En attendant les résultats définitifs, le PJD aspire à plus de 100 sièges au Parlement. Dans cet entretien, un des tout premiers après la grande victoire de son parti, Abdelilah Benkirane, le secrétaire général, s'exprime sur les résultats. Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du PJD, samedi après l'annonce des premiers résutats. Photo Yassine TOUMI Selon les chiffres disponibles, votre parti a gagné les élections avec 80 sièges au Parlement. Votre première réaction ? Nous attendons le chiffre final. Jusqu'à présent, les résultats qui ont été donnés sont partiels. Nous espérons dépasser les 100 sièges. Tous les partis politiques espèrent obtenir plus de sièges. Pour l'heure, nous sommes satisfaits, mais ne sommes convaincus que le nombre de sièges que nous avons obtenu est appelé à être revu à la hausse. Selon les chiffres disponibles, votre parti a gagné les élections avec 80 sièges au Parlement. Votre première réaction ? Nous attendons le chiffre final. Jusqu'à présent, les résultats qui ont été donnés sont partiels. Nous espérons dépasser les 100 sièges. Tous les partis politiques espèrent obtenir plus de sièges. Pour l'heure, nous sommes satisfaits, mais ne sommes convaincus que le nombre de sièges que nous avons obtenu est appelé à être revu à la hausse. Maintenant que le PJD est sorti vainqueur, comment envisagez-vous la composition du futur gouvernement ? Je pense que c'est encore tôt pour s'exprimer sur ce sujet. Nous attendons, d'abord, les résultats définitifs, ensuite la nomination du chef du gouvernement par Sa Majesté et enfin nous allons nous pencher sur la constitution du gouvernement. Ce sont là nos priorités du moment. « Le PAM a fixé des lignes rouges et nous étions une de celles-ci ». L'Istiqlal est classé deuxième. L'alliance avec ce parti est-elle envisagée ? Je n'ai cessée de le dire et depuis longtemps. Le PJD est ouvert à tous les partis politiques sauf le PAM pour des raisons que tout le monde connait. Au début, à la création du PAM nous étions positifs, mais ce parti n'a pas arrêté de nous attaquer. En 2009, nous avons, donc, changé d'avis et nous avons pris position une fois pour toutes et ce n'est pas aujourd'hui que cela va changer. Si nous constituons une majorité avec le PAM ce serait contradictoire avec nos propositions et nos principes que nous avons défendus et clarifiés vis-à-vis de l'opinion publique. Ainsi par respect au peuple marocain, nous allons rester fidèles à nos principes. Le PAM a fixé des lignes rouges et nous étions une de celles-ci. Résultat, le peuple lui-même l'a dénigré. Le PJD n'a-t-il pas de préférences quant à cette coalition que vous devez constituer ? Qu'en est-il de la Koutla ? Notre cœur est plutôt à gauche nous l'avons toujours affirmé. Mais il se peut que la gauche n'adhérera pas à nos propositions. Les Marocains divergent beaucoup en politique. Et on ne sait jamais ce qui peut se passer dans les coulisses. Le seul parti avec lequel nous n'allons pas nous allier c'est le PAM. Pour nous, il est exclu d'office. Nous restons ouverts à toutes les autres options. « Je pense que cela serait tout à fait naturel que je sois chef de gouvernement. ». Après les résultats des élections, la prochaine étape est la constitution du gouvernement. Vous voyez vous en tant que chef de gouvernement ? Je suis le secrétaire général du Parti vainqueur des élections. Je pense que cela serait tout à fait naturel que je sois chef de gouvernement. Sinon, dans le texte de la Constitution, il est écrit que le chef de gouvernement peut être n'importe quel dirigeant du parti. C'est à Sa Majesté que revient le choix de désigner parmi nous le futur chef du gouvernement. Aimeriez-vous être le chef du gouvernement. Qu'en pense les autres membres du Parti ? Oui. Pourquoi pas ? Concernant l'avis des membres du PJD, nous avons discuté de cela hier (ndlr : samedi 26 novembre) et tout le monde est d'accord : si jamais je suis nommé chef du gouvernement, ils n'y voient aucun inconvénient. Avant même l'annonce des résultats, certains milieux appréhendaient votre victoire et se sentent menacés dans leurs libertés individuelles. Quelle est votre réaction face à cette inquiétude ? Les libertés individuelles sont intouchables. Que ce soit clair, les citoyens sont libres et c'est Dieu qui octroie les libertés, ce n'est pas le PJD. Notre Parti ne va pas obliger les femmes à porter le foulard et ne va pas fermer les magasins de vente d'alcool. Ne me demandez pas une seule chose : c'est de m'attabler avec un ministre qui boit. Premier ministre : Benkirane ou El Othmani ? La primature ne devait pas échapper au PJD. L'article 47 de la nouvelle Constitution a consacré le respect du verdict des urnes, précisant que « le roi nomme le chef du gouvernement au sein du parti politique arrivé en tête des élections des membres de la Chambre des représentants, et au vu de leurs résultats. Sur proposition du chef de gouvernement, Il nomme les membres du gouvernement ». Mais qui de Abdelilah Benkirane ou de Saâdeddine El Othmani sera le prochain chef de gouvernement ? Le premier peut se prévaloir du titre de secrétaire général du PJD, mais l'homme compte plusieurs détracteurs au sein de la société civile, dans les milieux d'affaires et même au sein de son parti. Preuve en est l'épisode des démissions de Mustapha Ramid, Ahmed Choubani et Abdelali Hamieddine en février dernier. Ces décisions unilatérales, fruit d'un coup de tête, lui ont valu d'être la cible de critiques et d'une série de rappels à l'ordre. Comme c'était le cas, en 2009, avec le compte sur Gaza ou, tout récemment, sur ces doutes confiés à une journaliste anglaise sur le taux de participation au référendum du 1er juillet sur la Constitution. En plus de ses écarts de langage, Benkirane, le chantre de la défense des valeurs de l'islam, se permet d'insulter ses opposants politiques lors de meetings. Autant de « gaffes », et c'est d'ailleurs un euphémisme, qui pourraient réduire ses chances d'accéder à la primature. Lui-même en est conscient. Aux derniers jours de la campagne électorale, il a déclaré qu'il ne serait pas déçu si le roi avait à choisir un autre chef de gouvernement que lui. Saâdeddine El Othmani a de fortes chances d'être cet autre. Modéré, charismatique et fin diplomate, le président du conseil national du PJD tient à présenter sa formation comme étant du « centre ». Aux quolibets directs de Benkirane, El Othmani répond par des sous-entendus. En plus des considérations d'ordre interne, le facteur des relations internationales du Maroc joue en faveur de Saâeddine El Othmani, par ailleurs président de la commission des relations internationales au sein du PJD.