Avec le risque d'épuisement de la réserve d'adresses Internet, les experts développent désormais l'IPv6. Entretien avec Abdelaziz Hilali, professeur à l'Institut national des postes et télécommunications et président de l'association pour la promotion de l'Internet Misoc. ALM : L'IPv6 est la nouvelle génération d'Internet. De quoi s'agit-il ? Abdelaziz Hilali : IPv6 (Internet Protocol version 6) est le successeur du protocole IPv4 qui est utilisé presque exclusivement sur Internet. Le protocole IPv4 permet d'utiliser un peu plus de 4 milliards d'adresses différentes pour connecter les ordinateurs et les autres appareils reliés au réseau. Du temps des débuts d'Internet, quand les ordinateurs étaient rares, cela paraissait plus que suffisant. Cette réserve risque d'être épuisée avec l'introduction d'appareils pouvant accéder à l'Internet. La crainte de voir se tarir le nombre d'adresses IP au risque d'entraver le développement futur de l'Internet a incité la communauté des informaticiens à prendre plusieurs mesures radicales. Parmi ces mesures l'introduction d'IPv6 qui offre un nombre beaucoup plus important d'adresses IP. Quelles sont les caractéristiques de l'IPV6 ? Avec IPv6, une adresse sera codée sur 128 bits au lieu de 32 bits pour IPv4, de quoi augmenter d'une manière significative les accès. On dispose ainsi d'environ 3,4 _ 1038 adresses, soit pour reprendre l'image usuelle, plus de 42,5 millions de milliards d'adresses par millimètre carré de surface terrestre. IPv6 offre également certaines améliorations en termes de sécurité sans toutefois assurer une solution infaillible. Y aura-t-il des incidents avec le passage à l'Internet Nouvelle Génération ? Il n'existe normalement aucun risque de collision entre IPv6 et IPv4 puisque ceux-ci sont encapsulés dans les mêmes trames de liaison mais avec des numéros de protocole réseaux distincts. Par contre, IPv6 s'impose parfois comme unique moyen d'interconnexion avec les terminaux mobiles itinérant notamment en Asie. Il le sera rapidement aussi en Europe quand les anciennes solutions d'interconnexion basées sur les anciens standards WAP et l'adressage GSM devront être remplacées par des solutions IP où il deviendra impossible de satisfaire un nombre important de terminaux mobiles avec un adressage IPv4. Quels sont les changements pour l'utilisateur normal ? Les services IPv4 peuvent être accédés depuis des machines IPv6. Le contraire n'est pas vrai. Tous les principaux systèmes d'exploitations classiques peuvent utiliser IPv6. Il n'est pas nécessaire de proposer systématiquement IPv6 à tous les utilisateurs mais d'abord à ceux qui en font la demande. Ceux-là devront disposer de matériels adaptés à ce protocole ou pouvant être mis à jour pour le prendre en charge. Mais l'une des applications phare pressentie pour tourner sur IPv6 est la voix sur IP, dans un contexte où la téléphonie mobile et le dégroupage total se développent, le besoin en adresses va alors se faire sentir de plus en plus. Par quel système se fait l'attribution des adresses IP ? Le système d'attribution des adresses IP présente une structure hiérarchique. Tout en haut de la pyramide se trouve l'IANA (Internet Assigned Numbers Authority) une filiale de l'Internet Cooperation for Assigned numbers and Names (ICANN), organisme en charge de l'administration technique des adresses IP et de l'attribution des noms de domaine sur le Réseau mondial.La plus grosse partie des adresses IPv6 (et IPv4) sont principalement distribuées sur trois continents : Amérique, Europe et l'Asie. La part du continent africain en adresses IP ne dépasse pas aujourd'hui les 3 %.