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Cyber-activisme marocain : du clavier à la rue ! | Le Soir-echos
Publié dans Le Soir Echos le 02 - 05 - 2012

Les Rencontres d'Ibn Rochd se sont penchées sur les réseaux sociaux lors d'un atelier animé par Larbi El Hilali, l'un des premiers blogueurs marocains, devenu depuis ce que l'on appelle un cyber-activiste. Tout comme lui, plusieurs Marocains continuent d'utiliser le virtuel pour faire entendre leur voix.
Larbi El Hilali, créateur en 2004 de l'un des premiers blogs marocains, Larbi.org.
Si Internet a fait son entrée au Maroc à la fin des années 1990, ce n'est que récemment qu'il est devenu un outil de défense d'une cause. On parle alors de cyber-activisme. Lors du dernier « atelier de la pensée », organisé la semaine dernière à l'Institut Cervantès de Rabat, dans le cadre des Rencontres d'Ibn Rochd, les participants ont pu passer en revue les différentes étapes du cyber-activisme au Maroc. Tout a commencé en juillet 2007 avec le désormais célèbre « sniper de Targuist », qui filmait les gendarmes corrompus avant de les diffuser sur Youtube. Ainsi a commencé l'ère de ce que Driss Ksikes, l'un des instigateurs des Rencontres d'Ibn Rochd, qualifie de « délation positive ». Puis en 2008, tout le Maroc branché pouvait voir les images des émeutes de Sidi Ifni, filmées par les habitants. Mais c'est certainement l'affaire Fouad Mourtada, ce jeune homme qui avait créé un profil Facebook du prince Moulay Rachid, qui a eu le plus de retentissement sur la toile. La mobilisation nationale, puis internationale qui s'était faite avait permis en quelques jours de le faire sortir de prison. Alors qu'il avait été condamné à trois ans de prison ferme pour son acte, il est ressorti des geôles par une grâce royale. En 2008, on bascule vers la phase de mobilisation, où l'on quitte le clavier pour descendre dans la rue. La mobilisation est dès lors réelle ! Le virtuel ne devenant qu'un appui, un outil au poids certain. Les cyber-activistes viennent ainsi compléter les informations des médias traditionnels, parfois censurés ou auto-censurés.
Filmer, diffuser, dénoncer
Aujourd'hui, la tendance qui se profile est de rendre compte en temps réel de tel ou tel évènement, via le live blog ou le live tweet. Une information donnée instantanément, qui permet à la technologie d'ouvrir la porte de la « transparence 2.0 ». Entretien avec Larbi El Hilali, créateur en 2004 de l'un des premiers blogs marocains, Larbi.org
En 2004, vous avez été l'un des premiers marocains à créer son blog. Quel était votre objectif ?
Au départ, nous n'étions en effet que cinq personnes à tenir un blog au Maroc. Je l'ai créé sans objectif précis. J'allais raconter ma vie, et parler de temps en temps de politique. Par la force des choses, et avec les événements qui se sont succédés à partir de 2005, je me suis retrouvé à « bloguer » uniquement politique.
A quel moment avez-vous commencé le cyber-activisme ?
Au Maroc, nous n'avons véritablement commencé le cyber-activisme qu'en 2008. ça a été la première fois qu'on organisait de vraies manifestations, que l'on est passé du virtuel au réel.
Dès l'affaire Fouad Mourtada, j'ai dû écrire une trentaine d'articles pour médiatiser la mobilisation, jusqu'à ce qu'il sorte de prison. Cette mobilisation fut un véritable succès !
Vous considérez-vous comme un journaliste ?
J'ai beaucoup de respect pour le métier de journaliste. J'ai un métier, et cela me suffit. Par contre, j'ai un avantage par rapport aux journalistes, c'est que je peux être subjectif, et partial. Je l'assume dans mes écrits, je dis que ce n'est pas du journalisme. Après, au niveau de la mobilisation, il est vrai qu'il y a une complémentarité entre journalistes et cyber-activistes. Les journalistes ne peuvent pas se trouver partout, alors que les cyber-activistes, si. Ce n'est pas le même travail, mais ça permet aux journalistes d'avoir une matière. Après, charge à eux de creuser le sujet.
Souvent, après la forte mobilisation des cyber-activistes pour telle ou telle cause, comme l'affaire Amina Filali, on assiste un essoufflement de la mobilisation. Pour quelle raison ?
On remarque en effet que la mobilisation représente juste une séquence parmi d'autres. Pour Amina Filali, on a remarqué une émotion sincère de la part des gens. Mais il faut faire travailler son bon sens. A un moment, la mobilisation s'essouffle. Il faut savoir aussi qu'il y a une multitude d'affaires, plus ou moins médiatisées. On ne peut pas continuer à courir seul, il faut que d'autres personnes prennent le relais. Mais on remarque pourtant que ce sont les mêmes personnes qui restent mobilisées et motivées. Le cyber-activisme ne remplace donc pas les structures politiques. Il faut qu'il y ait en parallèle des organisations, et des outils institutionnels des organisations politiques. Ceux qui se sont dirigés vers le web l'ont fait par rejet de la classe politique existante. La demande est là, elle s'exprime et est exigeante. Charge aux autres de faire une meilleure offre. Mais je pense qu'un jour ou l'autre, il y aura une convergence entre les cyber-activistes et les politiques.


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