Vignette 2025 : ce qui change cette année    Le Trésor lève 7 MMDH, sa plus importante opération depuis février 2024    Maroc : Les étrangers de parents marocains éligibles au régime des études à l'étranger    Les groupes de supporters du Raja surprennent la direction lors d'une réunion à huis clos    Real Madrid : Après son expulsion, Vinicius Jr risque une lourde suspension    La météo de ce samedi 4 janvier 2025    Rougeole au Maroc : 4 cas confirmés à la prison locale Tanger 2 (DGAPR)    Fiancé in Bennis-Alj-Slaoui case arrested and jailed in Morocco    Ramadan 1446: La conjoncture du secteur avicole et l'approvisionnement au centre d'entretiens entre M. El Bouari et les professionnels de la FISA    Supercoupe d'Italie: Le derby de Milan en finale    La nouvelle gare routière d'Es-Semara ouvre ses portes    Commerce extérieur : Baisse des prix à l'importation et hausse modérée à l'exportation    2025 : L'année de la reconnaissance internationale définitive de la souveraineté marocaine sur ses provinces du Sud    Le Médiateur du Royaume a reçu plus de 7 000 plaintes et doléances en 2023    Le Turc Baykar a livré des drones Bayraktar TB2 aux FAR    Espagne: le Real Madrid vainqueur à Valence prend la tête de la Liga    Investissement : les premières neiges relancent l'espoir à Oukaïmeden    Dopage dans le tennis : Djokovic dénonce un système opaque    Sport équestre : le Trophée Maroc Equestre dévoile sa 18e édition    Trump connaîtra sa peine le 10 janvier dans le procès Stormy Daniels    Plus de 115.000 Syriens rentrés chez eux depuis la fin du régime Assad    L'adjoint du chef du bureau de liaison israélien quitte le Maroc    Affaire du "viol d'une avocate française": Le fiancé marocain incarcéré    Résidences universitaires : 18 conventions signées par la tutelle avec des investisseurs privés    Edition. Bichr Bennani : "En soutenant le lecteur, on dynamiserait toute la chaîne du livre !"    Edition. Layla Chaouni: "Le Fennec a pris une approche différente en vendant directement en ligne"    Espagne : record de fréquentation pour les sites du patrimoine national en 2024    Le Médiateur du Royaume dénonce de graves «irrégularités» dans la gestion des marchés publics et l'administration locale    Habitat : les crédits Mourabaha continuent leur progression et atteignent 24,5 MMDH    Le Maroc parmi les grands fournisseurs du Royaume-Uni en légumes frais    Fatna Sarehane : Crédible, engagée... et une juriste pas comme les autres !    Le Maroc : le noyau dur de l'Afrique    Vie et mort du principe de non-ingérence algérien (1962-2025)    USA: Sécurité renforcée à New York après l'attaque meurtrière à la Nouvelle Orléans    Avarie de deux pétroliers en mer Noire : 2.400 tonnes de produits pétroliers déversées en mer    Deux agents de police blessés dans l'explosion d'un engin non encore identifié à Berlin    France. Un influenceur algérien appelle au meurtre des opposants au régime militaire et se fait arrêter    Présidentielle au Gabon. Le calendrier sera respecté    Portrait. Souad Mouktadiri : la 1ère pilote marocaine à participer au Rallye Dakar 2025    Nigeria. Nouvelle voie tracée pour l'industrie pharmaceutique à l'horizon 2030    Le temps qu'il fera ce vendredi 3 janvier 2025    Les températures attendues ce vendredi 3 janvier 2025    Réouverture conditionnelle du poste-frontière de Melillia : Rabat veut faire de cette cité "une ville marocaine de plus", craint le Parti populaire    «Apocalypse», le nouveau livre de Abdelhak Najib    La créativité marocaine à l'honneur au Festival Tamouda Bay de culture Afro-méditerranéenne    Parution. La Marche Verte. L'épopée. Dieu, la patrie, le Roi    Une « Soirée des mélodies du Moyen Atlas » pour célébrer le Nouvel An amazigh    En tournage au Maroc, l'actrice israélienne Noa Cohen dit avoir reçu des menaces    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Les réformes sont irrévocables» Mustapha Ramid
Publié dans Les ECO le 06 - 08 - 2012


Mustapha Ramid,
Ministre de la Justice et des libertés.
Les Echos quotidien : Tout le monde attend la réforme de la justice, citoyens Marocains et partenaires étrangers, Peut-on dire que finalement cette réforme voit le bout du tunnel ?
Mustapha Ramid : Tout à fait. La justice était souvent contestée et certains anciens ministres de la Justice ont essayé de réformer le secteur. Cependant, ces réformes étaient partielles et non approfondies. Aujourd'hui, nous annonçons une réforme globale de l'ensemble du système judiciaire. Les métiers de la justice, à savoir l'huissier, la police judiciaire, les avocats, les magistrats, les adouls, les notaires, etc. représentent des maillons indispensable dans la chaîne de la justice et toute réforme ne saurait réussir en dehors de la mise à niveau de ces métiers. La réforme globale signifie une mise à plat de tous les dysfonctionnements, en diagnostiquant et en explorant des pistes de solutions efficaces. Il ne s'agit nullement de retouches ou de quelques améliorations, mais de réformes profondes, dans lesquelles sont consultées les institutions de l'Etat, la société civile, les partis politiques et les professionnels du secteur. C'est un dialogue sociétal ouvert à toutes les catégories socioprofessionnelles, y compris la presse, porte-flambeau, pour éclairer le citoyen et l'impliquer à ce dialogue sans précédent auquel nous aspirons avec un plein succès.
Quelles sont les garanties de succès que vous croyez avoir pour atteindre un résultat concret et dont vos prédécesseurs ne disposaient pas ?
En toute sincérité, il y a un soutien royal sans précédent. S.M. le roi a accepté la composition du comité de suivi de la réforme de la justice, l'a reçu et l'a investi de son appui suprême. Puis, il y a la conviction de tous les Marocains qu'il ne peut y avoir de réforme générale sans réforme du système judiciaire. En effet, une justice équitable équivaut a une détente du climat des affaires, à un renforcement de la démocratie et à une assurance du citoyen. Nous voulons que ces moments marquent une rupture et un tournant, mais nous sommes aussi conscients que d'aucuns ne voient pas leurs intérêts dans cette ambiance et voudraient mettre des bâtons dans les roues. Toutefois, nous demeurons rassurés que nous réussirons a enclencher la dynamique réformiste, sans prétendre atteindre un modèle judiciaire idéal.
Vous avez parlé de la non adhésion de certains milieux. Est-ce qu'on peut dire qu'il s'agit du syndicat des avocats et du club des magistrats qui ont formulé des réticences quant a votre mode opératoire ?
Nous ne voulons pas personnaliser la problématique. Toutefois, puisque vous évoquez ces deux composantes, je puis vous certifier que le problème ne se pose plus avec les barreaux d'avocats qui adhèrent complément à la dynamique enclenchée. Malheureusement, le club des magistrats campe sur ses positions, mais les portes resteront ouvertes pour que chacun assume ses responsabilités, car s'abstenir de participer à ce grand chantier, c'est ne pas accomplir son devoir. En tout cas, nous espérons qu'ils reviendront sur leur décision, dans l'intérêt général.
Est-ce qu'on peut donc considérer que nous sommes devant un refus qui met en porte à faux le consensus autour de la réforme enclenchée, au risque de voir se dresser des voix contre le projet final ?
Il faut que je précise que les magistrats sont suffisamment représentés dans la commission et participent activement aux débats et nous ne sommes nullement gênés par la position du club des magistrats, quoique nous espérions qu'il participerait avec nous pour avoir autour de la table toutes les composantes du secteur. En tout cas, le consensus n'est pas obligatoire, du moment que la composition de la commission est élargie. En revanche, il est primordial que la charte issue de la commission de la réforme soit parrainée par l'essentiel des composantes du secteur, y compris le corps de la magistrature, qui adhère totalement à ce chantier, abstraction faite de la position du club des magistrats.
La justice étant primordiale pour l'attraction des investissements, quel serait alors votre message à la communauté des affaires, ainsi qu'aux investisseurs nationaux et étrangers ?
Primo, les représentants de la communauté des affaires sont membres de la commission à travers la CGEM et Bank Al Maghrib et puis le dialogue est ouvert à toutes les représentations professionnelles, associations, syndicats, etc. Secundo, nous allons organiser un colloque dédié a la justice des affaires pour éventuellement pister les dysfonctionnements qui existeraient. S'agissant des investisseurs étrangers, je vous informe que nous sommes engagés dans une coopération constructive avec des experts français, espagnols, belges et prochainement américains, qui nous ont permis de découvrir leurs expériences et les atouts de leurs systèmes judiciaires, pour tirer profit des meilleures pratiques, dans le but de tirer vers le haut notre justice. À cet égard, je peux vous dire que la réglementation du droit des affaires sera prochainement décortiquée, de concert avec qui de droit.
La Cour des comptes a produit le rapport de l'exercice 2010, qui porte sur l'audit d'une vingtaine d'établissements publics, de communes et de services administratifs. Dans certains cas, le réquisitoire est des plus graves. Détournement de fonds, malversation, mauvaise gestion, dilapidation de deniers publics, etc. Pour le moment néanmoins, seuls deux ou trois dossiers ont été instruits par la justice et médiatisés. Pourquoi cela ?
Je dois préciser que quand il s'agit de rapports de la Cour des comptes il y a lieu de noter que ce qui est publié par la cette dernière ou par les cours régionales des comptes sur les établissements ou services contrôlés représente soit des dysfonctionnements réels et élucidés ou des doutes sur de probables infractions, non encore prouvées. S'agissant de dysfonctionnements, il faut distinguer entre ceux à caractère gestionnaire qui ne nécessitent pas de poursuites pénales et ceux à caractère criminel, qui imposent des poursuites judiciaires. Dans ce cas, l'article 111 du règlement régissant la Cour des comptes stipule que le procureur du roi près la Cour des comptes transmet au ministre de la Justice les dossiers jugés nécessitant des poursuites judiciaires, qui les transmet au procureur du roi, lequel ordonne l'ouverture de l'instruction à la police judiciaire. À cet égard, je vous confirme que l'ensemble des dossiers que le ministère de la Justice a reçu de la Cour des comptes a été transmis pour instruction dans un délai ne dépassant pas 24 heures. Cependant, la nouveauté avec ce gouvernement, c'est la création d'une commission composée de magistrats spécialisés dans les délits financiers et nous leur avons remis tous les rapports de la Cour des comptes avec respect de l'habilitation territoriale, c'est à dire le traitement des magistrats des dossiers relevant d'autres juridictions territoriales. Nous comptons organiser une réunion en septembre pour débattre des conclusions de ces magistrats et prendre en conséquence les décisions qui s'imposent et qui pourraient être le transfert de dossiers au procureur du roi, même si nous ne les avons pas reçus de la Cour des comptes. Bien sûr, les dossiers qui requièrent une présomption d'innocence seront traités avec cet égard. Je peux vous assurer qu'il n'y aura ni acharnement ni passivité, mais plutôt de l'objectivité, dans le respect du principe de l'Etat de droit.
On vous reproche de vous focaliser sur les établissements publics, notamment ceux les plus médiatisés, mais que vous avez tendance à oublier des organes de régulation, notamment ceux dont la mission est l'encadrement du marché financier, avec l'importance des flux gérés ? S'agit-il du principe de deux poids et deux mesures ou de la recherche d'une large médiatisation ?
Je vous assure que le traitement avec deux poids et deux mesures n'existe que dans certains esprits et que c'est un pur mensonge. Nous nous sommes engagés à combattre la prévarication la où elle est avérée par des documents ou des rapports d'organes officiels. Il ne s'agit pas seulement des rapports de la Cour des comptes, mais également des rapports de l'IGF et même des enquêtes parues dans la presse, avec preuves a l'appui. Mais il faut préciser à cet égard que le procureur transmet les dossiers, sujets d'enquêtes judiciaires, à la police judiciaire, pour traitement. En revanche, celle-ci ne pourrait traiter l'ensemble des dossiers en même temps, faute de moyens logistiques et humains, mais elle fait le maximum pour finaliser ses enquêtes dans des délais raisonnables.
Vos adversaires politiques vous accusent de choisir des dossiers précis pour les décrédibiliser, comme c'est le cas pour Alioua ou encore pour Mezouar ?
Il faut bien savoir ce qu'on veut. Est-ce que pour qu'on ne nous accuse pas d'utiliser deux poids et deux mesures, on évite tous les dossiers dans lesquels ces personnes sont concernées ou bien quand la police judiciaire enquête sur des accusations, le procureur ne devrait pas suivre la procédure, parce que le mis en cause appartient à l'opposition? L'opposition ne dispose pas d'immunité dans ce sens là que je sache, comme d'ailleurs tous les Marocains. En revanche, montrez moi une personne appartenant a la majorité dont le nom est cité par un rapport de la Cour des comptes ou d'autres organes officiels et même par la presse, et dont la procédure d'enquête n'aura pas été ouverte.
Je peux vous donner un exemple. L'OCE, dont le patron est proche de l'Istiqlal, est épinglé par la Cour des comptes, mais il n'y a pas eu de poursuites...
L'instruction de ce dossier est ouverte. Elle est au niveau de la BNPJ et suit son cours. Par ailleurs, je peux vous confirmer que je n'ai pas le droit d'exercer une quelconque pression sur ces services pour les dossiers à traiter en priorité ou le contraire. J'insiste sur le caractère de l'exhaustivité de traitement de tous les dossiers, complets et étayés de toutes les preuves et qui sont sujets d'éventuelles poursuites.
Est-ce vrai, même dans le cas où cela pourrait fâcher l'une des composantes de la majorité ?
Je n'accepterait jamais que l'on puisse discuter le principe de l'équité de la justice. Tous les Marocains sont traités de la même manière et il n'y a nulle distinction entre personnes de la majorité ou de l'opposition. Je peux vous assurer que quand il s'agit d'une personne de l'opposition, je me sens très gêné, justement en prévision des insinuations d'éventuels règlements de comptes qui n'existent en vérité nulle part. Notre défi est de garantir aux Marocains une justice équitable et on y arrivera avec la détermination de tout le monde.
Dans le même registre, il n'y a pas moins de 18 associations de la société civile qui vous reprochent de ne pas diligenter d'enquêtes dans le dossier des primes de l'ancien ministre des Finances Salaheddine Mezouar et le trésorier général Noureddine Bensouda.
D'un côté on nous accuse de régler des comptes avec nos adversaires politiques, de l'autre on nous reproche de ne pas approfondir l'enquête. Il faudrait que ces gens là sachent ce qu'ils veulent ?
La logique voudrait que vous accomplissiez votre tâche le plus objectivement du monde, sans vous soucier des insinuations ou des reproches des uns et des autres. Il faut que vous soyez convaincus de votre démarche.
Nous sommes parfaitement cohérents avec nos engagements. J'ai personnellement transmis ce dossier au procureur du roi, qui l'a remis a la BNPJ pour l'ouverture d'une enquête judiciaire et le dossier suit son cours le plus normalement du monde. Encore une fois, je ne pourrai pas obliger la BNPJ de le traiter d'urgence ou en priorité, auquel cas je serais en train d'influencer la justice, mais en revanche, les délais de traitement doivent être raisonnables pour éclairer l'opinion publique.
Quelle est votre appréciation aujourd'hui sur le registre des droits de l'homme?
Nous avons vécu l'ambiance du printemps arabe avec tous ses aspects positifs, comme l'avènement de la nouvelle Constitution, l'ouverture du champ politique, couronnée par des élections démocratiques et la victoire d'un parti de l'opposition. Toutefois, il y a aussi des aspects négatifs. Par exemple, si certains citoyens sont en droit de revendiquer plus de libertés et de droits, d'autres formulent des exigences à caractère personnel et c'est là où les difficultés surgissent. Faut-il rappeler que nous avons été confrontés, dès notre nomination, à des soulèvements, des occupations de routes, de chemins de fer, de l'espace public. Il fallait aussi faire face à des revendications irréalistes comme l'emploi direct des diplômés, alors qu'ils dépassent deux cents mille demandeurs... et il y a eu de la casse! On ne peut pas maintenir l'ordre et la sécurité publics et faire face à la provocation sans qu'il n'y ait pas de contacts dissuasifs. Je pense qu'en général les droits de l'homme s'améliorent progressivement, en dehors du dossier des institutions pénitentiaires. Là, il y a des problèmes d'ordre logistique, du management et de la gestion de ces centres et même de comportement des prisonniers. C'est un ensemble à étudier, sans dissociation. En ce qui concerne la situation économique et sociale, c'est étroitement lié au développement de ces aspects au Maroc. Comme notre pays est lui aussi tributaire de ses partenaires qui vivent une crise internationale, notre pays n'y échappe pas, avec tout l'impact social qui en découle.
Vous avez récemment déclaré qu'il n'y avait pas de détenus politiques ? Qu'en est-il du cas de Mouad El Haqed et de certains membres du mouvement du 20 février ?
Selon les données dont je dispose, les membres du M20 qui ont été arrêtés sont poursuivis pour des délits a caractère pénal comme la violence à l'égard des forces publiques quand celle-ci voulait disperser des rassemblements non autorisés qui bloquaient l'espace public. Pour le dénommé El Haqed, il a produit une chanson dans laquelle il qualifie les forces de police de chiens et les insulte en les traitant de tous les noms. Est-ce un délit politique ou d'opinion? Je veux bien qu'on me montre l'expression politique dans ses paroles hormis les expressions d'insultes et de diffamation. Il est donc accusé de mépriser la dignité d'une institution publique et il doit répondre de ses actes comme dans tout autre dossier de droit commun.
En ce qui concerne votre relation avec la presse, si aucun journaliste n'a été emprisonné depuis l'avènement de ce gouvernement, dans certains cas, la BNPJ a auditionné des journalistes pendant plusieurs heures sur certains écrits. Est-ce un nouveau mode opératoire de pression ?
Nous sommes décidés à éviter l'arrestation des journalistes pour des délits de publication. En revanche, il y a lieu de signaler que certains écrits enregistrent des dépassements au détriment d'institutions et de citoyens qui sont en droit de les poursuivre en justice, et donc de donner lieu a l'ouverture d'une instruction au niveau de la BNPJ. Celle-ci auditionne les journalistes pour ces cas. Je puis vous affirmer que je n'ai reçu aucune réclamation dans ce sens et en tout cas, nous ne tolèrerons pas de prolonger anormalement la durée d'audition et si cela faisait l'objet de doléances, elles seraient traitées avec toute la diligence qu'elle méritent.
Les journalistes ont toujours revendiqué une chambre dédiée aux affaires de la presse. Y a-t-il une réflexion dans ce sens ?
Le ministère de la justice et des libertés a organisé, pour la première fois au Maroc, une rencontre entre journalistes et magistrats, avec la participation du ministère de la Communication, et la Cour de cassation a organisé, pour sa part, un colloque avec les médias. Il y a lieu aussi de vous informer qu'un code de la presse, sans sanctions privatives de libertés, est sur le point d'être finalisé ainsi que, également, le Conseil supérieur de la Presse. Tout cela permettra une pratique journalistique dans les meilleures conditions de liberté . En revanche, si l'Etat s'engage sur ce volet, il faut aussi que les journalistes soient très regardants par rapport a l'éthique et à la déontologie de ce métier, qui constitue un maillon de la chaîne démocratique du pays. Eriger la presse en véritable pouvoir passe inéluctablement par une responsabilisation du métier.
On dit que le dernier congrès du PJD a été l'occasion de purger le secrétariat général, comme le montre l'éviction de Aftati par exemple. Est-ce que vous commencez a être gênés par les voix d'opposition en interne ?
Non, il ne s'agit aucunement d'éviction. Néanmoins, il faut être cohérent avec soi-même. Quand on appartient à un parti qui préside le gouvernement, la responsabilité est contraignante. Elle exige un droit de réserve en face des partenaires de la majorité pour ne pas porter préjudice a la cohésion de l'alliance gouvernementale. On ne peut pas gouverner et s'opposer en même temps. À partir de la, il y avait une problématique avec notre ami Aftati et certains membres qui souhaitent s'exprimer librement à tous les niveaux. Il était donc opportun qu'ils ne soient pas retenus dans les instances dirigeantes du parti pour leur permettre de s'exprimer sans engager le parti, et éviter ce qui pourrait s'apparenter à un double jeu. C'est une décision qui nous a pris beaucoup de temps avant de prôner l'adage : «L'opinion est libre et la décision est engageante».
Qu'en est-il de la cohésion gouvernementale ? On dit que le dossier des cahiers des charges de l'audiovisuel a laissé bien des séquelles.
Je ne vous cache pas que les cahiers des charges de l'audiovisuel sont bien pensés et prônent la bonne gouvernance, mais ils étaient confrontés a une campagne de dénigrement injustifiée, ce qui les a empêchés de voir le jour. Cet acharnement était exprimé par plusieurs composantes y compris, malheureusement, par certaines parties de la majorité. Actuellement, ce dossier suit son cours normal, dans la sérénité, la responsabilité et la concertation, pour être finalisé a la rentrée et le gouvernement opère dans une ambiance de cohésion, contrairement à ce que pourraient croire les gens.
Le refus du ministre de l'Intérieur de dévoiler les fameuses «grimate» ne constitue-t-il pas un désaveu a la politique de transparence défendue par le gouvernement ?
Il s'agit de dossiers compliqués, sensibles et liés aux intérêts de personnes très influentes. Il faut dire que les réactions qui ont suivi la publication de listes des transports de voyageurs ont rendu cet exercice très difficile. Mais je peux vous assurer que la volonté de combattre l'économie de rente y est et que notre engagement pour la transparence est imperturbable. Seulement, on ne peut pas tout faire en à peine six mois. Nous avons réalisé des choses et beaucoup de chantiers requièrent aussi de la mobilisation et de la volonté, et nous sommes prêts assumer nos responsabilités jusqu'au bout.
Il y a quelques jours, le chef de gouvernement a pourtant déclaré qu'il n'avait nullement l'intention de fouiller dans tous les dossiers et qu'il accordait une certaine amnistie avec effet rétroactif. Cela ne constitue-t-il pas une rupture avec le principe qui vous a propulsé comme première formation politique et vous a permis de gouverner aujourd'hui ?
Non, rien n'a changé et je connais parfaitement l'engagement du chef de gouvernement quant à la lutte contre la prévarication. Il y a deux approches. Celle de traquer la prévarication, dans toutes ses formes et à tous les niveaux et de la combattre systématiquement, au risque d'engager le pays dans une démarche périlleuse, dont les conséquences seraient imprévisibles, et ce n'est pas la nôtre. L'autre démarche stipule que chaque dossier révélé avec preuve à l'appui est éligible à un traitement judiciaire sans état d'âme, et c'est là notre où réside notre devoir. À titre d'illustration, quand le dossier des primes de l'ancien ministre des Finances, Salah Eddine Mezouar, a été révélé, nous l'avons transmis au procureur pour traitement sans remonter à tous les anciens ministres des Finances.
Le chef de l'Exécutif, qui ne porte pas la presse dans son cœur, a demandé aux citoyens de publier dans la presse tous les dossiers de gabegie dont ils ont connaissance, afin de pouvoir les traiter. Il s'agit pourtant là de la responsabilité du gouvernement et non des citoyens ?
Non, c'est la responsabilité des citoyens aussi, car le gouvernement n'a pas les moyens de déceler tous les dysfonctionnements, alors que les citoyens ont le contact permanent avec l'administration, les établissements publics, etc. À titre d'exemple, on ne peut pas combattre la corruption dans l'administration sans la coopération directe du citoyen et je peux vous certifier que, jusqu'ici, plusieurs cas de corruption ont été traités grâce a l'engagement des citoyens.
Qu'est ce qui a changé entre Ramid, le fervent défenseur des droits de l'homme, et Ramid, le ministre de la Justice et des libertés ?
Ce qui a changé, c'est que quand j'étais avocat et activiste pour les droits de l'homme, j'étais engagé au côté des droits humain,s au détriment des institutions et du pouvoir, ce qui est tout a fait normal, de la même façon que l'agent de l'autorité est engagé avec le pouvoir. L'un comme l'autre ne sont donc pas neutres. Aujourd'hui, je suis ministre de la Justice et des libertés. Je prends les choses par le milieu et c'est ce que certains ne veulent pas comprendre. Il ne peut y avoir de comparaison entre Ramid l'activiste des droits de l'homme et Ramid le ministre. j'essaie autant que faire se peut que chacune de ces deux parties bénéficie pleinement de ses droits les plus absolus.
Êtes-vous réellement optimiste et si oui, comment pourriez-vous convaincre les Marocains de votre optimisme ?
Nous sommes optimistes dans la mesure où nous sommes convaincus que nous allons réussir les chantiers des réformes et que le pays ira de mieux en mieux sur les plans socioéconomiques, démocratique, des droits de l'homme, etc. Cependant, notre optimiste est prudent, car nous sommes arrivés au pouvoir alors que le Maroc vivait une situation critique. Un déficit du budget de 6%, une météo peu clémente, avec une récolte à 50% de son niveau normal, des partenaires étrangers au bord de l'asphyxie des suites de la crise internationale ce qui a eu un impact négatif sur les secteurs du tourisme, de l'export et des transferts des Marocains du monde. Pourtant, on pourrait dire que notre pays ne vit que les prémices d'une crise, sans atteindre un niveau critique, que nous essayons d'éviter avec le soutien et la solidarité de tous les Marocains. Enfin, il y a lieu de sauvegarder et de consolider certaines valeurs comme lavalorisation du travail, l'optimisation de la productivité, le respect des droits des individus et des institutions et de lutter, ensemble, contre les foyers de la prévarication.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.