Le Conseil national d'appui au Mouvement du 20 février a dénoncé, hier à Rabat, les violences policières ayant abouti à l'arrestation de plus de 150 manifestants de la marche du 22 mai. Nous n'avons pas encore établi le nombre exact des victimes, mais, il est certain que les blessés se comptent par centaines. Nous allons bientôt entamer notre enquête», déclare aux médias Mohamed El Aouni, coordinateur du Conseil national d'appui au Mouvement du 20 février (CNAM). Ce dernier a tenu, hier à Rabat, une conférence dont l'objectif a été de présenter des données sur la répression «sauvage» du 22 mai et le prochain programme de lutte. Alors que le CNAM est en cours de préparation d'un rapport contenant plus de détails et de chiffres sur les représailles enregistrées dimanche dernier, les indicateurs actuels annoncent d'ores et déjà que le bilan sera important. «21 militants ont été interpellés, à Tanger, et 6 autres à Rabat ; ils feront l'objet d'un procès ! », s'indigne Mohamed El Aouni soulignant que des hommes et des femmes ont payé de leur vie une manifestation supposée pacifique. « Karim Chaïb a trouvé la mort à Sefrou, alors qu'un autre cas vient de nous être signalé à Martil», affirme ce militant. La liste de ces « martyrs » pourrait également inclure 6 autres jeunes hommes retrouvés morts dans une agence bancaire à El Hoceïma. « Nous avons des raisons de croire que ces cadavres sont ceux des victimes de la répression. Nous n'avons pas réussi à avoir des explications, notamment de l'agence bancaire où se trouvaient les corps. Mais ce que nous savons, c'est que l'enquête a démontré que ces jeunes ne sont ni des repris de justice, ni des délinquants qui auraient voulu commettre un quelconque vol », affirme ce coordinateur sans oublier de rajouter à cette liste cette jeune marocaine qui s'est immolée par le feu le 22 février, Fadoua El Aroui. Le CNAM tient à préciser que les interventions musclées des autorités n'ont pas épargné les plus petits, dont un enfant de 5 ans à Rabat. « La police a utilisé tous les moyens pour disperser les foules. A Tanger, c'étaient les véhicules blindés et, à Rabat, les motos. Et à plusieurs reprises, les policiers se sont transformés en lanceurs de pierres », s'insurge le coordinateur. A ces violences, le CNAM ajoute les saisies de caméras, d'appareils photos et de téléphones portables. « La police voulait empêcher les militants de dévoiler la vérité. Un agent de police n'a pas hésité à brandir son arme contre une femme témoin des violences parce qu'elle avait pris des photos. Il lui a saisi son appareil photos, puis l'a arrêtée», relate Mohamed El Aouni. Face à autant d'acharnements, le Mouvement du 20 février campe sur sa volonté d'aller jusqu'au bout. « C'est un mouvement indépendant, mais pas neutre puisqu'il défend une politique appelant le Maroc à devenir un Etat de droit et de loi et non plus celui du Makhzen », insiste Abdelhamid Amine, coordinateur du CNAM et vice-président de l'Association marocaine des droits humains (AMDH). Pour ce militant, cette répression dont plusieurs défenseurs des droits de l'Homme ont également été victimes dans la nuit du 22 mai, il est clair que les autorités font preuve d'une bivalence. « Les autorités montrent simplement qu'elles sont perturbées par ce Mouvement du 20 février. Sinon, pourquoi agir avec autant de violence contre la manifestation du 22 mai alors que le cas était tout à fait différent lors des marches du 20 mars et du 24 avril ? », s'interroge Abdelhamid Amine. Quelques jours avant cette marche sanglante du dimanche dernier, la Wilaya de Rabat avait indiqué, dans des communiqués, qu'aucune autorisation n'avait été octroyée au CNAM et que ce dernier n'était pas reconnu légalement. «Le CNAM se compose d'une dizaine de coordinations à travers le Maroc. Nous avons été invités par le gouvernement et salués pour nos actions. Et c'est aujourd'hui qu'on nous sort cette carte de la légalité ! », proteste Abdelhamid Amine. Le Conseil ne reculera pas et donne un nouveau rendez-vous aux adhérents au Mouvement du 20 février de sortir dans les rues dimanche 5 juin. « Ce sera une marche d'une importance capitale pour nous et pour l'ensemble des militants », martèlent les coordinateurs. Le CNAM renforce ses rangs rappelant que ses marches resteront toutes pacifiques. « Ce sont les pouvoirs publics qui décident d'en faire un terrain de violence. Ils sont les seuls responsables ! », prévient Abdelhamid Amine. Et le rôle du Conseil national des droits de l'Homme dans tout cela ? « Il conforte les autorités dans leur transcription des faits. Pour nous, ce CNDH ne nous sert pas. Son secrétaire général vient même de montrer son opposition à ce que les marches atteignent les quartiers populaires », regrette Abdelhamid Amine. Et d'ajouter que les marches ont toujours été organisées dans les quartiers populaires sans aucun problème..