Les retombées financières de la violence contre les femmes sont importantes. Le dernier rapport de l'organisation non-gouvernementale, Global Rights, vient de le prouver par les chiffres. Le phénomène de la violence contre les femmes prend de l'ampleur, et une loi punissant ses auteurs est toujours attendue. Cependant, cette violence a un coût : la prise en charge des victimes dans les hôpitaux, les frais des médicaments, le traitement des plaintes dans les tribunaux, les pertes financières pour les entreprises… Pour convaincre le législateur de l'urgence de la situation, l'organisation non gouvernementale Global Rights a réalisé des évaluations et des enquêtes informelles auprès des institutions publiques et privées telles que les syndicats, les écoles, les établissements médicaux et les compagnies d'assurance pour mettre en exergue les coûts financiers de ce phénomène. Constat : la violence à l'égard des femmes impacte fortement les ressources humaines et financières de ces institutions. Illustration : « La violence physique perpétrée contre une femme coûte au moins 500 DH. Si la personne violentée est une démunie, l'hôpital prend en charge les frais des médicaments, des analyses, des radios,… L'évaluation de cette violence dépend de la gravité de l'état de santé de la personne violentée. Les coups peuvent entraîner une infirmité permanente», affirme la délégation de la Santé à Taza, citée dans le rapport de Global Rights. A l'hôpital Hassan II d'Agadir, le coût des soins dispensés aux victimes de la violence varie entre 300 DH et 1500 DH, parfois plus. Le tout à la charge de l'hôpital, car les femmes violentées sont en majorité issues de familles démunies. « Sachant que cet établissement sanitaire accueille quotidiennement une moyenne de cinq cas de violence, un simple calcul permet d'évaluer les pertes financières», renchérissent les auteurs du rapport. Les certificats médicaux délivrés aux femmes violentées coûtent chacun 100 DH au budget de la Santé à Khémisset (selon l'ONG). Outre les pertes liées aux soins de santé, la violence à l'égard des femmes serait également derrière des pertes au niveau de l'éducation nationale. « L'échec ou l'abandon scolaire sont l'une des conséquences de la violence conjugale. Tout élève ayant échoué et recommencé l'année scolaire coûte à l'Etat entre 5 000 et 7 000 DH par an », selon Global Rights. « Vu l'absence au Maroc d'une législation spécifique contre les violences faites aux femmes, Global Rights travaille depuis des années en collaboration avec un réseau de diverses ONG locales pour mener une campagne de plaidoyer législatif pour une telle loi. Cependant, nous avons souvent entendu que l'Etat n'a pas les moyens financiers nécessaires pour la mise en place de cette loi. C'est la raison pour laquelle nous avons réalisé cette étude en collaboration avec les associations locales pour démontrer à l'Etat que la violence coûte plus cher à son budget », souligne Stephanie Willman Bordat, directrice régionale au Maghreb de Global Rights. L'impact de ce phénomène social sur les entreprises est également important. « Selon un responsable des ressources humaines d'une unité industrielle de conserve de poisson à Agadir, l'absence des ouvrières victimes de violence coûte près de 2 500 DH par jour. En moyenne, trois à quatre femmes s'absentent chaque jour », note Global Rights dans son rapport. Les raisons des absences sont multiples : soit pour aller se faire soigner dans un hôpital, pour déposer une plainte ou encore pour assister à une audience au tribunal… A Tétouan, une entreprise de textile affirme que l'absence d'une ouvrière pendant une heure lui coûte 500 DH par jour. Dans son rapport, Global Rights recommande vivement la mise en place d'une législation, l'Etat évitera ainsi ces pertes financières.