Fortement dépendant des importations de blé tendre, le Maroc reste assujetti aux aléas que subissent les pays fournisseurs. Après la France qui connaît des perturbations métrologiques mettant à mal la campagne céréalière, la Russie ne s'avère pas mieux lotie. Une situation qui exacerbe les craintes des importateurs. Eclairage. La situation de la production céréalière inquiète. Les dernières perturbations météorologiques survenues en France et en Russie ont semé un vent de panique auprès des négociants. Une inquiétude qui s'étend aux négociants marocains en céréales. Les dés ne sont pas encore jetés En effet, les pluies discontinues que l'Hexagone a connues récemment ont perturbé les cultures de blé. Selon certains spécialistes, les premières estimations indiquent que la campagne céréalière s'annonce moins bonne que la précédente. Autre constat qui préoccupe, le recul des surfaces semées en blé. Les statistiques montrent que cette superficie a diminué de 7,7% en comparaison avec la dernière saison. Pire encore, les cultures sont affectées par l'humidité. Comme le Maroc reste fortement dépendant des importations de céréales, et principalement du blé, la question se pose quant à la disponibilité de l'approvisionnement, la France demeurant le principal fournisseur du Royaume. «Tout porte à croire que la récolte sera moins importante, bien qu'il soit trop tôt pour tirer des conclusions hâtives, notamment en termes de qualité de la production. Cependant, pour l'instant, c'est le weather market. En d'autres termes, nous suivons de très près l'état des cultures, mais nous essayons tout de même d'anticiper sur la qualité. Il faudra attendre le mois de juin pour être fixé. Actuellement, le marché reste nerveux», relate Omar Yacoubi, président de la Fédération nationale des négociants en céréales et légumineuses (FNCL).Certes, les dés ne sont pas encore jetés, mais les cours à l'international commencent à grimper. Sur Euronext, le cours de la tonne de blé tendre se négocie maintenant à plus de 259,75 euros/t au lieu de 200 € en mars. Pour les importateurs marocains, l'augmentation est estimée à 50 dirhams le quintal, selon le président de la FNCL, lequel affiche un soupçon d'optimisme. Il affirme que le retard peut toujours être rattrapé. Scepticisme Toutefois, d'autres donnes tourmentent le marché mondial. Il s'agit des aléas météorologiques qui ont touché la Russie, premier exportateur mondial, auquel le Maroc fait également appel. Depuis que le pays a opté pour la diversification de ses sources d'approvisionnement, alors que les importations émanaient généralement de l'Europe, la Russie fait désormais partie de la liste des fournisseurs. Or, la production agricole de ce pays semble compromise, ce qui amplifie les inquiétudes. «La campagne en Russie ne s'avère guère prometteuse, ce qui implique que les négociants vont devoir se tourner vers d'autres fournisseurs, notamment la France. Ainsi, une tension sera exercée sur le marché. Non seulement les prix vont flamber, mais le risque de l'indisponibilité de la marchandise n'est pas à écarter», appréhende Yacoubi. Par ailleurs, les importations se poursuivent pour atteindre 11 millions de tonnes (Mt), toutes céréales confondues, à la date du 30 avril, dont 4,35 Mt de blé tendre. Pour soutenir les importations, l'ONICL (Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses) accorde une prime forfaitaire aux opérateurs. La prime forfaitaire à restituer par l'Etat correspond à la différence entre le prix de revient moyen sortie du port du mois et le prix de 270 dirhams par quintal. D'ailleurs, ce régime a été reconduit jusqu'au 31 décembre. Selon nos informations, le montant des restitutions qui se chiffrait à quelques milliards de dirhams a diminué. Pour cause, une partie de ces restitutions a été réglée il y a à peine quelques jours, alors que les opérateurs avaient attendu longtemps avant de percevoir leur dû. Les opérateurs se plaignent, par ailleurs, de la logistique portuaire qui leur porterait préjudice. En fait, comme la situation s'est dégradée au niveau local suite à la rude sécheresse, le pays s'est trouvé contraint de combler le manque par le renforcement des importations. «Nous avons atteint des quantités record en matière d'importations. Plus de 80% de ce volume débarque aux ports de Casablanca et de Jorf Lasfar. Nous rencontrons donc des difficultés, ces ports n'étant pas équipés pour réceptionner de telles quantités. Ceci dit, l'Agence nationale des ports tente de nous faciliter les démarches», indique-t-on du côté de la FNCL. En somme, les opérateurs revendiquent une fluidification du trafic portuaire. Omar Yacoubi Président de la FNCL «La campagne en Russie ne s'avère guère prometteuse, ce qui implique que les négociants vont devoir se tourner vers d'autres fournisseurs, notamment la France. Ainsi, une tension sera exercée sur le marché. Non seulement les prix vont flamber, mais le risque de l'indisponibilité de la marchandise n'est pas à écarter». Maryem Ouazzani / Les Inspirations ECO