Ce titre, «Désir de l'autre rive», traduit ma pensée d'un retour au pays, d'un retour aux racines. Le fait d'écrire ce désir est le reflet d'une envie. Cela symbolise aussi pour moi le retour à la lumière, celle si singulière de l'Afrique», nous déclare Mimouni. Vivant à Montpellier où il enseigne les arts plastiques, l'artiste ne cesse de faire des va-et-vient entre sa terre natale le Maroc et la France. Ces multiples allers-retours constellent ses toiles, dans un jeu de symboles, d'écritures parsemées et de perspectives d'horizons. Les œuvres de Mimouni dessinent en filigrane la dialectique des attirances pour l'autre rive, animée par le désir d'un départ, d'un retour ou simplement du rêve d'un ailleurs. Elles reflètent à la fois le désir personnel de l'artiste de se projeter vers le Sud, mais aussi le mouvement plus global de milliers d'individus qui naviguent entre les deux rives de la Méditerranée. «Il y a la notion Nord-Sud dont je parle, avec tout ce que cela peut signifier. C'est un travail sur le bassin méditerranéen, dans sa richesse et sa complexité» nous explique-t-il. Dans ses toiles et ses gravures, les traversées multiples se retranscrivent à travers de symboles récurrents, comme la pirogue, l'échelle ou le fagot. Dans les tons gris-bleus ou ocres, une barque fend la toile dans sa longueur, tandis que le fond s'anime de lettres et messages tachetés. Les échelles s'élèvent tandis que des directions se profilent, tantôt le Nord, tantôt le Sud, ou parfois simplement l'Horizon. «Cette notion de barque est structurale. Au-delà du côté esthétique, il y a cette notion de vague, des Africains qui veulent partir, rejoindre l'autre rive», nous détaille-t-il. Quant à l'échelle omniprésente dans ses toiles, «c'est l'idée d'une élévation, d'une recherche de l'ailleurs, de monter vers l'infini. Elle symbolise aussi les échelles à Ceuta des Africains qui veulent passer, face aux grillages, toujours dans ce rapport Nord-Sud», commente-t-il. Ces voyages d'une rive à l'autre se profilent sur un ensemble d'œuvres, mêlant peinture sur papier, sur toile et gravures. Sur la diversité de supports, l'artiste nous explique sa démarche «Le dessin est une assise, une fondation, une colonne vertébrale comme disait Giacometti. La gravure s'inscrit comme un prolongement à la peinture et au dessin». Son travail artistique se nourrit de son intérêt pour l'archéologie et l'ethnologie, de ses multiples recherches et lectures, toujours orientées vers le Sud qui le fascine. Comme il le dit lui-même «Mon intérêt pour les civilisations du Sud et pour le patrimoine se retrouve dans mes toiles par les signes, par l'écriture et par les couleurs. Par exemple, je mets dans mes toiles des couleurs de la terre, du sable, des poussières de marbre». Puisant son inspiration dans les voyages mais aussi dans la musique, entre sonorités touareg, flamenco et musique soufie, les œuvres de Mimouni sont à découvrir dans cette exposition où soufflent les appels du grand large, jusqu'au 31 août, à la Galerie Delacroix de l'Institut Français de Tanger.