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Riccardo Venturi : « Les Haïtiens perdent espoir »
Publié dans Le Soir Echos le 02 - 09 - 2011

A l'occasion du Festival Visa pour l'image de Perpignan, Le Soir échos vous propose de découvrir une photo par jour, avec l'éclairage de son auteur. Zoom sur le drame haïtien, photographié par Riccardo Venturi.
Vous étiez à Haïti en janvier 2010, juste après le violent séisme, qui a détruit près de 80% de la ville de Port-au-Prince. Quelle a été votre approche pour photographier la situation ?
Je suis arrivé à Haïti trois jours après le séisme. J'étais sous le choc. Je suis habitué à ce genre de reportage, mais je n'avais jamais été face à un tel désastre. Je suis resté deux semaines pour documenter la situation. Ma façon de travailler est toujours la même : après avoir capturé l'actualité, je vais en profondeur, je suis le déroulement de la situation et je reviens sur place pour témoigner des conséquences de l'évènement.
De nombreux photographes et journalistes sont arrivés à Haïti, juste après la catastrophe. Comment les Haïtiens ont-ils réagi à une telle médiatisation ?
En janvier, Haïti était au centre de l'attention des médias. L'île s'est habituée à cette forte présence médiatique. Les gens étaient bienveillants à notre égard. Mais alors que des centaines de photographes étaient là en janvier, très peu ont continué à suivre la situation du pays après. Lorsque je suis revenu, seuls quelques-uns étaient sur place et c'était bien plus facile de travailler. C'est toujours ainsi : les photographes passent toujours d'une grosse actualité à une autre. Pour ma part, j'aime suivre et approfondir les histoires.
En juin puis en novembre 2010, vous êtes donc revenu à Haïti. Comment avez-vous perçu l'évolution de la situation ?
La première fois que je suis revenu, j'ai voulu montré les conditions de vie des Haïtiens, six mois après le séisme. Plus d'un million de personnes étaient sans abri. J'ai voulu être là pendant la saison des pluies, qui représentait un vrai problème pour les habitants. En novembre, je voulais revenir pour les élections, puis je suis arrivé au moment de l'épidémie de choléra que j'ai documentée.
Né en 1966 à Rome, Riccardo Venturi a débuté sa carrière de photojournaliste dans les années 1980, s'intéressant principalement à des thématiques sociales, en Italie et en Europe. Au milieu des années 90, il commence à réaliser des reportages dans les pays en guerre, comme l'Afghanistan pour lequel il remporte le prestigieux World Press Photo Award en 1997, ou le Kosovo qui lui vaut la mention honorable Leica. Ces dernières années, il a couvert des évènements internationaux parmi les plus importants, comme le tsunami au Sri Lanka ou le séisme en Iran en 2004, tout en poursuivant des travaux d'investigations plus personnels. Son travail photographique, sur le tremblement de terre qui a frappé Haïti le 12 janvier 2010 et ses conséquences, est actuellement exposé au Festival Visa pour l'Image, rendez-vous international du photojournalisme, à Perpignan, en France.
Votre dernière visite à Haïti remonte à juillet dernier. Un an et demi après le séisme, où en est la reconstruction ?
Il n'y a pas eu de véritable grand changement. Le ville est plus calme, les tensions sont retombées et la ville est plus sous le contrôle de la police. A Port-au-Prince, la construction de quelques centaines de nouveaux abris était presque finie, mais ce n'est pas suffisant pour la population. Les Haïtiens perdent espoir. Le nouveau président est bien accepté, mais il ne semble pas assez fort pour concrétiser le changement.
Vous travaillez depuis de nombreuses années en tant que photographe, notamment dans des pays en guerre, comme l'Afghanistan. Qu'est-ce qui vous motive à continuer après chaque reportage ?
Ma motivation s'explique par le fait que je crois profondément que j'ai un rôle à jouer. Mon rôle et mes capacités en tant que photographe et qu'être humain sont de m'approcher au plus près des gens et des émotions que je peux partager avec eux. Je fais de mon mieux pour transmettre ces émotions à travers mes photographies. Je fais cela depuis plus de vingt ans. Ce n'est pas seulement exercer un métier, c'est être humain.


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