Notre pays peut se transformer en laboratoire d'idées sociopolitiques et économiques en développant une vision et un modèle qui feront de lui une locomotive mondiale. Notre planète affiche depuis quelques décennies plusieurs signes d'essoufflement dus à une surexploitation de ses ressources par l'homme. La déforestation massive prive, petit à petit, notre planète de sa capacité à produire l'oxygène nécessaire à la vie humaine. L'agriculture intensive et l'industrialisation échevelée et irresponsable ont dégradé de manière sérieuse l'eau qui est source de toute vie. Un Américain produit en moyenne 3 kg de déchets par jour et consomme 7,5 tonnes équivalent pétrole (tep) d'énergie par an quand le Chinois produit 1 kg de déchets par jour et consomme un peu moins de 2 tep/an. Les pays BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) représentant environ la moitié de l'humanité laissent entrevoir des perspectives de développement qui mèneraient à un épuisement total des ressources de la terre ; ressources qui n'ont d'ores et déjà plus le temps de se renouveler naturellement. Ainsi et pour la première fois de son histoire, l'homme qui a puisé tous ses besoins auprès de mère nature se voit dans l'obligation d'assister la planète dans son éternel labeur étant donné que les délais naturels de recyclage ne sont plus suffisants pour assouvir les besoins grandissants de notre espèce. Le nouveau défi de l'humanité consiste donc à assister la nature à se régénérer et à maintenir ses grands équilibres tout en permettant à une bonne moitié de la population mondiale d'atteindre un train de vie similaire à celui que mènent actuellement les pays développés. Ce défi de développement dit durable exige l'utilisation de ressources renouvelables tout en optimisant leur consommation. Ainsi les métaux, les plastiques et autres produits papetiers seront à très brève échéance recyclables par l'homme à plus de 95% exigeant de la nature de produire uniquement les ressources nécessaires au maintien et au développement d'une consommation voulue efficace et optimale. L'énergie, dont l'origine était principalement fossile nécessitant un labeur naturel de millions d'années pour être exploitable, sera progressivement générée à partir de ressources telles que le vent et le soleil qui ne seront pas impactés par notre utilisation. Ainsi l'homme prend une responsabilité centrale dans l'animation de son propre écosystème entamant en cela une nouvelle ère similaire aux révolutions agricole, industrielle ou néo-technologique. Les grandes puissances ont démontré jusqu'à aujourd'hui leur capacité à préserver l'espèce humaine malgré l'existence d'un arsenal nucléaire capable de détruire la planète à plusieurs reprises mais la planète a besoin d'une gestion unifiée responsable et durable pour faire face à l'épuisement insidieux des ressources naturelles. En décembre 2009, le Sommet de Copenhague a démontré l'incapacité des Etats-nations à tracer une politique de développement durable qui ne peut être que mondiale ; les gaz à effet de serre ou les eaux maculées ne maîtrisant pas parfaitement le langage des frontières. Les partis écologiques ou les ONG historiques comme Greenpeace ou encore le WWF se sont longtemps décrédibilisés en exagérant les menaces et en proposant des modèles de sociétés inadaptés aux besoins des populations. Les leaders du monde sont encore prisonniers d'idéologies politiques dépassées et d'intérêt nationaux souvent immédiats. Les peuples des pays en développement aspirent, quant à eux, à de meilleures conditions matérielles et ne peuvent en aucun cas comprendre qu'ils doivent réfréner des ambitions légitimes. Les conditions d'une nouvelle gouvernance planétaire se précisent et appellent à la barre du navire un leadership fort, désintéressé et charismatique porteur d'un programme politique mondial basé sur les principes d'un développement durable et équitable pour l'humanité toute entière. Ce leadership aura pour base arrière un Etat-nation, laboratoire qui rayonnera sur l'ensemble de la planète attirant les chercheurs, investisseurs, industriels, intellectuels et artistes du monde entier qui s'associeront pour proposer un nouvel élan à l'humanité. Le Maroc, qui a d'ores et déjà senti l'importance de cette évolution, peut se mettre en ordre de marche pour jouer ce rôle historique fédérateur d'un monde en quête d'un nouveau modèle de développement. Notre pays peut se transformer en laboratoire d'idées sociopolitiques et économiques en développant une vision et un modèle qui feront de lui une locomotive mondiale. Le positionnement diplomatique et stratégique du pays serait globalement revu dans l'objectif de créer un espace socio-économique capable de produire et d'exporter des idées, concepts, une culture et des produits considérés par tous comme innovants et porteurs d'espoir pour la planète toute entière. Les moyens de cette politique existent et sont aujourd'hui mobilisés pour rattraper un retard dans un modèle de développement obsolète et mobilisateur d'efforts colossaux pour peu de résultats. L'action diplomatique du pays, les plans de développement humain, les grands chantiers, les initiatives stratégiques sectorielles et les activités de promotion du pays ne demanderont pas plus d'investissements s'ils focalisent leurs énergies sur l'émergence et le déploiement d'une nation modèle pour un développement durable et pérenne permettant au pays de s'asseoir à la table des leaders. Hazrat Ali disait fort justement il y a déjà 14 siècles: « Ne cours pas après le monde, laisse le monde te suivre ».