Corrupteurs, corrompus & Co Question à 0 DH : qui est arrivé le premier, le corrompu ou le corrupteur ? Ne répondez pas trop vite ! Ça a l'air facile, à première vue, mais réfléchissez un peu avant de sortir votre billet. En attendant, je vais vous raconter un truc qui n'a rien à voir. Hier, alors que je me lamentais lamentablement contre les éternels embouteillages et les sempiternels chauffards qui poussent le bouchon toujours trop près, et que, rageur, je rongeais mon frein alors qu'honnêtement, je ne pense pas être un dingue de la pédale, j'écoutais d'une oreille distraite pas très au point, car la plus valide était entre les mains de ma douce moitié qui s'en servait pour déverser, pour s'en débarrasser, tous ses soucis du jour et de toujours comme, par exemple, la bonne et sa mauvaise conduite, ou son esthéticienne qui fait des siennes, j'ai réussi à entendre des bribes de débat à la radio où on parlait, devinez de quoi ? Bien sûr, du nouveau code qui n'en finit pas de mourir et de ressusciter. Justement, ce que j‘ai entendu était à mourir de rire. Ou de rage. Dans le brouhaha ambiant, je pense avoir réussi à déceler que sur le plateau se chamaillaient un syndicaliste qui ne semblait pas être un béni oui-oui, mais si j'en crois sa voix rauque et mon ouïe, doit avoir des origines vraisemblablement chaouies et un représentant du ministère du Transport et de l'équipement qui, lui, avec son verbe de premier de la classe et son «r» d'une telle pureté qu'on pourrait reconnaître son pedigree sans avoir à lui demander de pièce d'identité. À croire qu'en les réunissant sur un même ring, on voulait montrer à quoi ressemblait un choc des cultures. Cela dit, je ne vais pas vous dire ce que ces deux lurons ont dit, car même quand ils s'empoignaient, j'avais l'impression qu'ils se caressaient respectivement le nombril. Par contre, j'aimerais vous rapporter les propos d'un sympathique auditeur et néanmoins incivique rigolo. Il était intervenu juste au moment où nos larrons en foire abordaient laborieusement la question à deux sous des dessous-de-table, bakchich pour les intimes. Ecoutez bien notre auditeur qui, je crois, était en train de parler à la radio tout en l'écoutant, et surtout tout en conduisant, tête en l'air et portable à l'oreille : «Il faut mettre un terme à l'arbitraire des gendarmes et à l'injustice des agents de police! Si on les laisse faire ce qu'ils veulent, on ne pourra plus faire ce qu'on veut !». «Imaginez : ce matin même, j'ai été arrêté par un flic qui m'a dit que j'étais en excès de vitesse. Alors, je lui ai rétorqué qu'il n'avait aucune preuve concrète à me montrer pour prouver mon infraction. Et savez-vous ce qu'il m'a lancé ? Tu n'as pas mis ta ceinture non plus! Vous trouvez ça, normal, vous? Il m'arrête pour excès de vitesse et il veut, en plus, ajouter la ceinture que j'avais, il est vrai, oublié de fermer. C'est vraiment du n'importe quoi !» (je ne sais pas si vous me suivez, mais c'est toujours notre rigolo qui se confesse). Et attendez, j'arrive au meilleur : «Alors, comme il voulait me coller deux PV, j'ai dû négocier avec lui. Le problème, c'est que je n'avais qu'un gros billet, et j'ai été obligé de lui laisser mes papiers pour aller faire de la monnaie. Je n'allais quand même pas lui donner 200 DH pour deux petites infractions de rien du tout ! 50 DH, c'était suffisant, et même cher payé...» (J'exagère à peine, parce que je brode un peu, mais je vous jure que je ne vous raconte pas de bobards). J'ai rigolé. Un rire nerveux. C'est ça les citoyens de ce bled ? Hélas, des anecdotes tragiquement rigolotes comme ça, j'en entends tous les jours. Pauvre Ghellab et pauvres de nous !