu'une personne présente un certificat médical de 21 jours », s'insurge-t-il, soulignant que le retrait du permis et de la carte grise d'un chauffeur signifie le chômage et donc des drames sociaux. « Il faut trouver des solutions et non croire que nous résoudrons les problèmes par d'autres », tient-il à faire remarquer. Chauffeur et responsabilité Les professionnels décrivent une souffrance quotidienne et dénoncent des harcèlements au nom du code de la route, et plus précisément de l'article 167 de ce texte. «La mise en place très timide du dispositif mécanique a tout simplement provoqué des dysfonctionnements dans le système de surveillance. Alors qu'il était question de mettre fin à l'intervention humaine, le fléau de la corruption et du clientélisme a connu une recrudescence depuis le lancement du côté répressif du code », estime Hamid Zhar, conseiller auprès de la Fédération du transport. Alors, ce que revendiquent ces professionnels n'est autre que d'appliquer le code en entier et ne pas se limiter à la partie des sanctions, mais aussi de soumettre les accidents à des diagnostics plus rigoureux afin de définir les « vrais responsables » et de trouver des alternatives pour éviter aux chauffeurs la perte de leur gagne-pain en cas de retrait de leur permis.