C'est la visite de la confirmation et de l'activation des liens économiques, dont les bases ont déjà été jetées, mais peu activées. Le renforcement des relations entre les deux économies - que ce soit de façon bilatérale ou dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe (CCG) - se fait sentir depuis les deux dernières années particulièrement. Ce qui était depuis longtemps vu comme une forme de relations d'amitié et personnelles entre les deux rois, se met de plus en plus au service des intérêts économiques mutuels. La conjoncture internationale n'est pas étrangère à cette reconfiguration : le Maroc, face à la perte de vitesse de son principal partenaire économique, l'Union européenne, affiche de plus en plus de diversification, voire un repositionnement de ses partenariats économiques pour assouvir sa grande soif d'investissements étrangers, mais aussi de liquidités. L'Asie du sud, en l'occurrence les pays du Golfe et en particulier l'Arabie Saoudite, sont parmi ses «vieux amis, devenus de nouveaux partenaires économiques de premier plan». Sur le nouvel aspect du partenariat financier, en tout cas, plusieurs observateurs s'y accordent. Certains vont même jusqu'à placer cette visite royale dans une démarche de préparation de la sortie sur le marché international que devrait réaliser le Maroc, vers la fin de ce mois ou le début du mois prochain, portant sur un montant annoncé entre 750 millions et un milliard de dollars US. Le choix même de cette devise pour mettre en œuvre cette opération financière, est vu comme une invitation tacite aux fonds souverains du Golfe... et pourquoi pas saoudiens ? «Il est prévu que le Maroc alloue environ la moitié des obligations aux investisseurs institutionnels du Golfe», poursuit la même source. Par ailleurs, sous un angle multilatéral, la démarche du roi Mohammed VI est également synonyme d'«activation» des dossiers d'investissement prévus dans le programme de financement du partenariat stratégique établi en 2011, entre le royaume et le CCG. Ce programme porte sur un volume d'investissement d'un milliard de dollars US par an, tout au long de la période de 2012-2016. Marché-refuge Du côté saoudien, le syndrome de la diversification est également bien apparent, mais pour bien d'autres raisons : améliorer la présence économique du royaume en diversifiant ses destinations et secteurs d'investissement, avec une ouverture économique principalement tournée vers les pays en développement. Le Maroc offre une parfaite plateforme à cela et les concrétisations n'ont pas tardé. Sur le volet des investissements, le raffermissement des relations entre les deux pays s'est effectivement déjà manifesté à travers plusieurs grands engagements d'investissements saoudiens sur le marché local. Les deux plus significatifs sont le projet de train à grande vitesse Tanger-Casablanca - l'Arabie Saoudite y contribue à travers un prêt de 200 millions de dollars US - ainsi que la réalisation de la première phase du premier projet du Plan solaire marocain, dont le marché vient d'être remporté par un consortium contrôlé à 95% par Acwa Power International. Ces réalisations ont donné une importante impulsion aux relations entre les deux économies. Celles-ci sont régies, pour rappel, par un certain nombre d'accords, de protocoles et programmes touchant notamment les domaines de l'investissement et du financement dans plusieurs nouveaux secteurs économiques (technologies de la communication, industrie alimentaire, industrie chimique, aéronautique, automobile, énergies renouvelables, industrie pharmaceutique, etc). En outre, un cadre de partenariat a également été mis en place en 2011 entre les organisations professionnelles des deux économies, notamment les Chambres de commerce et d'industrie. Cap sur l'Afrique Les deux économies entretiennent des relations économiques à plusieurs vitesses. Si les investissements sont en gain de forme, les relations commerciales se caractérisent par contre par leur faiblesse, dans les deux sens des échanges. Dans le détail de ces interactions commerciales, le cumul en valeur des exportations du royaume saoudien vers le Maroc s'est situé en 2011 autour des 5,24 MMDH, alors que celui des exportations du Maroc vers l'Arabie Saoudite n'a pas pu dépasser les 320 MDH au titre de la même année. Le Maroc est évidemment déficitaire et les actualisations statistiques de l'Office des changes du premier semestre de cette année, ne dérogent pas à cette tendance. L'acide phosphorique, les produits alimentaires, les agrumes, le poisson, sont les principaux produits exportés par le royaume vers l'Arabie Saoudite. Quant aux importations provenant de ce pays, le pétrole, les matières plastiques et les produits chimiques, sont au sommet du tableau des produits échangés. Quant aux facteurs de faiblesse de ces échanges commerciaux, ils sont principalement constitués par l'éloignement géographique, accentué par l'absence de corridors maritimes directs entre les deux pays, le défaut de programmes promotionnels et d'information sur l'un ou l'autre des marchés, ainsi que le peu de visibilité sur l'identification des secteurs porteurs pour les deux parties.