Au début d'Internet, dans les années 1970, il était pratiquement inimaginable qu'il y aurait un jour suffisamment de machines sur un unique réseau pour que l'on commence à manquer d'adresses disponibles, et pourtant… Dans une cérémonie tenue le 3 février dernier, la dernière portion d'adresses IPv4 a été allouée par l'autorité d'affectation des adresses Internet (IANA), marquant ainsi la fin du protocole IP version 4, en terme d'adressage. Ainsi, aucune adresse IPv4 ne sera affectée par l'IANA aux cinq registres régionaux d'Internet (RIR) pour les cinq continents, en l'occurrence, AfriNIC pour l'Afrique, APNIC pour l'Asie et pacifique, ARIN pour le Canada, Etats-Unis et Caraïbes, LACNIC pour l'Amérique latine, et le RIPE NCC pour l'Europe et le Moyen-Orient. «C'est un jour historique dans l'histoire d'Internet, et l'un de ceux que nous avons anticipé il y a quelques temps ! », nous dit, Raúl Echeberría, président de l'Organisation des ressources d'adresses (NRO), représentatif officiel des cinq RIR, en ajoutant que «le futur d'Internet est dans l'IPv6, et toutes les parties prenantes d'Internet doivent prendre maintenant une action définitive pour son déploiement». l'IPv6 ne date pas d'hier. Il a été développé fin 1998 pour améliorer les performances de son prédécesseur, surtout en matière du nombre d'adresses possibles. Il est à rappeler qu'une adresse IPv4 s'écrit sur 32 bits engendrant ainsi un peu plus de quatre milliards d'adresses, tandis qu'une adresse IPv6 s'écrit sur 128 bits, ce qui ne permet pas d'imaginer un possible épuisement de ce type d'adressage à court ni à moyen termes ! Cependant le passage à IPv6 a pris beaucoup de temps compte tenu de sa date de naissance. Effectivement, plusieurs mesures ont été prises par l'IETF (Internet Engineering Task Force) afin de préserver IPv4 et augmenter le plus possible sa durée de vie. Ainsi, le concept d'adressage privé, de translation d'adresse réseau (NAT), du masque de sous réseau à longueur variable (VLSM) ont été mis en place et ont permis effectivement de limiter la pénurie d'adresses. Mais la demande croissante en adresses a fini par l'emporter sur toutes ces mesures. La passage à IPv6 va certainement donner naissance à un nouvel Internet, en ce sens qu'il permettra la connexion de pratiquement tout à la toile et favorisera de fait une innovation globale de ses services. Internet est maintenant présent dans tous les détails de notre quotidien, donnant naissance à une ubiquité numérique, allant de l'envoi des messages, des tweets, du web, de la téléphonie sur IP au payement par carte…bref, le monde va vers ce qu'on appelle « le tout IP ». Si l'utilisation d'IPv6 était auparavant une option, c'est maintenant une obligation et toutes les parties prenantes, opérateurs, fournisseurs d'accès à Internet, administrateurs réseau etc…doivent impérativement s'y investir. La principale nouveauté, réside dans « l'internet des objets », c'est-à-dire la possibilité d'allouer à chaque objet de la vie quotidienne une adress IP, le rendant accessible à travers le net. A l'exemple d'un chauffage que l'on peut déclencher ou réguler à distance, un réfrigérateur qui « communique » la liste des produits qu'il contient etc. Le Maroc a commencé officiellement à utiliser IPv6 en 2007 à travers le « Moroccan Academic and Research Wide Area Network », ou MARWAN, le réseau informatique national à but non lucratif, dédié à l'éducation, à la formation et à la recherche, avait commencé dès lors le déploiement d'IPv6 en octroyant des adresses IPv6 de type global, pour les établissements universitaires qui le souhaitaient. C'est le premier réseau marocain à offrir une connectivité IPv6 native avec une interconnexion IPv6 internationale via le réseau européen d'enseignement et de recherche GEANT. Ainsi, l'introduction de la connectivité IPv6 met les institutions marocaines membres du réseau MARWAN à l'abri du souci relatif à la transition. Aussi, la transition vers IPv6 va se faire d'une manière progressive à l'échelle du globe, étant donné que l'adressage IPv6 prend en charge l'ancien type d'adresses, ce qui permet une certaine cohabitation entre les deux types de protocoles. Reste maintenant à savoir si les administrateurs réseau, les chercheurs, les opérateurs, et tout informaticien, vont s'investir concrètement et sérieusement dans ce domaine qui ouvre de grandes portes pour l'accès à l'Internet de demain !