L'évolution du marché immobilier est attentivement scrutée par les Marocains résidant ou non sur le sol ibérique. Les pronostics prévoient une correction intéressante pour les futurs propriétaires, si toutefois ils remplissent les conditions, devenues drastiques pour les non-résidents. La pierre espagnole continue d'attirer les acheteurs marocains. La probabilité d'une crise économique et un éventuel effondrement du marché de l'immobilier pourraient attirer des acheteurs du royaume. Déjà , le marché immobilier des voisins ibériques a toujours intéressé les futurs propriétaires marocains. Durant l'exercice 2018, ceux-ci figuraient parmi les nationalités ayant jeté leur dévolu sur le marché immobilier espagnol. Ils se plaçaient derrière les Britanniques, les Français et les Allemands, et ex-æquo avec les Roumains. Durant cet exercice, les acquisitions des Marocains ont grimpé de 6,1% durant cet exercice. Une grande partie de ces achats ont été concrétisés sans faire appel aux prêts bancaires. Une précision s'impose. Il s'agissait de Marocains ayant un titre de séjour, donc résidant sur le territoire espagnol. De l'autre côté, on recense 207 acquisitions de la part de Marocains non-résidents. Un chiffre qui suit un trend haussier, certes, mais l'on est loin de parler de «grands acheteurs». Dans le cas des Marocains titulaires d'un titre de séjour, les nouveaux propriétaires ont opté pour l'immobilier résidentiel dans les zones périphériques. Le prix du m2 de leurs achats se situe en moyenne autour de 754 euros contre 1.700 pour les autres nationalités (hors espagnole), européennes en majorité. En revanche, les non-résidents n'hésitent pas à casser leur tire-lire et débourser environ 1.600 euros le m2 pour leur pied-à terre espagnol. «Si nous comparons un bien immobilier au nord du royaume avec un autre situé sur la côte espagnole, la balance penche vite du côté de l'Espagne. Pour un bien aux caractéristiques similaires au Maroc, il est question d'un budget de 2 à 3 MDH contre 200.000 euros à la Costa Del Sol», confie cet expert du marché immobilier espagnol auprès de la clientèle marocaine. Durant la crise économique, et peu après l'éclatement de la bulle immobilière, les occasions s'étaient multipliées et les acquéreurs marocains en avaient bien profité. Cela risque-t-il de se reproduire à avec la crise économique ? «J'en doute fort. Néanmoins, il n'y a pas de certitude concernant ce genre de transactions. Ceci dit, le contexte est différent à bien des égards. Durant l'époque de la crise, les prix ont chuté de 50%. Une véritable aubaine. Cela ne risque pas de se reproduire car il y a eu une grande correction des prix et, de manière générale, la pierre espagnole ne peut se déprécier considérablement», explique notre source. Pour le moment, les baisses restent minimes, spécialement dans le secteur de l'immobilier balnéaire, en comparaison avec les dégâts économiques causés par la crise sanitaire. «J'ai effectué des transactions pour des logements évalués à 280.000 euros et cédés à 261.000 euros durant cette période de crise sanitaire. C'est, en général, la moyenne des baisses que devrait connaître le marché», estime notre expert. De plus, ajoute notre source, le contexte juridique et législatif a évolué. «À l'époque, il existait une grande souplesse, voire un laisser-aller des autorités bancaires espagnoles ainsi que du gouvernement. À présent, il est difficile -mais pas impossible- de remplir les différentes conditions. Les banques privilégient les clients disposant de comptes bancaires assidûment alimentés, et la source des fonds doit être connue», indique cet agent immobilier. Et de poursuivre : «Les banques sont plus regardantes sur la source des revenus et de paiement, et les contrôles plus rigoureux que par le passé. Les lois contre le blanchiment de capitaux ont soumis les banques européennes à des dispositions strictes». De plus, les autorités marocaines ont durement sévi depuis que ces acquisitions réalisées durant la crise économique espagnole ont éclaté au grand jour. Dès lors, les contrôles se sont resserrés. Souvenez-vous de la fameuse mise en garde de l'Office des changes menaçant de poursuites les Marocains qui souhaitaient devenir propriétaires d'un pied-à-terre à l'étranger sans sa bénédiction. «Cela a refroidi plusieurs acheteurs, et la clientèle marocaine en général, bien placée et craignant pour sa réputation, a paniqué», se souvient cet expert qui a préféré garder l'anonymat. Cela n'empêche pas les futurs acheteurs de faire preuve d'ingéniosité voire de fraude pour tromper la vigilance de l'Office des changes et se procurer les fonds nécessaires, que ce soit à travers des réseaux professionnels ou dans le cercle amical et familial. Mais est-ce le bon moment pour devenir propriétaire en Espagne ? «Le marché est assez stable car l'Etat est entré en jeu à travers le fonds de garantie doté d'une enveloppe budgétaire de 20.000 millions d'euros. De plus, les banques ont accepté le moratoire de six mois sur le remboursement des prêts immobiliers. C'est une bouffée d'oxygène pour de nombreux propriétaires en difficulté. La vraie situation sera connue à la fin de la mise en veille des paiements, et c'est à ce moment-là que le nouveau marché se dessinera», analyse notre interlocuteur. «J'encourage toutefois les MRE et les intéressés à rester attentifs car il y aura de belles occasions à saisir. Peut-être pas aussi alléchantes que celles rencontrées durant la précédente récession économique, mais l'on pourra faire de bonnes affaires, un bon placement», conclut-il. Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Eco