ll n'y a pas de temps à perdre. Il est question de venir en aide à 300.000 Marocains et autant de ménages. La Société marocaine de rhumatologie (SMR) compte accélérer la cadence. « Nous poussons un cri d'alarme pour une prise en charge rapide, complète et adéquate des personnes souffrant de polyarthrite rhumatoïde », lance la présidente de la SMR, Dr. Saloua Larhrissi Aboudrar. Quelques jours à peine après l'organisation de son débat sur « Les aspects médico-économiques des rhumatismes inflammatoires chroniques », la SMR annonce à présent l'élaboration d'un programme national de prise en charge de cette catégorie de malades. « C'est un travail en cours de réalisation avec la direction de l'épidémiologie du ministère de la Santé. Le programme sera prêt dans les semaines qui viennent », annonce ce médecin spécialiste en rhumatologie. Si la SMR insiste sur l'urgence de concrétiser ce projet, c'est parce que la situation est d'ores et déjà préoccupante. « La polyarthrite rhumatoïde est considérée aujourd'hui comme étant une préoccupation nationale. Elle doit être prise en charge très tôt par les spécialistes car, dans 20 % des cas, cette maladie est handicapante dès l'âge de 45 ans », explique le Dr. Larhrissi Aboudrar. Maladie terrassante, la polyarthrite rhumatoïde touche essentiellement des femmes entres 25 et 55 ans et concerne 1% de la population. «Les douleurs articulaires sont souvent considérées comme banales. Or, la réalité est tout autre. L'une des priorités de la SMR réside justement dans sa volonté de corriger cette vision fausse d'une maladie qui n'a rien de banal», insiste la présidente. Et de préciser encore une fois que, contrairement aux croyances, cette maladie peut survenir à tout âge et pas nécessairement à un âge tardif. Les conséquences d'une telle ignorance sont, malheureusement, irrémédiables. Evoluant vers des lésions des éléments voisins (cartilage, os, ligaments, tendons), la maladie entraîne des déformations et des manifestations extra-articulaires. Résultat : la maladie est invalidante et handicapante avec des répercussions sur la vie personnelle et profess ionnelle du patient. La durée de vie se réduit à une moyenne de 5 à 10 ans, une descente aux enfers ni plus ni moins. « Nous sommes éprouvés sur le plan émotionnel, secoués par la souffrance des malades. Des femmes répudiées, des enfants déscolarisés pour subvenir aux besoins d'une famille parce que la maman ne peut plus travailler et doit être assistée… toute la famille subit la polyarthrite rhumatoïde », confie la présidente de la SMR. Heureusement que la prise en charge est de plus en plus efficace. Du point de vue thérapeutique, le Maroc est bien avancé, puisqu'il dispose des traitements les plus récents comme la biothérapie. Mais tout cela a un coût, qui est trop important pour des bourses moyennes : entre 150.000 et 250.000 dirhams par an. « Aujourd'hui, l'assurance maladie obligatoire couvre un certain wEt pour cause, quelques-unes viennent juste d'arriver sur le marché. Même si 70 % des dépenses thérapeutiques (ALD) d'un patient de cette catégorie sont prises en charge, les 30 % restants représentent pas moins de 40.000 DH, donc un coût toujours très élevé. C'est pourquoi nous tenons à sensibiliser l'ANAM et ses gestionnaires (CNSS et CNOPS) à une prise en charge totale et complète du coût de la polyarthrite rhumatoïde au même titre que le cancer », affirme le Dr. Larhrissi Aboudrar. Selon la SMR, de nombreuses études effectuées au Maroc et dans d'autres pays montrent que les dépenses liées à la maladie causent des problèmes financiers chez 90 % des patients avec pour conséquence une mauvaise observance du traitement. Pour l'ONG, dont la mission a toujours été d'agir pour l'amélioration des soins, il est plus rentable d'assurer une couverture totale de la maladie que d'assumer le poids socioéconomique du handicap qu'elle génère dans la société, détruisant ses membres actifs et brisant l'avenir de ses enfants.