La sous-compétitivité des exportations nationales pousse le CMC à croire que « le Maroc doit repenser sa stratégie ». La raison à cela tient aux attentes non concrétisées en matière d'efficacité, de performance et de productivité. Détails. «La stratégie export n'a pas encore donné la pleine mesure de son efficacité. Il faudra sans doute attendre plusieurs années afin de pouvoir effectuer un premier bilan ». C'est ce qui ressort en substance de la dernière note de conjoncture du Centre marocain de conjoncture (CMC), un spécial « Exportations ». L'effet retard en terme de réalisations dont parlent les conjoncturistes tient dans une large mesure au « déficit de compétitivité » des exportations marocaines, enregistré tout au long de la période (1980-2010). Chiffres à l'appui, ils avancent même que les attentes en matière d'efficacité, de performance et de productivité sont loin d'être concrétisées. À la clé, une nette inflexion des ventes à l'étranger « exprimées en valeurs réelles » tombant ainsi d'une moyenne annuelle de 7,8 % des cinq premières années de la dernière décennie (2000-2010) à 5,1% les cinq années suivantes. Plus encore, le net repli observé des flux des exportations est illustré par la détérioration du taux de couverture des biens importés par ceux exportés à partir de l'année 2007. Ce dernier est en effet passé de 80 % en 1988 à 74 % en 1997, puis à seulement 42,8 % en 2009. Le déficit de la balance commerciale, trait caractéristique du commerce extérieur national, a franchi, pour sa part, le seuil historique des 138 milliards de dirhams au terme des neuf premiers mois de l'année en cours. Autre indicateur, les exportations marocaines ont vu leur part dans le commerce mondial se replier glissant ainsi de 0,13 à 0,11 % tout au long de la dernière décennie. Reprise sans effet Les chercheurs marocains qui taxent du doigt la très faible diversification des produits et des marchés ciblés, à l'origine d'ailleurs du retard considérable pris, font référence à la dernière étude de la Banque mondiale sur le climat des affaires pour étayer leur propos. Il en ressort ainsi un rythme nettement inférieur du processus de diversification de la structure des produis nationaux à l'export, comparativement à d'autres pays concurrents. Le nombre de produits marocains exportés par million d'habitants s'élève à 42 contre 130 pour la Tunisie, 55 pour la Turquie et 160 pour la Malaisie. Ce déficit de l'offre en diversification se trouve accentué par la forte concentration sur la destination phare des exportations marocaines, à savoir l'Union européenne. Celle-là même continue à concentrer, à elle seule, près de 70 % du total des écoulements, soit une baisse de 0,19% en 2010, contre 16 % (Asie) et 9% (Amérique). Points faibles Faible diversification productive et des marchés ciblés Forte concentration sur la zone euro Faible teneur en technologie et innovation Faible contenance, à l'export, en main-d'œuvre valorisée Faible rapport qualité-prix Renchérissement des coûts de production Taille des entreprises et leur mode de fonctionnement Erosion des marges préférentielles Régime de change moins flexible Notons au passage que l'année 2010 a connu une reprise spectaculaire des exportations pour atteindre le taux de 30,9 %. Toutefois, comme le souligne le CMC, cet élan conjoncturel « n'a pas eu d'effet sur la croissance de 2010, qui a poursuivi sa contraction pour atteindre le niveau de 3,7 % ». Et là il convient de s'interroger si «c'est la croissance qui est tenue de soutenir, à tout prix, l'exportation ou est-ce que ce sont les exportations qui interpellent et créent les appels d'air pour vivifier la croissance ?», pour reprendre la question des conjoncturistes. Contribution de la demande intérieure Concrètement, c'est la première option, inéluctable d'ailleurs, qui s'impose puisqu'il s'agit d'un choix stratégique tendant à libéraliser davantage l'économie nationale. En témoigne la contribution dominante de la demande intérieure à la croissance du pays. Sur la période 1998-2010, la croissance qui a enregistré une moyenne annuelle de 4,3% demeure fortement tributaire de la demande intérieure y ayant contribué à hauteur de 4,7 %, composée essentiellement de la demande finale (2,9 points de croissance) et l'investissement national (1,9 point de croissance). Au moment où la contribution en points de croissance des échanges extérieurs fut négative (-0,40%). Le défi à relever est de veiller à ce que ce choix stratégique « ne génère pas un surcroît d'endettement ». Car le coefficient multiplicateur des importations s'est situé à 3,1 durant la période 1998-2010 contre 2,16 pour les exportations. La sous-compétitivité produite pousse alors le CMC à croire que « le Maroc doit repenser sa stratégie ». A ce titre, il propose d'ériger en priorité l'amélioration de l'environnement des entreprises exportatrices et la promotion des produits exportés. « Ces mesures devront être appuyées par des actions à caractère transversal visant notamment l'accompagnement des entreprises en les incitant à s'investir de façon plus régulière dans les activités d'exportation et à élaborer des plans de développement à l'international », note-t-on. Sans oublier le cadre organisationnel bien sûr.