Le cinéma des Balkans, qui explore les nouvelles voies de la narration filmique, est un cinéma qui renaît de ses cendres. Et ce, des années après la partition de l'ex-Yougoslavie, après avoir été relégué à l'arrière-plan, puisque sa population a vécu une décennie noire, profondément marquée par des conflits armés. Aujourd'hui, on prête de l'importance à ce cinéma, qui figure avec le septième art mexicain et sud-coréen, parmi l'un des plus innovants. Un cinéma qui se décline en cinéma serbe, bosniaque, croate, slovène, macédonien et monténégrin. Le premier long-métrage de la comédienne et réalisatrice américaine Angelina Jolie, Au pays du sang et du miel, renvoie à une problématique et une thématique, souvent abordées à travers le cinéma et les pays aux prises avec la guerre : le viol. On sait que le viol est malheureusement un crime de guerre, plus proche de nous, les Lybiennes en ont été victimes, comme les Algériennes, esclaves sexuelles, au plus fort de la décennie noire ou les Péruviennes, durant la guerre civile. En témoigne,Fausta, le lait de la douleur, bouleversant film de Claudia Llosa sur le sujet. Sur le plan thématique, les dégâts de la guerre sur les corps et les esprits constituent un thème majeur. L'héroïne de Claudia Llosa est aux prises avec un étrange mal, qui lui a été transmis par sa mère : elle s'introduisait une pomme de terre dans le vagin, de peur d'être violée. Ce grave traumatisme hante la jeune femme tout au long de l'opus. Force est de constater, que la problématique des viols comme crime de guerre interpelle bien souvent des cinéastes femmes. Troubles et identités Fausta, le lait de la douleur, de Claudia Llosa, revient sur le poignant sujet du viol en temps de guerre au Pérou. Aussi, Au pays du sang et du miel, film signé par Angelina Jolie, hisse au haut de l'affiche la talentueuse comédienne bosniaque, Zana Marjanovic, qui vit depuis quelques années aux Etats-Unis. Elle en est l'actrice principale. Elle y incarne Ajla, femme musulmane emprisonnée dans un camp de travail. La réalisatrice, fortement engagée aux Nations Unies, et déjà impliquée dans de nombreuses causes humanitaires depuis plus de dix ans, s'est inspirée de faits historiques. Elle a ainsi entamé une quarantaine de voyages dans des pays en guerre, ou troublés par des catastrophes humanitaires. A l'image d'autres conflits récents, la guerre menée par les Serbes contre les musulmans bosniaques, fut le théâtre de véritables atrocités comme la purification ethnique, les camps de la mort, les massacres de civils, les viols des femmes. Ajla autrefois, peintre à Sarajevo, vit un double drame, celui de la guerre de Bosnie et celui d'aimer Danijel, un officier serbe : «Je suis ta prisonnière; Sommes-nous si horribles qu'il faille nous supprimer?; Pourquoi n'es-tu pas née serbe? ; Souviens-toi des bons moments qu'on a passés avant». Autant de mots pour dire les maux de ces deux âmes, qui se retrouvent en terre hostile et minée, au plus fort de la guerre d'ex-Yougoslavie. On se souvient notamment de l'interprétation magistrale de l'actrice Zana Marjanovic dans Snow premières neiges, réalisé par la cinéaste bosniaque Aïda Begic, l'histoire se situe en 1997, dans un village musulman de l'Est de la Bosnie. Aïda Begic, n'aurait pas été récompensée par le grand prix pour cette pure orfèvrerie lors d'un festival de film féminin au Maroc, car l'une des jurés, issue d'un pays ayant souffert du terrorisme désapprouvait le fait que la jeune cinéaste portait le voile durant cette semaine de festival. L'une des sources du festival avait confié plusieurs années plustard aux rares fidèles, journalistes et cinéastes, qu'avant la guerre, Aïda Begic, ne portait pas le voile, mais qu'à l'issue de la guerre, elle avait fait le choix de le porter. Des noms comme Aïda Begic, Mila Turijlic, ayant signé le documentaire Cinéma communiste, ou encore Damjan Kozole, auteur de Slovenian Girl , opus qui explore la prostitution estudiantine, s'alignent à présent, à côté de Kusturica, Paskalevic, Manchevsky et Zilnic.