En marge de la conférence-débat organisée par la commission des affaires économiques pour la préparation du 16e congrès de l'Istiqlal, le Soir échos a rencontré Nizar Baraka, ministre de l'Economie et des finances, qui revient sur la situation critique de l'économie marocaine et dément avoir décidé de lever 1 milliard de dollars. Pour Nizar Baraka, l'économie marocaine a montré une résilience les dernières années, mais la situation actuelle demeure très inquiétante à cause notamment des importations énergétiques. La situation actuelle de l'économie marocaine est alarmante, à quoi cela est-il dû et quelles sont les solutions pour sortir de cette crise ? Je tiens à rappeler que l'économie marocaine a connu une croissance soutenue ces dernières années. Malgré la crise mondiale, le Maroc a pu y faire face grâce à la résilience de son économie. Laissez-moi vous donner quelques exemples. Alors que le taux de croissance de l'économie nationale avoisinait les 3,8 % entre 1999 et 2005, il est arrivé à 4,9 % entre 2006 et 2011 et le revenu par citoyen a cru de 4 % par an. Les investissements publics, pour leur part, ont augmenté de façon considérable. En 2003, ils étaient de 64 milliards de dirhams, en 2012, il ont dépassé les 180 milliards. L'endettement extérieur reste maîtrisé. Il était de 70 %, maintenant il avoisine 53 % du PIB. Le taux de chômage a été de 15 %, maintenant il est de 8,9 %. Donc, nous avons plusieurs acquis mais plusieurs défis et contraintesexistent. Tout d'abord, les exportations évoluent, mais moins que les importations. Le déficit commercial bat des records actuellement, et c'est inquiétant. Ceci, tout en sachant que les importations énergétiques et celles du blé constituent les 2/3 du déficit. D'ailleurs, 76 % de nos besoins énergétiques sont importés. Secundo, la crise mondiale a eu un impact négatif sur les IDE qui ont baissé de 25 % l'année dernière et de 8 % cette année. Il faut s'attendre cette année à des baisses au niveau des recettes touristiques et des transferts des MRE. En Espagne, par exemple, 46 % des Marocains sont au chômage. Le déficit budgétaire a atteint 6 % du PIB l'année dernière, et le déficit de la balance des paiement a atteint 7,9 %. Ceci-dit, il faut continuer à soutenir la demande interne et il faut qu'on continue à renforcer les investissements publics. Ce dernier point a d'ailleurs été pris en compte dans le cadre de la loi de Finances 2012. En même temps, il faut cibler les politiques sectorielles afin d'améliorer les retombées socio-économiques des dépenses de l'Etat. À titre d'exemple, un point de croissance générait 35 000 opportunités d'emplois, maintenant il n'en créé que 29 000. Donc la marge de manœuvre de l'Etat est très réduite actuellement. Une levée à l'international est donc une solution éventuelle pour parer à cette crise ? Il est tout à fait normal que l'Etat, dans la situation actuelle, pense à cette possibilité mais nous n'avons pas encore arrêté de décision. Ce qu'il faut prendre en compte, en recourant à ce genre de solutions, c'est que nous devons préserver notre souveraineté économique et politique et qu'on ne doit pas nous dicter ce que nous devons faire. Confirmez-vous l'information qui a été relayée par certains supports de presse, selon laquelle vous allez recourir à un emprunt de 1 milliard de dollars à fin 2012 ? Je tiens à dire que l'information parue dans la presse est fausse. Aujourd'hui, on ne parle ni d'euro ni de dollar. Evidemment le Maroc est toujours en train, et ce qui est normal, de réfléchir sur le besoin de sortir sur le marché international, mais on choisira le moment, la manière et le mode de sortie. Pour l'instant, la décision n'a pas été prise et tous les montants qui sont sortis dans la presse sont des montants farfelus qui ne répondent à aucune véritable réflexion de notre part. Comment avancent les réformes à caractère social entreprises par le gouvernement ? Les réformes liées aux mécanismes de solidarité sont nécessaires pour le pays. Dans cette approche il sera nécessaire de tenir compte des contraintes qui s'imposent à nous, tout en veillant à respecter les engagements qui ont été pris par le gouvernement au niveau de sa dimension sociale. Je peux confirmer que ces projets de réformes avancent selon l'échéancier. D'ailleurs, qu'en est-il de la réforme des retraites ? Nous avons eu au niveau de la commission technique des réformes plusieurs réunions. D'ici le mois de juin, on aura une première ébauche qui sera présentée au conseil national, puis nous aurons la semaine prochaine une réunion du conseil d'administration de la CMR pour étudier la problématique de la caisse marocaine des retraites. Cette dernière, qui concerne les retraites des fonctionnaires, connaît une situation critique puisque nous allons entamer, à partir de la fin de cette année, la consommation de ses réserves et donc on rentrera dans une logique de déficit. Nous allons aussi faire un élargissement des bénéficiaires de la retraite car le taux de 30 % est très limité au Maroc. * Tweet * * *